Testé par le chef Willem Hiele | Ernst, “son” restaurant numéro un, à Berlin
Notre critique culinaire Jan Scheidtweiler a cédé sa place à Willem Hiele, qui a testé l’enchantement poétique du Ernst à Berlin.
Notre critique culinaire Jan Scheidtweiler a cédé sa place à Willem Hiele, qui a testé l’enchantement poétique du Ernst à Berlin.
J’ai rencontré le chef canadien Dylan Watson-Brawn en 2017, lors de notre entrée sur la liste des meilleurs restaurants européens selon Opinionated About Dining. J’ai vu en lui un chef intègre et modeste, pétri d’ambition et de potentiel. Je me suis finalement attablé dans son établissement pour la première fois il y a quelques semaines. Derrière une façade en béton gris, j’ai ressenti - ainsi que mon équipe (Brend, Bieke et Nebo) - une chaleur et une émotion rares dans l’univers gastronomique.
Le restaurant Ernst se limite à un comptoir de huit places pour deux services le soir. Le dîner est ici une expérience intime. Nous assistons à une pièce de théâtre culinaire où six chefs préparent les plats à la minute.
Ce style de cuisine exige énormément de savoir-faire, de maîtrise et surtout une bonne dose de vision et d’audace. Le produit en est l’essence même: la recherche des bons ingrédients chez les petits producteurs donne du relief à chaque plat.
La philosophie, les techniques et l’inspiration sont à trouver du côté du Japon. Watson-Brawn a quitté l’école à 16 ans, mais son talent lui a ouvert les portes du triplement étoilé Ryugin, à Tokyo. Cette influence, on la retrouve dans de nombreux plats centrés sur un délicieux dashi, un bouillon à base de kombu (algue) et de bonite (thon séché, fumé et fermenté).
Le menu dégustation se compose d’une quarantaine de petits plats épurés défilant à un rythme soutenu. Dans mon carnet, j’ai noirci des pages entières pour m’en souvenir. Raifort fermenté et sashimi de calamar ultra fin. Terrine de chicon et d’orange. Palourdes et groseilles. Couteaux en deux préparations: crus et sur le grill au charbon de bois, servis avec du beurre dashi et une cuillère de caviar bélouga de Turnhout, mais oui! Les Saint-Jacques sont ouvertes devant nous et le coquillage encore vivant arrive dans notre assiette dans un délicieux bouillon dashi accompagné de brins de ciboulette. S'ensuit une seconde Saint-Jacques, grillée et servie avec une sauce au beurre de corail. Nature et authentique. Arrivent ensuite des plats de crabe: un chawanmushi (une variation de la traditionnelle soupe japonaise à l’œuf), une sorte de brandade au crabe et lait d’amande et une géniale préparation de crabe bleu mariné.
Le silence règne: mon équipe se régale en silence, impressionnée par tant de maîtrise. Ce restaurant parle le même langage que nous, fait de poésie et de cuisine à l’état pur.
Je déguste un thé inspiré du genmaicha japonais et aromatisé avec des grains de sarrasin grillés au lieu des traditionnels grains de riz et c’est une super découverte!
Ernst est l’expérience de restaurant la plus intense que j’ai jamais vécue, car elle se base sur le produit, la pureté et la maîtrise des cuissons. Je termine la soirée en essuyant une larme sincère pleine d’émotion, d’admiration et de respect, et des pages d’inspiration notées dans mon carnet. Pour moi, Ernst est le restaurant où tous les chefs devraient venir s’attabler pour y passer une soirée de découvertes en toute humilité.
Adresse
Gerichtstraße 54, Berlin (Allemagne)
www.ernstberlin.de
Fermé le dimanche, le lundi et le mardi.
Sommelier
Le fantastique sommelier Christoph Geyler sélectionne des vins de petits producteurs européens indépendants qui appliquent la même philosophie durable que les fournisseurs du restaurant.
Addition
Un menu dégustation est facturé 225 euros. Le pairing vin revient à 125 euros et le pairing sans alcool à 95 euros.
On y retourne?
Le plus tôt sera le mieux. Comme il est difficile d’avoir une place, il est recommandé de s’inscrire à la newsletter. Je crois que j’ai tout intérêt à réserver ma place avant la parution de cet article.