Édito | Belfius, une "love story" forcée avec la Défense?
En siphonnant la quasi-totalité des bénéfices de Belfius pour financer ses investissements dans la Défense, le gouvernement taille sérieusement dans la stratégie du bancassureur national.
Après la banque des collectivités, Belfius devient-elle la banque de l’armement? Le trait est grossier, mais une chose est sûre: le gouvernement a clairement changé la réputation de celle qui est née Crédit Communal.
En ponctionnant 500 millions d’euros de dividendes supplémentaires en 2025, puis le même montant en 2026, soit un milliard au total (pour l’instant) en plus des dividendes ordinaires, c’est la quasi-totalité des bénéfices qu’il puise dans les caisses de son bancassureur national pour financer les besoins d’investissements dans la Défense.
Ces dernières semaines, Belfius avait ouvert sa politique de crédits et d’investissement au secteur de l’armement, un virage déjà remarqué. Ici, c’est carrément avec les deux bottes qu’il entre sur le champ de bataille, poussé dans le dos par un actionnaire, l’État, aux abois financiers.
Poussé ou forcé? La question se pose, tant elle vient contrecarrer les plans annoncés urbi et orbi par le management de Belfius.
Que deviendra sa volonté de développement à l’étranger, où le bancassureur comptait investiguer de nouveaux relais de croissance après avoir accumulé plusieurs années de bénéfices exceptionnels sur un marché – la Belgique – devenu trop petit pour lui?
Aura-t-il encore les moyens d’acquérir un acteur, par exemple dans la banque privée, actuellement vache à lait des enseignes européennes?
Heureusement, Belfius a les reins solides et peut assouvir la soif financière de l’Arizona.
Mais une entreprise qui ne croît pas est une entreprise en déclin, qui lutte pour garder ses revenus à hauteur. Lorsque le gouvernement bride la stratégie de Belfius, c’est le dividende futur qu’il obère. Et donc sa propre poule aux œufs d’or.
En faisant main basse sur les bénéfices de Belfius, c’est la crédibilité même de l’enseigne que le gouvernement met dans la balance.
Actionnaire vorace
Une stratégie qui interroge, également, à l’heure où Belfius a plusieurs fois évoqué son souhait de déposer une partie de son capital entre des mains privées. Quel investisseur, désormais, voudra lier son destin à un actionnaire majoritaire aussi vorace?
Plus largement, les clients bancaires pourront aussi se poser la question, à l’avenir, du positionnement du gouvernement lorsqu’il s’agira de plonger dans le débat houleux de la rétribution de l’épargne ou de la baisse des taux sur les crédits. Va-t-il intervenir comme il l’a fait dans le passé avec le fameux bon Van Peteghem? Ou plutôt protéger les revenus de son champion, sur lesquels il compte désormais en quasi-totalité pour assurer ses investissements dans la Défense?
En faisant main basse sur les bénéfices de Belfius, c’est la crédibilité même de l’enseigne que le gouvernement met dans la balance. À moins qu’il n’ait prévu une porte de sortie, grâce à une stratégie de financement pérenne dans la Défense. Pour l’heure, force est de constater qu’outre Belfius et les fort opportuns impôts sur les avoirs russes, il n’y en a guère. Il y a donc urgence, ne fût-ce que pour sauver la probité de l’institution financière.
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