En matière de mobilité verte, les gouvernements et les décideurs politiques se concentrent aveuglément sur une seule technologie: la conduite électrique. “C'est une stratégie dangereuse que d'ignorer voire d'interdire les autres solutions”, déclare Sebastian Verhelst, qui mène des recherches sur les carburants respectueux de l'environnement à l'université de Gand.
“Bien que la mobilité électrique ait un grand potentiel et exploite des technologies intéressantes, elle présente aussi des limites importantes qu'il ne faut pas sous-estimer.”
L'évolutivité de la conduite électrique, par exemple, est présentée de manière beaucoup trop optimiste, selon Verhelst. “Avec plus d'un milliard de véhicules sur les routes dans le monde et le doublement prévu d'ici à 2040, il serait irréaliste de penser que tous ces véhicules seront entièrement électriques d'ici là.”
La production future de batteries électriques suscite également des inquiétudes, car elle pourrait devenir problématique en quelques années seulement. “La disponibilité de matières premières telles que le nickel et le cobalt montre déjà des signes d’essoufflement alarmants. La production d'une seule batterie exige aisément plusieurs kilos de ces substances, souvent extraites dans des conditions déplorables dans les pays en développement. À mes yeux, il est plus qu'hasardeux, pour les gouvernements, de se concentrer sur une seule technologie, la conduite électrique, et d'ignorer voire d'interdire d'autres solutions.”
Prenez l'exemple des voitures hybrides rechargeables. “Dans les analyses du cycle de vie, les véhicules hybrides rechargeables utilisant des carburants renouvelables émettent invariablement moins de CO2 que les véhicules full électriques. Et ce, si l’on tient compte de tous les aspects: la production, l'utilisation et le recyclage. Bien entendu, il faut que le carburant utilisé par les véhicules hybrides rechargeables devienne vraiment plus propre. Ces véhicules seront alors plus pertinents que jamais.”
Méthanol vert
Selon lui, la solution devrait plutôt être recherchée dans les vecteurs d'hydrogène, tels que le méthanol produit à partir d'électricité verte. Il s'agit de la forme d'alcool la plus légère qui soit, parfaitement adaptée à la production de carburant simple. Les petits et gros moteurs de voitures, de camions et de bateaux peuvent fonctionner sans problème avec du méthanol.
Il faut que le carburant utilisé par les véhicules hybrides rechargeables soit vraiment plus propre. Ils seront alors plus pertinents que jamais.
Pour faciliter la transition vers des moteurs tournant entièrement au méthanol, une solution intermédiaire pourrait être élaborée, suggère Sebastian Verhelst. “Le méthanol peut être mélangé à l'essence sans aucun problème. Il suffit de modifier légèrement les moteurs existants pour qu'ils fonctionnent avec ce mélange. Et les nouveaux moteurs ne coûteront que quelques centaines d'euros de plus.”
“Les gouvernements européens envisagent très sérieusement cette voie”, conclut Sebastian Verhelst. “Il est probablement préférable d'exiger que les véhicules soient flexibles en termes de carburant, plutôt que d'interdire l'essence et le diesel. De cette manière, on encourage le développement de carburants alternatifs respectueux de l'environnement, ce qui est une nécessité et une véritable urgence. Avec la seule conduite électrique, nous n'y arriverons pas.”