“Bien sûr, le travail hybride devient la nouvelle norme, mais ce n'est pas l'essentiel”, estime Ivo Christiaens, directeur des ressources humaines de Siemens Belgique-Luxembourg. “L'avenir passe surtout par une flexibilité accrue et une collaboration différente, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'entreprise. C'est pourquoi il faut investir dans la technologie et la culture d'entreprise.”
L'année dernière, la fédération technologique Agoria a décerné à Siemens Belgique-Luxembourg le titre d’Employer ready for the future of work. Ce label récompense la politique RH des entreprises prêtes pour la transformation digitale.
“Nous aurions tort de penser que la digitalisation n'a d'impact que sur nos activités et nos clients”, prévient Ivo Christiaens. “Nos opérations et processus internes changent eux aussi. Afin de répondre plus rapidement à l'évolution du marché, nous nous séparons d'entités commerciales et créons des joint-ventures. Siemens est en train de basculer d'un statut de grand conglomérat à une structure de holding. Ce qui accroît notre agilité.”
Si l'organisation change, cela a des conséquences sur les employés, la façon de travailler et les compétences requises. “La digitalisation est synonyme de plus grande efficacité, d’abord et avant tout pour nos clients, mais elle nécessite une transposition”, avance Ivo Christiaens. “Pendant longtemps, tout a tourné autour de l'électrification et de l'automatisation. Ces dernières années, la dimension digitale s'y est ajoutée.”
C'est pourquoi Siemens Belgique-Luxembourg a lancé voici un an le programme Ready for the Future. “Ce programme soutient nos business units dans leur processus de digitalisation. Nous n'imposons délibérément pas le rythme de ce processus d'en haut. Le programme s'adapte à la vitesse à laquelle chaque entité opère sa transformation.”
Notre plateforme d'apprentissage utilise l'intelligence artificielle pour proposer aux employés les formations qui correspondent le mieux à leur profil et à leurs intérêts.
Faire ses propres choix
Pièce maîtresse de Ready for the Future: une toute nouvelle plateforme d'apprentissage comprenant 90.000 “objets d'apprentissage”. “Autrefois, nous ne savions pas vraiment qui avait suivi quelle formation; aujourd'hui, notre approche est complètement différente”, confie Ivo Christiaens.
“Nous partons de la manière et des circonstances dans lesquelles le collaborateur apprend le mieux. Pour certains, c'est une présentation pendant les heures de travail, pour d'autres un podcast qu'ils pourront écouter le week-end. La nouvelle plateforme d'apprentissage répond avant tout au besoin d'un processus d'apprentissage individuel et sur mesure.”
“Apprenez comme vous voulez”: l'idée est logique mais peut-on réellement laisser le choix de la formation à chaque employé? Sachant qu'un parcours d'apprentissage est principalement aiguillé par les changements des besoins et les évolutions technologiques dans un secteur?
“C'est vrai, mais nous savons aussi que les personnes sont plus motivées à apprendre lorsqu'elles sont guidées par leurs propres intérêts dans leur choix des formations”, répond Ivo Christiaens. “Pour leur éviter de faire trop de mauvais choix, nous prévoyons régulièrement des réunions avec le responsable direct. Les développements attendus et la stratégie à suivre dans un certain secteur pour les années à venir sont alors mis sur la table: quelle direction prend la technologie, quels nouveaux modèles d'entreprise émergent? Quel impact cela aura-t-il sur les compétences dont nous avons besoin?”
“Notre plateforme d'apprentissage utilise l'intelligence artificielle pour proposer aux employés les formations qui correspondent le mieux à leur profil et à leurs intérêts. Et nous partons du principe que les employés posent généralement les bons choix.”
Ivo Christiaens reconnaît qu'une telle culture d'apprentissage ne peut être mise en œuvre du jour au lendemain. “Nous allons bientôt organiser pour la première fois une semaine d'apprentissage, au cours de laquelle chaque employé recevra au moins quatre heures de formation. De cette manière, nous envoyons un message clair: nous considérons la formation comme très importante et impliquons tout le monde dans cette nouvelle approche. Avec le temps, la nouvelle culture d'apprentissage reposant sur les choix propres des employés devrait devenir automatique. Les gens s'approprient de plus en plus leur propre carrière. Cela signifie également qu'ils en sont largement responsables.”
Recrutement via Spotify
Outre la formation, Siemens Belgique-Luxembourg place l'accent sur le recrutement, avec un œil sur le futur. Comment déterminer, dans la perspective de la digitalisation, les profils et les compétences dont vous aurez besoin dans les années à venir? Plus encore, comment et où trouver ces talents?
“La probabilité est faible qu'un spécialiste de la cybersécurité ou un développeur d'applications nous contacte spontanément parce qu'il ne trouve pas d'emploi”, constate Ivo Christiaens. “La plupart des profils que nous trouvons intéressants ne sont pas en recherche active d'un emploi. Nous devons les trouver et les convaincre que Siemens est devenue une entreprise industrielle complètement différente et un employeur passionnant pour les spécialistes des données et les génies de la cybersécurité, entre autres.”
“Nous cherchons nous-mêmes ces profils par le biais de plateformes et de forums en ligne où nous publions par ailleurs nos offres d'emploi. À l'avenir, nous devrons sans doute exploiter de nouveaux canaux de recrutement non conventionnels. Pourquoi pas Spotify?”
Cette guerre des talents n'est pas nouvelle, surtout pour les profils de haute technologie. Aujourd'hui cependant, tout va beaucoup plus vite: l'expertise et les compétences requises évoluent à un rythme des plus soutenus.
“Certaines activités s'arrêtent tout aussi brusquement que de nouvelles apparaissent. En tant qu'entreprise, vous devez y répondre de manière proactive. Dans notre secteur, le désir d'apprendre et la flexibilité permanente gagnent sans cesse en importance. L'attitude d'un employé est donc tout aussi cruciale que ses connaissances technologiques.”
Certaines frontières hiérarchiques doivent-elles être dissoutes? Comment mieux déployer les personnes dans un rôle complètement différent?
Les RH comme laboratoire d'essai
Une troisième priorité de Ready for the Future est l'organisation de l'entreprise elle-même, au sens le plus large du terme. “Même dans une société d'ingénierie allemande solidement structurée, l'incertitude peut être un problème!”, sourit Ivo Christiaens. “Des choix difficiles s’imposent parfois. Faut-il réorganiser une unité commerciale à partir de zéro – parce qu'elle n'est plus adaptée aux activités ou au niveau de prix – ou abandonner complètement ce segment? Dans de tels scénarios, il convient de faire preuve de souplesse afin de rendre l'organisation plus légère, rapide et efficace.”
C'est pourquoi Siemens souhaite également créer des laboratoires de test. “Certaines frontières hiérarchiques doivent-elles être supprimées? Comment mieux déployer les personnes dans un rôle complètement différent, qui pourrait même ne pas correspondre à leur fonction 'officielle' ? Si l’on ne peut appliquer ces principes à l'ensemble de l'entreprise en une seule fois, nous souhaitons tenter l'expérience dans de plus petites entités.”