Chatbots, entretiens vidéo, évaluations en ligne: les procédures de candidature et de recrutement sont en pleine transition numérique. Fons Leroy, spécialiste du marché du travail et ancien directeur général du VDAB, détaille la façon dont candidats et employeurs peuvent aborder ce changement de manière optimale.
“Les chatbots et autres systèmes de mise en correspondance automatisés ne constituent pas une menace pour le candidat. Ils présentent au contraire de nombreux avantages. Ces systèmes qui utilisent l’intelligence artificielle pour évaluer des critères exclusivement objectifs, tels que le lieu de résidence, l’horaire et le salaire, offrent un gain de temps à toutes les parties prenantes.”
“La présélection numérique permet de déterminer immédiatement qui correspond totalement, partiellement ou pas du tout à certains critères de base liés à une fonction. Grâce à ce premier filtre, les recruteurs en chair et en os peuvent ensuite consacrer davantage de temps aux entretiens de fond.”
Miroir
“Les candidats peuvent être sûrs que les ordinateurs n’émettent aucun jugement et ne prennent aucune décision sur des questions comme l’enthousiasme au travail, l’adéquation entre les valeurs et normes du candidat et celles de l’entreprise, ou encore la valeur ajoutée stratégique d’un talent pour l’employeur. Ce sont des éléments qui sont abordés lors des entretiens physiques.”
“Les employeurs doivent néanmoins veiller à ne pas tomber dans le piège du recrutement miroir. Un principe selon lequel le recruteur recherche essentiellement des profils très similaires à celui des collaborateurs existants. Cela engendre un effet d’uniformité avec des personnes présentant les mêmes talents et compétences, alors qu’une saine diversité peut être très enrichissante à la fois pour les collaborateurs et pour l’employeur.”
Un ordinateur peut évaluer des critères objectifs mais pas jauger la compatibilité du candidat avec l’entreprise ni sa valeur ajoutée sur le plan stratégique.
Sélection
“Des études montrent qu’un personnel diversifié stimule la créativité et l’innovation sur le lieu de travail. Les procédures de sélection numériques ne doivent pas être un frein à cette diversité. D’ailleurs, la plupart des systèmes d’IA sont entraînés pour ne faire aucune distinction sur la base du genre, de l’âge et de l’origine des candidats.”
“Les procédures de sélection qui se concentrent exclusivement sur le candidat sont totalement obsolètes. L’employeur y occupe une place de plus en plus centrale, et la raison en est simple: dans les 10 à 15 prochaines années, davantage de personnes quitteront le marché du travail que de personnes qui l’intégreront. Et les candidats disponibles seront de mieux en mieux formés. Les dirigeants et les cadres sont les ingénieurs de demain: ils constitueront une denrée si rare qu’ils auront l’embarras du choix en matière d’emploi.”
Communication non verbale
“Les entreprises doivent se demander comment s’adresser à ces talents. Elles peuvent certes utiliser la technologie, mais elles doivent également veiller à ce que le recours à des systèmes de sélection numériques ne rebute pas les candidats. L’individu doit plus que jamais rester au cœur de l’attention.”
“Les entretiens vidéo constituent un juste équilibre entre interactivité humaine et support technologique. Ils permettent aux candidats et à leur employeur potentiel de profiter d’un contact individuel. Les deux parties peuvent ainsi se reposer sur les éléments de communication non verbale, qui pèsent pour 60% dans la procédure de sélection, comme l’ont révélé des études qui se sont penchées sur les procédures de sélection par vidéo pendant la crise du coronavirus.”
Compétences numériques
“Pour pouvoir tirer parti de la communication non verbale, il est indispensable que les talents et les entreprises organisent des entretiens vidéo. Cela requiert des compétences numériques sans lesquelles tant les candidats que les entreprises seront impuissants. Le numérique est notre nouvelle langue maternelle.”