Du savon au safran au savon à la bière, Maxime de Villenfagne et les Savonneries Bruxelloises testent des ingrédients originaux et de qualité.
Du savon au safran au savon à la bière, Maxime de Villenfagne et les Savonneries Bruxelloises testent des ingrédients originaux et de qualité.
© Alexander D'Hiet

Les Savonneries Bruxelloises : un siècle d'excellence artisanale au cœur de la capitale

Le savonnier Maxime de Villenfagne des Savonneries Bruxelloises nous parle d’une Rolls-Royce analogique, de bonnes affaires d’occasion et de savon à la bière.

Comment allez-vous?

"À merveille! En 2026, les Savonneries Bruxelloises célébreront leur centenaire et l’entreprise continue de prospérer. Depuis janvier 2024, nous disposons d’une nouvelle chaîne de production, qui fonctionne à plein régime depuis son installation. Il y a deux ans, nous avons acheté un hangar attenant de 300 m2:  les machines qui y seront installées ont été en grande partie acquises d’occasion. Un nouveau broyeur coûte 150.000 euros, mais j’ai déniché un ancien modèle pour 6.000 euros inutilisé depuis deux décennies."

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Quelle est votre fierté?

"Trois mois avant la pandémie, nous avons repris les Savonneries Bruxelloises, le plus ancien atelier de savon de Bruxelles. Le moment n’était pas idéal, j’étais devenu papa depuis deux semaines. Le dossier de reprise nous est parvenu grâce à mon associé, Maxime Pecsteen. Nous nous sommes rencontrés en 2007 à Shanghai, où j’étais en échange Erasmus et où lui faisait une année sabbatique pour étudier le mandarin. Nous avons ensuite collaboré chez Deloitte et avons décidé de nous lancer ensemble dans l’aventure des Savonneries Bruxelloises."

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"Lors de ma première visite, je me suis fait passer pour un représentant d’un fournisseur d’énergie, afin d’étudier l’usine sans inquiéter le personnel au sujet de la vente imminente. Dès que j’ai franchi la porte, j’ai eu un coup de foudre: cette odeur de savon, ces murs patinés, ces machines d’époque, cette alliance d’authenticité, de savoir-faire et de qualité supérieure! Et tout ça au cœur de Bruxelles, à quatre kilomètres à vélo de chez moi."

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 Maxime de Villenfagne: "Dès que j’ai ouvert la porte, j’ai su que c’était ce que je devais faire. Cette odeur de savon, ces vieilles machines, ce mélange d’authenticité. Et tout ça au cœur de Bruxelles."
Maxime de Villenfagne: "Dès que j’ai ouvert la porte, j’ai su que c’était ce que je devais faire. Cette odeur de savon, ces vieilles machines, ce mélange d’authenticité. Et tout ça au cœur de Bruxelles."
© Alexander D'Hiet

Quelles erreurs avez-vous commises?

"L’année dernière, nous n’avons pas été en mesure de fabriquer 2 millions de savonnettes. Sur une production totale de 8 millions, c’est considérable. Nous n’acceptons plus de nouveaux clients, car nous ne pourrions pas honorer nos commandes dans les délais impartis. Si nous avions des actionnaires, ils déploreraient que nous laissions filer des opportunités commerciales en raison d’un problème de capacité. Mais je vois les choses différemment: nous avons le privilège de sélectionner les bons clients, tant en business-to-business qu’en business-to-consumer."

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"Nous privilégions la qualité. Si un producteur de safran italien souhaite un savon à l’extrait de safran, nous le fabriquons. Cette année, nous avons créé un savon pour le plus grand producteur de paprika d’Europe. Nous collaborons également avec des apiculteurs sur des savons à base de miel ou de pollen. Et le malt d’orge, un sous-produit du processus de brassage de Brussels Beer Project, est transformé en savon et en shampoing. Ces collaborations bruxelloises sont une source de fierté."

Qualité mécanique supérieure

Les Savonneries Bruxelloises recourent à des machines traditionnelles. "Nous avons testé en Italie une machine moderne pilotée numériquement, mais après trois mois, nous n’avons toujours pas réussi à égaler notre qualité ni la rapidité de notre production. Nous n’avons donc pas changé", explique Maxime Pecsteen. "Nos machines peuvent être comparées à une Rolls-Royce: si on l’entretient avec soin, elle roulera à merveille."

"Ce parc de machines 100% mécaniques ne nous empêche pas de développer de nouvelles catégories de produits. Les shampoings solides, par exemple, représentent déjà 20% de notre chiffre d’affaires. Nous produisons également des barres de lavage pour le visage et des barres pour le corps. Uniquement des produits solides, une alternative aux savons liquides et aux crèmes qui dominent le marché depuis les années 1980."

 Maxime de Villenfagne: "Récemment, le magazine Vogue a désigné notre savon comme le plus beau du monde."
Maxime de Villenfagne: "Récemment, le magazine Vogue a désigné notre savon comme le plus beau du monde."
© Alexander D'Hiet
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Avez-vous le sentiment d’avoir réussi?

"Nous avons notre propre boutique dans les Galeries Royales Saint-Hubert à Bruxelles. Nous sommes fournisseurs de la Cour de Belgique. Et le Château de Versailles commande son savon chez nous. En France aussi, il y a des ateliers de savon, mais apparemment, ils ne peuvent rivaliser avec notre qualité."

"Récemment, un client japonais nous a sollicités pour produire un savon de 250 grammes en forme d’ours. Il avait déjà contacté divers producteurs en Corée, en Chine et au Japon, mais a finalement choisi les Savonneries Bruxelloises. Récemment, le magazine Vogue a désigné notre savon comme le plus beau du monde. Et lorsque nous fabriquons du savon pour des tiers, ils demandent que notre nom figure sur l’emballage: ils sont fiers que leur savon soit fabriqué chez nous.Bien sûr, ce sont de magnifiques compliments, mais ce n’est pas Maxime ni moi qui en recueillons les lauriers: nos employés font des efforts considérables pour fabriquer le meilleur savon d’Europe."

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Qu’est-ce qui vous préoccupe?

"La pérennité d’une manufacture urbaine comme la nôtre. Le prix au mètre carré à Bruxelles est exorbitant et les permis prennent un temps fou à être avalisés. Pour une extension de 300m², nous payons autant que pour 2.000m² dans une zone industrielle à Tubize. Nous préférerions rester sur notre site historique à Laeken, mais si les autorités décident du jour au lendemain de transformer notre rue en sens unique, notre histoire s’achèvera ici. Et ce serait regrettable."

"Un nombre croissant d’entreprises de production expriment le souhait de quitter Bruxelles. On se demande qui sera le prochain. Serions-nous les seuls à vouloir encore rester à Bruxelles? Si nous devions recommencer à zéro aujourd’hui, nous ne nous installerions pas à Laeken. Ce n’est pas l’emplacement idéal, même si, malgré nos bâtiments et nos machines d’époque, nous produisons toujours plus efficacement que les trois usines de savon que nous avons visitées en septembre dernier en France."

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 Maxime de Villenfagne: "Nous privilégions la qualité."
Maxime de Villenfagne: "Nous privilégions la qualité."
© Alexander D'Hiet

Comment faites-vous la différence avec les autres?

"Nous sommes un produit local, zéro déchet et sans plastique, fabriqué à partir des meilleurs ingrédients naturels. La demande pour ce type de produits s’accroît. Nous fabriquons du savon en sept étapes alors que d’autres producteurs se limitent à quatre. Cela se ressent dans la qualité du produit final. Tous les membres du personnel dans l’atelier, des opérateurs de machines aux emballeurs, sont formés pour détecter la moindre erreur de production. Chez nous, tout le monde a le même souci du détail."

Sur quoi devriez-vous travailler en urgence?

"Nous pourrions doubler nos ventes si nous développions davantage le business-to-consumer. La demande existe, cependant la capacité n’est pas suffisante pour l’instant. Mais cela va évoluer."

"Maxime et moi prenons ensemble toutes les décisions commerciales, même si nous échangeons chaque année la répartition des tâches, afin de connaître un peu de tout. Nous détenons chacun 50% des actions. Nous ne sommes pas une start-up, nous n’attendons pas d’investisseurs ni d’actionnaires. Pourquoi devrions-nous les inclure si nous pouvons tout financer nous-mêmes et croître de manière organique?"

© Alexander D'Hiet
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