L’univers des collectionneurs est fait de rêves, de possessions et (parfois) d’obsessions. Cette semaine, le garage d’ancêtres de Ludo Dierckx.
Avant de nous emmener dans son "hall automobile", le paysagiste Ludo Dierckx (67 ans) nous montre sa Porsche 911 Carrera 2 Cabriolet (1994) qui affiche plus de 250.000 kilomètres au compteur, presque tous parcourus en voyage. "Il manque 15.000 kilomètres parce que le compteur a été en panne", précise-t-il.
"Avec elle, j’ai voyagé dans toute l’Europe et même jusqu’à Pékin. L’année dernière, mon épouse et moi avons parcouru l’Argentine jusqu’en Patagonie et traversé le Chili avant de revenir à Mendoza. Ensuite, nous avons poursuivi notre périple au Pérou, en Équateur et en Colombie: 52 jours et 14.500 kilomètres de voyage. Bientôt, la voiture embarquera sur un bateau pour le Panama. De là, nous traverserons le Costa Rica, le Nicaragua, le Honduras, le Guatemala et le Mexique jusqu’à Miami, soit 11.500 kilomètres."
"Quand j’ai acheté cette voiture, neuve, je n’avais pas l’intention de l’utiliser pour voyager", explique-t-il. "Nous sommes tout de même partis une fois en vacances dans le sud de la France. Ensuite, nous avons pris goût au voyages: nous faisions expédier la voiture jusqu’à un point de départ, en Turquie ou en Roumanie, par exemple. Une fois, ma fille l’a même conduite jusqu’à Thessalonique, en traversant l’Albanie. Nous ne réservons jamais rien à l’avance, sauf pour la première nuit. De l’argent en poche, des vêtements dans la valise, telle est notre devise. Il nous arrive de partir sur un coup de tête. D’ailleurs, ma conduite au quotidien est tout aussi spontanée. Soudain, je me dis: tiens, et si je tournais à droite?"
"La Porsche est le meilleur achat de ma vie: je n’ai jamais eu la moindre panne, les frais d’entretien restent raisonnables et elle vaut plus cher que quand je l’ai achetée."
Il possède également une 911 4S Targa (2020). "Elle n’a que 14.000 kilomètres au compteur. C’est une voiture fantastique, mais je la conduis rarement. Quant à la Morgan Plus 8 (1994), c’est encore moins: 1.000 kilomètres par an, voire zéro."
Autobiographie
Ludo Dierckx
Fondateur de LD Tuindesign, qui conçoit des jardins, des piscines et des pool houses.
◆ La première: Mini Cooper 850 (1967). "Sinistre total après deux semaines."
◆ Voiture de tous les jours: Range Rover (2015) et Land Rover Defender (2021).
◆ La meilleure: Porsche 911 Carrera 2 Cabriolet (1994).
◆ La pire: "Le Range Rover est parfois surnommé bankrover."
◆ Le rêve: Alfa Romeo Montreal et Alfa Romeo 1900 Cabriolet.
Play-boy
Sa collection est soigneusement alignée derrière une vitre: neuf Alfa Romeo, chacune sous sa housse de protection. Parmi elles, une Giulietta Spider (1957) et une Giulia Spider (1963). "C’est avec elle que j’ai participé au Tour Amical!", s’exclame-t-il en riant. "La 2000 Touring (1962) est un pur plaisir pour les longs trajets: décapotée, elle est magnifique. Quant à la GTC Spider (1966), elle a une histoire particulière: elle appartenait à John Cave Abbott, un Britannique installé en Italie qui écrivait des ouvrages sur la nutrition. Je me suis souvent demandé ce qui avait poussé un scientifique de cette envergure à jouer les play-boys avec cette voiture!"
Âge d’or
Plus loin dans la rangée, nous découvrons quatre Spider: une Duetto (1976) ("la plus belle -quelle croupe!"), une Coda Tronca (1976), une Ducktail (1987) et une 1.6 (1992) qui affiche à peine 40.000 kilomètres. Mais la plus remarquable est la dernière: "La Quattroruote (1968) a été produite à seulement 92 exemplaires par le carrossier Zagato", explique Dierckx. "C’était déjà une voiture rétro à l’époque, un hommage à l’illustre 6C 1750 des années 1930, mais avec une motorisation moderne. Après une longue recherche et grâce au tuyau d’un ami, je suis allé la chercher à Saragosse, en Espagne. Avant cela, elle avait été exposée dans un musée. Je l’ai payée environ 120.000 euros, ce qui en fait la voiture la plus chère de ma collection. Et elle roule à merveille."
"Ce sont des modèles de l’âge d’or d’Alfa Romeo, à l’époque où le constructeur enchaînait les victoires en compétition", explique-t-il. "Ensuite, elle a perdu de sa superbe. Et si l’on remonte encore plus loin dans le temps, les prix s’envolent, comme pour la 1900 des années 1950. Mes voitures ont été restaurées, mais ce ne sont pas des pièces de concours: elles sont faites pour rouler."
Dierckx collectionne également les timbres, les livres érotiques et les œuvres d’art. Sa propriété abrite de nombreuses œuvres monumentales d’artistes tels que Jean-Michel Folon, Koen Vanmechelen et Jan Fabre, présentées dans un décor exceptionnel. "C’est vers 2012 que j’ai vraiment commencé à collectionner les voitures, aussi en pensant à nos cinq petits-fils.
Au départ, je pensais aux Porsche, jusqu’à ce que je lise l’histoire d’un jeune de 18 ans qui s’était tué au volant de l’une d’elles. J’ai alors cherché des modèles moins puissants. J’aime beaucoup les Alfa Romeo. Ce ne sont pas des investissements à proprement parler, mais il est toujours judicieux de diversifier son patrimoine. Et puis, un bel objet procure plus d’émotion qu’un nombre sur un compte en banque. Elles conservent plus ou moins leur valeur, le plaisir de conduire en prime."
"En général, c’est la dernière arrivée dans la collection que je conduis le plus, mais je ne les conduis pas toutes ni chaque année. Je les mets néanmoins à disposition pour la Coppa Classic, un rallye organisé en juin par le Kiwanis et dont la ligne de départ est ici. J’invite aussi des clients à les conduire, ou bien des collaborateurs. Les gens me prennent parfois pour un fou, mais ces voitures doivent rouler de temps en temps - et puis, je ne suis pas le chauffeur le plus brillant."
Il continue à rechercher des Alfa spéciales. "Lors de la Zoute Sale organisée par Bonhams, j’ai failli acquérir un bus Alfa Romeo. J’ai proposé 35.000 euros, mais il est parti pour 39.000. À vrai dire, j’étais prêt à les mettre."