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L'entrepreneuriat n'est pas une aventure, mais un chemin bien pensé

Prenons garde à ne pas trop relativiser l'échec entrepreneurial qui reste avant tout un désastre pour les startuppers et leurs proches. Pour l'éviter: place à l'expérimentation judicieuse.

Les Fuckup Nights sont en train de conquérir le monde des start-ups. La première édition francophone s’est tenue à Liège, il y a peu. Avant elle, c’est Bruxelles qui avait été séduite par ce concept tout droit venu du Mexique. À chaque fois, des entrepreneurs témoignent de leurs plus gros échecs, à l’image des mini-TED talks.

Lode Uytterschaut est fondateur et CEO de Start-it @CBC
Lode Uytterschaut est fondateur et CEO de Start-it @CBC ©Tim Dirven

Il y a toutefois de quoi émettre quelques réserves à ce sujet. Car même en le présentant d’une façon moderne et dynamique, un échec reste avant tout un désastre pour les entrepreneurs et leurs proches.

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Personne ne crée une entreprise pour jeter l’éponge. Mais cela arrive parfois, malheureusement. J’ai vu des gens perdre leur maison pour rembourser les créanciers. Des fondateurs se retrouver sans famille ni amis, accaparés par leur entreprise 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. De meilleurs amis et des cofondateurs devenir des ennemis. Enfant, j’ai ressenti l’impact des responsabilités de mes parents dans leur entreprise, le stress, la peur de tout perdre et l’impact sur eux-mêmes et la famille quand cela arrive. Je réussis peut-être en tant qu’entrepreneur, mais en tant que partenaire de vie, j’ai déjà échoué à de nombreuses reprises.

Témoigner de la reconnaissance à ses proches

Ce n’est plus toujours la personne sur scène qui souffre le plus de l’échec. Il manque dès lors un point essentiel au Fuckup Nights Manifesto: "Acknowledge the people who are close to you". 

Veillez à ne pas perdre de vue les proches qui vous accompagnent tout au long du processus.

La perte d’une entreprise n’arrive pas du jour au lendemain. Elle est souvent précédée d'un processus très éprouvant. Les entrepreneurs prennent parfois des risques majeurs, mettant en danger tout ce qu’ils possèdent, mais s’attendent à rentrer chez eux dans un havre de paix, où la question du travail ne peut être abordée.

Ils oublient qu’il y a là une famille qui, comme eux, peut tout perdre et qui ne sait absolument pas si et quand cela arrivera. Veillez à ne pas perdre de vue ces personnes qui vous accompagnent tout au long du processus. Informez-les. Ne les laissez pas dans l’incertitude quand les choses tournent mal. Car même si vous ne dites rien, vous pouvez être sûr(e) qu’elles sentent très bien votre combat, votre stress et votre anxiété. Témoignez-leur votre reconnaissance. Remerciez-les sur scène en cas de succès ou d’échec, car ce sont elles qui vous soutiendront quand vous vous lancerez dans votre prochaine entreprise. Soyez-leur reconnaissant(e) d’avoir été à vos côtés, car cela ne va pas de soi. Reconnaissez l’amour de ceux qui vous entourent.

Ne pas tout risquer

Se concentrer exclusivement sur l’échec n’aide pas les futurs entrepreneurs. Nous faisons fausse route en nous focalisant sur l’insuccès. En effet, nous arrivons trop tard et nous gâchons ainsi des idées, du talent, de l’énergie et de la créativité.

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Alors que le risque d’échec d'une start-up est supérieur à 80%, son fondateur met parfois sa maison en garantie et néglige sa famille et ses amis.

Mieux vaut consacrer de l’attention, du temps et des ressources au processus que doivent suivre les fondateurs de start-up. Fondamentalement, "start-up" est synonyme d’"équipe qui cherche à savoir si quelque chose de nouveau peut fonctionner sur un marché de façon évolutive". Le risque d’échec étant supérieur à 80% à ce stade, il ne faut jamais tout risquer. Pourtant, des fondateurs mettent parfois leur maison en garantie et négligent leur famille et leurs amis. Mon mentor a créé une entreprise prospère réalisant un chiffre d’affaires atteignant plus de 200 millions d’euros, mais ce succès n’a tenu qu’à un fil à plusieurs reprises. Parfois, ce fil se rompt (inopinément), mais parfois, on a de la chance et il devient une corde solide.

L'expérimentation judicieuse, telle est la voie à suivre

L’expérimentation judicieuse est au cœur de ce processus. Explorez la possibilité d’un échec et tirez-en des leçons. Développez un réseau solide de personnes sur lesquelles vous pouvez compter. Grâce à ces petits tests, qui n’engloutissent pas des fonds, vous faites circuler le sang dans les veines de votre jeune entreprise. Vous découvrez rapidement si le marché est intéressé, vous constituez une équipe solide, vous découvrez le meilleur business model, vous attirez des investisseurs et vous surmontez les revers.

L’entrepreneuriat n’est pas une question d’échec ou de réussite. C’est un cheminement pas à pas.

Il est regrettable que nous grandissions dans un environnement où l’expérimentation naturelle des enfants n’est pas encouragée à l’âge adulte. Nous sommes surprotégés et apprenons à peine à faire face aux échecs. Dans l’enseignement, on nous apprend surtout à reproduire des connaissances au lieu de les utiliser avec créativité.

Cultiver sa créativité

C’est justement ce processus créatif qui est à l'origine de la résilience. Et cette résilience est nécessaire pour résoudre les problèmes. Dans les années 1960, George Land a mené des recherches pour la Nasa sur l’origine de la créativité. Est-elle innée? Est-elle acquise? Il a soumis plus de 1.500 enfants de 5 ans à un test et constaté que 98% d'entre eux pouvaient être considérés comme des génies créatifs. Lorsque le même groupe d’enfants a été testé cinq ans plus tard, ils n’étaient plus que 30%. Et à l’âge adulte, il n’en restait plus que 2%.

Si nous voulons des enfants, des êtres humains, des entrepreneurs… qui ne soient pas tétanisés par la peur de l’échec en cas de problème, nous devons miser sur la créativité. Le mot "créativité" n’apparaît pas une seule fois dans le Fuckup Nights Manifesto. Je suggère dès lors d’y ajouter aussi: "Be your 5-year old creative self again".

L’entrepreneuriat n’est pas une question d’échec ou de réussite. C’est un cheminement pas à pas. Les entrepreneurs méritent un accompagnement adéquat tout au long de ce parcours, que ce soit sur le plan professionnel, personnel ou même psychologique. En effet, des pics de stress se produisent aussi dans les entreprises prospères. Quand un investissement important fait les gros titres, il arrive que les "brillants fondateurs" se terrent dans le silence. Parce que désormais, ils sont également responsables de l’argent d’autrui, doivent présenter des chiffres de croissance mensuels et savent qu’ils devront un jour rembourser l’argent avec de gros intérêts.

Chaque étape, chaque parcours d’un entrepreneur est riche d’enseignements. Répandons-les au maximum et travaillons à la résilience. Quant aux entrepreneurs "Be creative & keep your close ones closer"…

Par Lode Uytterschaut, fondateur et CEO de Start-it @CBC.

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