Au fil des années, les entreprises accumulent d'immenses quantités de données qu’elles n’exploitent pas suffisamment. "Pourtant, les données constituent une base idéale pour anticiper et intervenir en temps réel sur vos processus", souligne Bert De Craecker, Partner Business Consulting chez Moore Belgium.
Nous sommes tous conscients que les géants de la technologie exploitent nos données personnelles. En revanche, peu de petites entreprises considèrent encore leurs données comme un atout stratégique, déplore Bert De Craecker.
"De nombreuses entreprises sont assises sur une montagne de données: elles enregistrent des commandes d'achat et de vente, des livraisons, des factures, etc." Mais elles n'en tirent pas pleinement parti.
"Au mieux, elles définissent des indicateurs-clés de performance. Pourtant, il est possible de faire bien plus! Avec des analyses de données plus rapides et plus précises, vous pouvez non seulement regarder dans le rétroviseur, mais aussi réaliser des prévisions et ajuster en temps réel ce qui est nécessaire pour rendre votre organisation plus efficace."
Moins d’invendus
Un exemple concret: la boulangerie Aernoudt. Grâce à une prise de décision basée sur les données et l'intelligence artificielle, cette chaîne de boulangeries a réussi à réduire ses invendus de 20%. "L'entreprise intègre les chiffres de vente historiques, les prévisions météorologiques, les promotions de la concurrence et les événements locaux dans une base de données uniques", détaille Bert De Craecker.
Un indicateur retardé vous informe de vos performances passées. Les indicateurs avancés ont une capacité prédictive et vous permettent d'agir immédiatement.
"Grâce à ces données, Aernoudt prévoit beaucoup plus précisément la demande pour ses produits. La probabilité de produire trop ou trop peu diminue considérablement. La boulangerie jette désormais moins d’invendus. La disponibilité des produits, et donc la satisfaction des clients, était au cœur de cette démarche. Aernoudt a réussi à booster cette satisfaction en utilisant les données de manière ciblée."
Chemins de traverse
Recourir aux données peut également optimiser les processus. Le process mining en est une bonne illustration. "Cette méthode offre une meilleure compréhension des processus existants", note Bert De Craecker. "Les entreprises suivent généralement un parcours fixe: le service A introduit un bon de commande, qui est automatiquement envoyé au service B pour vérification, puis le service C effectue un contrôle des stocks, et ainsi de suite."
Nous constatons parfois que les gens suivent les nouvelles instructions mais continuent à remplir leur ancien fichier Excel. Il est crucial de comprendre pourquoi ils agissent ainsi.
"En pratique, on constate que ces processus sont parfois contournés. Les employés empruntent des chemins de traverse – le chemin le plus court et le plus simple pour eux – ou des détours. Ils enjambent les règles et rendent le processus inutilement complexe ou risqué. Le process mining analyse et visualise les données des processus, éclairant immédiatement la zone où cela ne fonctionne pas et la façon dont le processus peut être amélioré."
Le focus sur les indicateurs avancés (leading) plutôt que sur les indicateurs retardés (lagging) est ici très important. "Un indicateur retardé regarde en arrière et vous informe de vos performances passées. Pensez aux KPI tels que le chiffre d'affaires et la marge bénéficiaire. Les indicateurs avancés, à l’inverse, ont une capacité prédictive et vous permettent d'agir immédiatement. Si un processus ne se déroule pas comme prévu, un message en temps réel est envoyé aux responsables pour intervenir."
Pas de Big Bang
Moore commence toujours l'accompagnement d'une organisation dans une transition numérique par une analyse des objectifs et de la stratégie. "Dans les entreprises opérant sur des marchés très concurrentiels où chaque milliseconde compte, les données peuvent renforcer l'efficacité des processus", indique Bert De Craecker. "Dans d'autres entreprises, l'innovation a davantage de poids, tandis que dans d'autres encore, l'accent est placé sur l'orientation client."
Le plus grand piège, dans une transition numérique, est de vouloir en faire trop. Tout est lié, bien sûr, mais un Big Bang mène généralement à des scénarios catastrophes.
Après cette analyse, Moore détermine les priorités avec l'entreprise. "Le plus grand piège est de vouloir en faire trop: intégrer à la fois la chaîne d'approvisionnement, le CRM et les finances dans un nouveau système. Tout est lié, bien sûr, mais un Big Bang mène généralement à des scénarios catastrophes."
Pas à pas
"Une approche progressive est préférable. Cela permet d’apprendre de ses erreurs et d’agir plus rapidement. Si vous tentez de tout faire en une fois, vous passerez deux ans à planifier. D'ici là, le monde aura changé! En outre, vos employés accepteront plus facilement un changement progressif qu'une révolution soudaine."
Autre piège: les travailleurs doivent apprendre à utiliser le nouveau système, mais aussi désapprendre l'ancien. "Nous constatons parfois que les gens suivent les nouvelles instructions – par exemple, introduire des commandes dans une application – mais continuent à remplir leur ancien fichier Excel", conclut Bert De Craecker. "Il est alors crucial de comprendre pourquoi ils agissent ainsi et de rester à l'écoute de leurs expériences avec la transition numérique."