Édito | Pour que la Belgique ne devienne pas une nouvelle Grèce

Rédacteur en chef adjoint

Déchirée sur l’ébauche de son budget, acculée par des comptes publics aux abysses, la France est la cible des marchés. Qui guettent les autres maillons faibles, dont la Belgique.

S’il avait vécu à notre époque, Homère en aurait fait l’un des douze travaux d’Hercule: rééquilibrer les comptes publics de la Belgique, tout en soutenant son économie contre vents et marées. Et rajoutez ceci à notre épopée: une potentielle tempête financière en zone euro.

Car c’est ce qui pourrait bousculer les marchés ces prochains jours. Une tempête venant de France.

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Talonné par le RN de Marine Le Pen qui aime à jouer les marionnettistes, le gouvernement de Michel Barnier vit peut-être ses derniers instants, incapable d’imposer à son pays un budget rigoureux. Avec 6% de déficit public et une dette abyssale, notre voisin n’a pourtant pas droit à une nouvelle apoplexie politique.

Et les marchés le lui rendent bien. Cette semaine, le taux de référence auquel la France doit emprunter à 10 ans a dépassé celui de la Grèce.

Or la France, ce n’est pas la Grèce de 2011, ce n’est pas la Chypre de 2013, c’est la deuxième plus grande économie de l’Union. À l’époque, la violente bourrasque envoyée depuis la terre d’Homère a menacé jusqu’à l’existence de la zone euro. Ici, elle se transformerait en un véritable cataclysme.

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Côté obscur des marchés

Une menace qui doit nous inquiéter. D’abord parce que la Belgique ne sortirait pas indemne de cette nouvelle déflagration. Avec la France qui bascule, l’Allemagne qui patine, ce sont nos plus grands débouchés économiques qui se recroquevillent sur eux-mêmes.

Ensuite parce que les marchés guettent aussi les autres maillons faibles. En 2011, lors de la crise de l’euro, notre pays a connu une menace financière historique. Pourquoi? Parce qu’à l’époque, les investisseurs appréciaient très peu, en pleine crise, la vacance XXL d’un gouvernement. Or nous y sommes à nouveau. Et pour l’heure, notre budget s’écrit en affaires courantes, avec un passage aux douzièmes provisoires pour les trois premiers mois de l’année prochaine.

À force d’avoir tardé à remettre en ordre la maison Belgique, notre gestion des deniers publics évolue désormais dans ce monde schizophrénique où les mesures d’économie se heurtent à des enjeux exigeant des dépenses supplémentaires.

Les négociateurs fédéraux d’un futur probable gouvernement se réunissent ce dimanche autour d’une nouvelle épure. Mais vont-ils intégrer la détérioration de la croissance économique annoncée dans la plupart des prévisions, avec son corollaire sur les recettes de l’État? Voire pire, si la France bascule dans le côté obscur des marchés?

À force d’avoir tardé à remettre en ordre la maison Belgique, notre gestion des deniers publics évolue désormais dans ce monde schizophrénique où les mesures d’économie indispensables se heurtent à des enjeux non moins urgents exigeant des dépenses supplémentaires. Et où chacun voit midi à sa porte.

Or, la meilleure protection que notre pays peut se construire face aux turbulences de marchés est celle d’un assainissement courageux, combiné à des investissements stratégiques et structurels. Un rééquilibrage des comptes publics, combiné à une stimulation économique. Un travail homérique, certes, mais indispensable.

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