Édito | Après la loi Renault, il nous faut une loi Audi
À chaque drame social, sa remise en question. Ici, au cœur du licenciement collectif d'Audi Brussels, celle d'une loi Renault usée jusqu'à la corde qui, depuis plus d'un quart de siècle, demande à être réformée.
Heureusement qu'elle est là, cette loi Renault. Avant, c'était la jungle, nous dit-on souvent. Certes. Mais avouons que depuis sa création en 1997, cette lourde procédure législative ne cesse de faire grincer des dents.
Comme le montre une fois encore le drame protéiforme d'Audi Brussels. Après cinq mois d'information et de consultation (correspondant à la 1ʳᵉ phase de la loi Renault), les employeurs ont, jeudi, débranché la prise des négociations de manière unilatérale. Et ont décidé d'octroyer un package salarial sur mesure, au cas par cas, sans passer par les syndicats.
Une manière radicale, hors du commun, un "dangereux précédent", hurlent lesdits syndicats éconduits, mais qui reste dans les clous de la loi Renault.
Or si une loi mécontente - ce qui est arrivé trop souvent ces dernières années - c'est qu'elle n'est pas adaptée à son sujet, et qu'elle doit être réformée. Un travail souvent remis sur le métier, tant la frustration est grande et régulière. Et qui a débouché sur des palabres, mais guère plus.
Licenciements perlés
Même colère en effet après Caterpillar, en 2016. Même désarroi après la vague de licenciements collectifs qui a suivi la crise sanitaire. En 2021, les négociations ont, comme précédemment, tourné au jeu de dupes: ni employeurs, ni syndicats n'ont réellement voulu franchir le pas, les syndicats refusant de limiter dans le temps la phase d'information et de consultation - avec le risque de mettre en péril des entreprises à la situation financière déjà fragile - et les employeurs refusant d'étendre l'exercice aux sous-traitants.
Résultats: la loi Renault continue de vivre avec ses oripeaux. Comme ces licenciements perlés lors de la mise sous franchise des magasins Delhaize l'année passée, ce qui a permis aux employeurs d'éviter de devoir déclencher la procédure. Ou comme lorsque les syndicats ont préféré jouer la montre quelques années auparavant chez… Delhaize également.
Pourquoi, par exemple, ne pas mouiller davantage les fédérations sectorielles? En 2007, c'est l'entregent de D'Ieteren qui avait permis à Audi de reprendre le site après la fermeture par VW.
Les drames sociaux que drainent ces licenciements collectifs ne peuvent rester sans une réponse adaptée. Notamment dans l'encadrement de la négociation, son contour, sa durée (doit-on attendre plus de 150 jours pour en arriver là chez Audi Brussels?), voire en y ajoutant des procédures de réinsertion. Pourquoi, par exemple, ne pas mouiller davantage les fédérations sectorielles? En 2007, c'est l'entregent de D'Ieteren qui avait permis à Audi de reprendre le site après la fermeture par VW.
Mais pour accompagner les prochains licenciements collectifs, pour améliorer le sort de ces milliers de salariés jetés dans une procédure qui les dépasse le plus souvent, il faut que patrons et syndicats s'entendent. Pour qu'Audi Brussels ne devienne pas qu'une ligne supplémentaire dans le livre de notre histoire sociale. Pour qu'il y ait, pourquoi pas, une "procédure Audi", cette fois porteuse d'espoir.
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