Édito | Avons-nous les moyens de maintenir notre protection sociale?

Rédacteur en chef adjoint

Avec les crises polymorphes à ses portes, la Belgique doit faire un choix cornélien: État social ou État martial? Posée ainsi, la question nous mène tout droit dans le mur.

Un réarmement en mode TGV, un boulet énergétique hors de prix, une croissance économique à bout de souffle, et maintenant des tarifs douaniers qui s'abattent sur le continent: comme disait l'autre, les emmerdes, ça vole en escadrille. Avec cette question qui secoue nos gouvernements: face aux énormes besoins de financements, combien de temps notre État providence va-t-il tenir?

Ce débat à plusieurs milliards, le Royaume-Uni l'a tranché à la hache cette semaine, en présentant un budget radical. Tout y passe: coupes dans les dépenses publiques, dans les prestations de santé, dans les aides aux handicapés, aux malades, alors qu'une nouvelle statistique montre qu'un record de 4,5 millions d'enfants vivent en situation de pauvreté.

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L'État providence est boursoufflé, dispendieux, apoplectique, mais il faut davantage le réformer dans la durée que lui appliquer un remède de cheval qui tuerait le patient, plutôt que le guérir.

Un État en polyguerre

Sur le continent, tous les gouvernements s'en affolent, et tapent frénétiquement sur leurs calculatrices pour éviter ce sacrifice social. Sans croire en de réels miracles, singulièrement dans les pays surendettés comme la Belgique.

L’État belge en polyguerre, militaire, commerciale, climatique, numérique, va-t-il devoir, lui aussi, faire une croix sur l'État social? Au-delà de toute considération éthique, ce serait une erreur de le croire aveuglément.

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D'abord parce qu'en l'absence de relais économiques à l'exportation, notre pays continue de fonctionner vaille que vaille sur une jambe, sa consommation intérieure. La brider au-delà du nécessaire serait désastreux. La crise financière de 2008-2009 l'a bien montré: l'austérité butée de certains pays européens a eu tendance à asphyxier leur économie.

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Une mise en danger qui est aussi démocratique. Selon une étude menée sur 200 élections régionales et nationales en Europe depuis la crise financière, une telle politique a mené à l'émergence, puis au succès grandissant, des partis extrémistes. Et la Belgique n'y a pas fait exception.

Où est cette cohérence des mesures, ce récit qui donne le sentiment que le pays est certes en crise, mais entre de bonnes mains?

Responsabilité collective

Plutôt que de prôner une saignée à blanc de nos acquis sociaux, nos gouvernements doivent pouvoir faire preuve de dosage. L'État providence est boursoufflé, dispendieux, apoplectique, mais il faut davantage le réformer dans la durée que lui appliquer un remède de cheval qui tuerait le patient, plutôt que le guérir.

Mais pour cela, il nous faut passer par un travail de responsabilité collective. Or, où est ce comportement politique irréprochable (suivez notre regard bruxellois)? Où est ce dialogue social fort, dont la grève nationale de lundi – ainsi que toutes celles, larvées, de la SNCB – n'est que le lamentable et inutile contre-exemple? Où est cette cohérence des mesures, ce récit qui donne le sentiment que le pays est certes en crise, mais entre de bonnes mains?

Sans un travail collectif, le pays s'enfoncera dans la paralysie. Avec le risque de rendre toujours plus fragile cet État social que la Belgique a, avec volonté mais parfois sans rigueur, construit au fil des ans.

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Sachant qu'il ne possède pas une majorité au parlement bruxellois, le MR va mettre les prochaines heures à profit pour aller chercher du soutien, sans doute auprès de DéFI et d'Ecolo.
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