Edito | Une croissance résistante, mais déséquilibrée
La consommation compense les difficultés que traverse l’industrie, mais sans apporter de réponse à une compétitivité mise à mal.
L’économie belge résiste plutôt bien au marasme ambiant puisque la croissance devrait, selon la Banque nationale, évoluer sur un rythme moyen de 1,3% au cours des trois prochaines années, en ligne avec la zone euro.
Ce chiffre cache cependant un déséquilibre persistant. Depuis plusieurs trimestres, en effet, l’industrie en Belgique connaît un accès de faiblesse. Cette évolution est heureusement compensée par le dynamisme de la consommation intérieure. Cela nous sauve la mise et on ne peut que s’en réjouir.
Il serait illusoire d’espérer remplacer l’industrie par une économie de services. Sans base industrielle, les grandes entreprises de services ne peuvent pas prospérer.
La question est de savoir si cette croissance est durable. Autrement dit, si un tel déséquilibre est tenable sur le long terme. Si l’on prend l’image d’un avion, l’économie belge fonctionne en quelque sorte sur un seul moteur. Les pertes d’emploi dans l’industrie peuvent être en partie absorbées par un marché du travail toujours très tendu, mais elles risquent néanmoins de miner la confiance des acteurs économiques. Il serait par ailleurs illusoire d’espérer remplacer l’industrie par une économie de services. Sans base industrielle, les grandes entreprises de services ne peuvent pas prospérer.
Or, à court terme, on ne voit pas de renversement de tendance se profiler. Le taux d’utilisation des capacités de production est tombé à 73%, un niveau que l’on n’avait plus connu depuis la pandémie en 2020 et la crise financière de 2008-2009. Confirmant ce diagnostic, une étude de Deloitte que nous détaillons dans nos colonnes montre que, ces deux dernières années, la production industrielle en Belgique a fondu de 12,7% (contre 10% en moyenne en Europe).
Un contexte international peu porteur
Le contexte international n’est pas très porteur non plus: la mondialisation heureuse a laissé la place au retour du protectionnisme et à une fragmentation des marchés. Pas bon pour une petite économie qui dépend étroitement des échanges avec l’extérieur. Si nous voulons conserver un tissu industriel fort, il faudra soigner la compétitivité.
L’indexation a prouvé son efficacité dans la préservation du pouvoir d’achat. Mais elle a simultanément mis à mal des entreprises confrontées à des coûts salariaux en progression rapide. L’inflation plus importante en Belgique en 2024 n'a fait qu’accentuer l’écart de compétitivité avec les pays voisins.
D'après la Banque nationale, au train où vont les choses, il n’y aura pas de marge pour des augmentations salariales conventionnelles en 2025 et 2026. Les partenaires sociaux feraient bien d'intégrer ces difficultés dans leurs prochaines discussions pour redonner du tonus à une industrie aux abois. Par ailleurs, un gouvernement de plein exercice serait tout aussi salutaire. Les négociateurs n'ont-ils jamais évoqué dans leurs discussions un plan industriel pour ce pays?
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