La diversité au sein du personnel des entreprises augmente la satisfaction des collaborateurs, renforce l’engagement sociétal des organisations et leur capacité d’innovation. Une vision partagée par Françoise Chombar, présidente de Melexis et du jury Best Managed Companies, et par Piet Vandendriessche, CEO de Deloitte Belgium. “Les entreprises n’ont plus le choix: elles doivent miser sur la diversité. C’est devenu un must stratégique. Mais surtout, c’est the right thing to do.”
Des études scientifiques le prouvent: les entreprises dotées d’un personnel diversifié et d’une stratégie inclusive comprennent mieux les besoins de leur marché. La raison principale? Les personnes ayant des origines diverses répondent plus efficacement aux besoins des différentes catégories de clients. “C’est pourquoi le personnel d’une entreprise devrait être le reflet de sa clientèle”, estime Françoise Chombar.
La diversité n’est que le point de départ, cependant. C’est en développant une culture inclusive que les entreprises sont en mesure de traduire concrètement cette vision. Sur ce plan, Françoise Chombar est d’accord avec Vernā Myers, stratège de l’inclusion: “La diversité, c’est être invité à la fête; l’inclusion, c’est être invité à danser.”
“La diversité et l’inclusion permettent aux entreprises de développer leur créativité et leur esprit d’innovation”, détaille Piet Vandendriessche. “Les discussions sont ainsi plus approfondies, plus ouvertes, et aboutissent à des innovations.”
Culture d’entreprise
La première étape à franchir par les organisations qui souhaitent ancrer la diversité et l’inclusion dans leur culture d’entreprise, consiste à ouvrir le débat sur ces thèmes. “Tout comme la problématique climatique, il n’y a toutefois pas de solution miracle”, prévient Piet Vandendriessche. “Cela a peu de sens d’introduire des quotas mais les entreprises ont besoin d’une approche orientée résultats. D’un plan complet avec des objectifs. Dans le cas contraire, elles retombent très vite dans leurs vieux schémas de pensée.”
Melexis est la preuve que la diversité au sein des équipes peut générer de meilleures idées. Ces 10 dernières années, la proportion de femmes dans l’entreprise est passée de 25% à plus de 33%. “Ce n’est pas le résultat de programmes axés sur la diversité, mais du fait que la diversité fait partie intégrante de notre culture d’entreprise”, précise Françoise Chombar. “Au sein des équipes de gestion, 30% de nos team leaders et managers sont des femmes. Et plus vous montez dans la hiérarchie, plus les femmes sont nombreuses.”
Le personnel d’une entreprise devrait être le reflet de sa clientèle.
Pouvoir d’attraction
Françoise Chombar confie qu’au cours de ses 18 ans à la tête de Melexis, elle a été inspirée par d’autres femmes, à la fois au sein de son entreprise et dans le secteur des hautes technologies. “Si une femme occupe une haute fonction dans une entreprise, elle agit comme un aimant pour les autres femmes. Aujourd’hui, chez Melexis, les CFO, COO/CIO et Vice-President HR & Sites sont toutes des femmes.”
Piet Vandendriessche a lui aussi constaté que les équipes dirigées par des femmes attiraient davantage de collaborateurs féminins. “Avec 45% de femmes et 55% d’hommes, nous sommes équilibrés pour ce qui est des genres. Lorsque j’ai débuté en tant que CEO en 2016, le comité de direction ne comptait qu’une femme; désormais, elles sont trois. Au niveau des associés également, le nombre de femmes a évolué, passant de 8 à 17. D’ici à 2030, nous souhaitons que 30% de nos associés soient des femmes.”
Grâce à la diversité et à l’inclusion, les discussions sont plus approfondies, plus ouvertes, et aboutissent à des innovations.
Image miroir
La diversité et l’inclusion commencent lors du recrutement, en utilisant notamment un langage neutre dans les annonces. “Assurez-vous que le comité de sélection soit lui aussi diversifié, cela vous permettra d’éviter le syndrome hire like me – en d’autres termes, la tendance que nous avons tous à recruter des personnes qui nous ressemblent”, pointe Françoise Chombar. “Appliquez ensuite cette stratégie lors de la composition des équipes et pour les promotions.”
La diversité et l’inclusion constituent par ailleurs des armes redoutables dans un marché du travail en pénurie. Les organisations qui ouvrent leurs portes aux candidats issus de milieux différents agrandissent leur vivier de talents et attirent davantage de candidats. “Cette vision est de plus en plus présente parmi les participants au programme Best Managed Companies”, témoigne Piet Vandendriessche. “Nous observons une tendance à la féminisation et au rajeunissement du management au sein des entreprises participantes. Les choses sont clairement en train d’évoluer.”
Lettre ouverte
Pour Melexis et Deloitte, la problématique de la diversité doit être abordée sur les bancs de l’école. Les acteurs publics et privés tentent depuis de nombreuses années d’attirer davantage de filles vers les filières STEM (Science, Technology, Engineering & Mathematics), mais avec un succès mitigé. Voici un an, Deloitte Belgium et Melexis ont signé une lettre ouverte demandant que les sciences et techniques occupent une place plus importante dans les programmes de l’enseignement secondaire, une période où les filles sont plus enclines à s’intéresser à des activités moins traditionnellement féminines.
“Si nous voulons attirer davantage de jeunes – et notamment de filles – dans les filières STEM, nous devons nous concentrer sur ce qui relie ces études, le monde de l’entreprise et la société”, juge Françoise Chombar, qui préside également la plateforme STEM, un organe consultatif du gouvernement flamand.
On peut voir la recherche de profils STEM et la diversité des genres comme un double défi.
Double défi
“Le besoin de profils STEM augmente chaque année”, souligne Piet Vandendriessche. “Au cours des années à venir, Deloitte souhaite embaucher 1.500 nouveaux collaborateurs, dont 25% de profils STEM, car notre métier exige de plus en plus de compétences dans le domaine numérique et technologique. On peut donc voir la recherche de profils STEM et la diversité des genres comme un double défi.”
“Les femmes sont aujourd’hui bien représentées dans des domaines comme la médecine et la bio-ingénierie”, note Françoise Chombar. “Je dis toujours aux filles qui hésitent entre ces deux métiers: combien de personnes pourrez-vous aider pendant votre carrière en tant que médecin? Dix mille? Si vous travaillez dans la microélectronique, les nanotechnologies ou la robotique, vous pourrez en aider dix fois plus.”
Si une femme occupe une haute fonction dans une entreprise, elle agit comme un aimant pour les autres femmes.
Auto-exclusion
“Les entreprises qui ne se préoccupent pas d’inclusion s’excluent elles-mêmes du marché”, conclut Piet Vandendriessche. “Mais il y a d’abord et avant tout l’aspect humain. Je ne veux pas avoir à expliquer à mes trois filles qu’elles auront moins d’opportunités de carrière que si elles étaient des garçons. La diversité est une richesse pour toutes les organisations. Personne ne peut se permettre de rester passif sur ce plan. Et il vaut mieux se lancer aujourd’hui que demain.”