© Wouter Maeckelberghe

64.000 boules de Noël: une collection qui raconte l’histoire des fêtes

L’univers des collectionneurs est fait de rêves, de possessions et (parfois) d’obsessions. Cette semaine: Christel Dauwe et ses 64.000 boules de Noël.

Le sapin de 3,60 mètres de haut de Christel Dauwe (57 ans) porte pas moins de 1.840 boules (ou plutôt figurines) de Noël. Lors de la rénovation de sa maison du XVIIIe siècle, elle est allée jusqu’à sacrifier une pièce entière afin de pouvoir l’installer. "Lorsque nous avons suggéré de créer un hall ouvert, l’architecte n’était pas du tout convaincu!", s’exclame-t-elle en riant.

"Pour moi, Noël est essentiel. L’installation de mon sapin me prend une semaine. En général, il est prêt dès le 1er novembre, ce qui a d’ailleurs provoqué quelques disputes avec Harry, et il reste en place au moins jusqu’à la Saint-Valentin, car il neige souvent au début du mois de février."

Publicité
Publicité
© Wouter Maeckelberghe

Mais ce n’est pas un vrai sapin, car "ils ne tiennent que trois ou quatre semaines". Dauwe garde un souvenir très précis du sapin de Noël, naturel, de sa grand-mère. "Il trônait dans le salon d’apparat, une pièce qui n’était jamais chauffée, sauf pour la veillée et le jour de Noël. On y accrochait même des bougies. Dans un coin, il y avait un seau rempli d’eau et de sable, au cas où. "

Son sapin est garni de boules datant d’après 1990, mais son impressionnante collection compte 64.000 ornements anciens. "Ma collection ne pourrait pas tenir ici." La passion de Christel pour les décorations de Noël remonte à son adolescence. "Nos voisins étaient brocanteurs et antiquaires. Pour qu’ils me réservent des décorations de Noël, j’allais les aider à nettoyer."

Wouters & Hendrix se lance dans l'art de la table avec une collection surréaliste
Publicité

Christel Dauwe

◆ Diplômée en marketing.

◆ Ouvre en 1991 un magasin dans la rue des antiquaires à Anvers, où elle vend ses premières boules de Noël et ses pièces vintage.

◆ Ouvre en 2017 une seconde enseigne à Saint-Nicolas, en Flandre-Orientale.

Publicité

◆ Possède la seconde plus grande collection de décorations Noël de Belgique.

Pologne

"À l’époque, internet n’existait pas et il fallait se déplacer pour trouver des décorations de Noël. Un jour, notre fille au pair nous a envoyés en Pologne; c’était le paradis! Plus tard, lors de salons en Allemagne, nous avons découvert des pièces encore plus raffinées, minutieusement peintes à la main. C’est ainsi que nous avons rencontré de nouveaux fabricants et que notre magasin s’est transformé en spécialiste des décorations de Noël."

Publicité
Publicité
Lors de la rénovation de sa maison, Christel Dauwe a prévu une pièce consacrée à son sapin de Noël.
La collection d’objets de décoration de Noël de Christel Dauwe compte 64.000 pièces, dont certaines rarissimes.
La collection d’objets de décoration de Noël de Christel Dauwe compte 64.000 pièces, dont certaines rarissimes.
© Wouter Maeckelberghe

Harry de Vet travaille dans le secteur des antiquités et de la brocante depuis 1979, mais son épouse et lui n’ont jamais vendu de décorations de Noël anciennes. "Nous écumions les marchés aux puces et les ventes de successions", explique Dauwe. "La marque belge Ajeko qui n’avait pas de valeur, jusqu’à ce qu’un livre lui soit consacré." Ces décorations ont été produites à partir de 1938 à Hemiksem, par un artisan tchèque. "Comme sa femme trouvait les attaches métalliques peu pratiques, il avait conçu un petit anneau en verre pour lequel il a obtenu un brevet. Les boules étaient en partie fabriquées à partir de bouteilles de bière et de vin recyclées, d’où leurs teintes vertes, rouges et brunes. Regardez, voici une de leurs figurines les plus rares. Cela a même causé une discorde avec le pape: selon lui, Jésus ne pouvait pas être suspendu, mais devait être couché."

Allemagne de l’Est

Cependant, le paradis des boules de Noël était en ex-RDA. "Après la chute du mur de Berlin, certaines usines ont été restituées à leurs propriétaires d’origine: Krebs Glas Lauscha, en Thuringe, a pu reprendre ses activités. Monsieur Krebs, qui avait développé des sites de production aux États-Unis et à Hong Kong, est devenu un ami. En 2010, quand l’usine allemande a fait faillite, nous avons pu acquérir l’intégralité de leur "Musterzimmer" (salle d’échantillons) pour une somme dérisoire: 40.000 ornements uniques, soufflés à la bouche, décorés à la main et soigneusement étiquetés, y compris des pièces datant d’avant la Guerre froide."

Publicité
Marché du champagne: pourquoi les bouteilles rares attirent les investisseurs
Dans ce qui fut la RDA, Christel Dauwe a acheté des milliers d’ornements de Noël décorés à la main.
Dans ce qui fut la RDA, Christel Dauwe a acheté des milliers d’ornements de Noël décorés à la main.
© Wouter Maeckelberghe

La petite ville de Lauscha constituait autrefois le cœur de l’art verrier et comptait plus de 500 maîtres verriers. "Ils ne fabriquaient pas seulement des boules de Noël, mais aussi des yeux en verre – aussi bien pour les poupées que pour les humains", ajoute Dauwe.

Avec la chute du Mur de Berlin, de nombreuses décorations anciennes ont fini à la poubelle. Dauwe montre un zeppelin portant l’inscription CCCP, soit l’ex-URSS. D’autres pièces portent la faucille et le marteau. Elle possède également des boules patriotiques des États-Unis, et même des boules de Noël ornées de croix gammées. Une curiosité particulière: les décorations "Feldpost", de faux petits sapins de Noël décorés que les familles envoyaient aux soldats pour égayer les tranchées. Les décorations de Noël reflètent aussi les avancées technologiques de l’époque. Entre 1900 et 1920, les petits trains étaient particulièrement prisés, tandis que les années 1960 célébraient la conquête spatiale avec des cosmonautes et des OVNIS.

© Wouter Maeckelberghe

Art populaire

La valeur des décorations de Noël est fluctuante. "Ce qui vaut 1.200 euros un jour peut tomber à 600 euros le lendemain et 200 euros le surlendemain, si un lot important arrive sur le marché. Actuellement, les pièces les plus chères proviennent de Sebnitz, à la frontière germano-tchèque. Là-bas, les habitants fabriquaient des décorations de Noël en recyclant les chutes de la production de fleurs artificielles."

Publicité

De son côté, Dresdner Pappen utilisait des rebuts de l’industrie du carton. "De petites pièces comme ce chien se vendent entre 700 et 1.000 euros. Quant aux pièces plus grandes, de qualité muséale, elles peuvent atteindre des prix spectaculaires: j’en ai vu partir pour 15.000 euros", ajoute-t-elle.

Willem Jan Neutelings a acheté 250 globes: "Maintenant, je veux m'en débarrasser rapidement"
En Allemagne, le couple a découvert des objets merveilleux et originaux, ce qui lui a donné l’envie de transformer son magasin d’antiquités en magasin de décorations de Noël.
En Allemagne, le couple a découvert des objets merveilleux et originaux, ce qui lui a donné l’envie de transformer son magasin d’antiquités en magasin de décorations de Noël.
© Wouter Maeckelberghe

Dauwe dévoile un ornement représentant Marie et l’enfant Jésus, probablement fabriqué dans un monastère vers 1870. Mais sa pièce la plus rare est ce qu’elle surnomme affectueusement sa petite crèche: un "Weihnachtsberg", une scène représentant la Sainte Famille dans un paysage enneigé. "Il s’agit d’un exemple d’art populaire tchèque datant d’environ 1800, probablement réalisé par un père pour sa famille", explique-t-elle.

Elle a acquis cette pièce il y a plus de dix ans lors d’une vente aux enchères. Et le prix? "4.500 euros", avoue-t-elle. "Regardez la patience, le soin et l’amour qui ont été nécessaires: cela incarne tout ce que représente Noël. Et même si le créateur reste anonyme, il n’a pas été oublié. Il a laissé derrière lui un objet que l’on chérit toujours. Je pourrais passer des heures à le contempler."

Publicité
Service Sponsorisée

Lire Plus