Autrefois perçue comme une simple préoccupation technique, l'intelligence artificielle doit désormais être abordée comme un défi organisationnel, estiment Annelies De Corte et Tania Pittoors chez KPMG Belgique.
Affirmer que l'intelligence artificielle va (radicalement) transformer les entreprises revient à consater une évidence. La manière dont les organisations intègrent l'IA évolue elle-même rapidement. “Il y a cinq ou dix ans, l'IA était encore considérée comme un sujet purement technique, géré principalement par des data scientists”, rappelle Annelies De Corte, Director chez KPMG Belgique, spécialisée en stratégie de données et d'IA. “Les avancées technologiques récentes en ont fait un défi organisationnel. Des nouveaux rôles, fonctions, et processus apparaissent, et l'accent se déplace vers la gestion des risques et du changement, car l'IA influencera inévitablement chaque employé de l'entreprise.”
“Il convient de créer une culture d'entreprise qui adopte l'IA. Les managers y jouent ici un rôle central.”
L'intelligence artificielle est une question qui touche désormais tous les aspects de l'organisation et exige dès lors une approche multidisciplinaire. “Il est essentiel de créer une culture d'entreprise qui intègre pleinement l'IA”, prévient Tania Pittoors, Head of People & Change chez KPMG Belgique. “Les managers y jouent un rôle central. Ils doivent encourager leurs équipes à les expérimenter et leur faire confiance. La direction doit reconnaître les préoccupations de chacun et communiquer de manière transparente. Souvent, les entreprises comprennent la nécessité de s'engager dans l'IA, mais peinent à justifier cette décision de manière claire. Cela peut sembler anodin, mais c'est un prérequis essentiel pour convaincre leurs collaborateurs de s'engager dans le changement.”
Ambassadeurs de l'IA
Au-delà de la culture d'entreprise, les compétences sont tout aussi essentielles, bien qu'elles soient rapidement dépassées par les progrès technologiques. “Autrefois, on pouvait s'appuyer plus longtemps sur une compétence; aujourd'hui, il est primordial de se former en continu”, indique Tania Pittoors. “Le Forum économique mondial, dans son rapport sur les métiers de demain, met l'accent sur la pensée créative, la culture technologique et la curiosité. ”
Pour intégrer l'intelligence artificielle en interne, KPMG a mis en place un réseau d'ambassadeurs de l'IA. “Ce sont des collègues issus de divers départements que nous avons formés à l'IA”, précise Annelies De Corte. “Ces ambassadeurs jouent un rôle clé en rendant les concepts abstraits plus tangibles et restent proches de leurs équipes.”
“Nombreuses sont les entreprises qui se concentrent d'abord sur les fonctions de support, comme les RH et les finances, mais il est crucial d'examiner aussi le cœur de vos activités.”
L'IA dans les processus-clés
“Nous avons revu notre approche de la gestion du changement, car l'IA est plus disruptive que d'autres innovations”, pointe encore Tania Pittoors. “Nous analysons les craintes et les résistances pour accompagner les entreprises à travers les cinq phases de la gestion du changement.
C'est la première fois qu'une technologie a un impact aussi significatif sur les travailleurs du savoir, ce qui génère souvent des réticences. En général, ce ne sont pas des fonctions entières qui sont affectées, mais des tâches spécifiques au sein d'une fonction. C'est pourquoi il est important de revoir la structure organisationnelle et la politique du personnel. ”
Annelies De Corte insiste sur le fait que les entreprises doivent oser intégrer l'IA dans leurs processus-clés. “Nombreuses sont celles qui se concentrent d'abord sur les fonctions de support, comme les ressources humaines et les finances, mais il est crucial d'examiner aussi le cœur même de vos activités. Cela nécéssite une certaine audace, car cela s'accompagne fréquemment de risques accrus.”