Pour encourager les amateurs de Nespresso à rendre leurs capsules, la marque a établi un partenariat avec le fabriquant suédois de vélos Vélosophy. Nous avons fait un tour d’essai sur une bicyclette violette fabriquée avec l’aluminium recyclé des capsules de café.
Quel est le rapport entre le Ghana, le café suisse et les vélos trendy? À première vue, aucun. Sauf que la célèbre marque de café Nespresso collabore avec le label suédois Vélosophy Cycles, qui fabrique des vélos urbains haut de gamme avec de l’aluminium recyclé. Et c’est précisément là que se fait le lien, car un tout nouveau modèle de vélos du label est fabriqué à partir de capsules Nespresso recyclées.
C’est plus simple qu’on le pense: les capsules sont en aluminium, comme le cadre du vélo. Le grand avantage de ce métal léger est qu’il est recyclable à l’infini, car il peut être fondu encore et encore sans perdre de sa qualité.
Cette propriété de l’aluminium permet d’économiser des matières premières (l’aluminium est un métal issu de la bauxite) et de l’énergie: le recyclage de l’aluminium requiert 95% d’énergie en moins que sa production. Voilà pourquoi, aujourd’hui, des capsules à café circulent sous forme de vélos.
"Il y a 300 capsules dans chaque bicyclette", nous explique Jimmy Östholm, fondateur et CEO de Vélosophy Cycles, lors de notre rencontre dans sa ville, Stockholm. Autrement dit, en buvant un café par jour, on obtient un vélo au bout d’un an. Ou presque.
En effet, le cadre du vélo nécessite un alliage d’aluminium recyclé et d’aluminium primaire. "Il existe de nombreux alliages d’aluminium différents. Celui des capsules à café n’a pas la même composition que celui des cadres. Afin de garantir sa solidité, nous devons y ajouter de l’aluminium primaire", précise le Suédois.
Tout a commencé il y a deux ans. L’entrepreneur envoie un courriel à Nespresso: “J’ai vu que vous fabriquez un stylo à bille en collaboration avec Caran d’Ache, et un couteau suisse avec Victorinox, avec l’aluminium de vos capsules à café recyclées. Seriez-vous intéressés par un vélo?”
"Je ne pensais pas qu’ils allaient réagir", se souvient Östholm. "Au moins, je n’aurai pas eu à me reprocher de ne pas avoir essayé. À ma grande surprise, j’ai eu une réponse, un mois plus tard."
80 millions de vélos
Et le Ghana? Quel est le rapport de ce pays africain avec Nespresso et Vélosophy? Depuis son lancement, en 2016, pour chaque vélo vendu, la marque suédoise fait don d’un vélo à une écolière du Ghana. "Pour nous, c’est un moyen de transport pratique, mais dans les pays en développement, c’est un atout", déclare Östholm.
"Par exemple, un vélo permet d’aller à l’école ou de ne pas y aller. Beaucoup filles abandonnent leurs études parce qu’elles doivent aider dans la maison et que cela ne leur laisse pas le temps de marcher jusqu’à l’école. Grâce au vélo, elles peuvent faire les deux: la vaisselle et des maths. Une étude a montré qu’avec les vélos, la fréquentation scolaire des filles augmente de 30%. Et leurs chances d’obtenir un diplôme sont de 60% plus élevées."
Östholm rayonne. "Quand j’ai fondé Vélosophy, je voulais faire plus que des beaux vélos. J’avais lu que, dans les pays en voie de développement, on estime le besoin de vélos entre 80 et 100 millions. Ce moyen de transport bon marché est un levier socio culturel. C’est ainsi qu’est née mon idée ‘Un pour un’.
À cette fin, je travaille en collaboration avec World Bike Relief, une organisation américaine à but non lucratif, spécialisée dans les vélos destinés aux pays du sud. On a créé un vélo spécial, adapté aux infrastructures de la région. Et 70% sont fabriqués sur place, ce qui crée de l’emploi."
Biocarburant
Nespresso et Vélosophy ont baptisé leur vélo ‘Re:Cycle’ à juste titre: sa couleur est un clin d’œil à l’Arpeggio, le café le plus apprécié de la gamme Nespresso, la sonnette a la forme d’une capsule de café et le panier en bois, à l’avant, peut accueillir deux gobelets. Ce vélo, une édition limitée à mille exemplaires en vente sur le site de Vélosophy, fait également l’objet d’un concours dans les boutiques Nespresso.
"Avec ce vélo, nous voulons montrer à nos clients les choses extraordinaires qu’on peut faire avec des vieilles capsules, dans l’espoir de motiver plus de monde à venir nous les rapporter", précise Astrid Haas, responsable du développement durable chez Nespresso.
À l’heure actuelle, seul un quart des capsules vendues en Belgique est restitué; délaissant 75% de ce précieux aluminium. "Nespresso a le potentiel pour recycler 100% des capsules. En 2012, une usine de recyclage, cofinancée par Nespresso, a ouvert ses portes aux Pays-Bas. En plus de l’aluminium, nous y traitons le marc de café, que nous utilisons pour faire du compost, destiné aux serres horticoles environnantes. Et nous produisons du biocarburant pour les bus avec les gaz dégagés par le processus de compostage."
Ce n’est pas par hasard si Nespresso a choisi l’aluminium pour ses capsules: il offre la meilleure protection contre l’oxydation, l’humidité et la lumière et préserve donc mieux la saveur et l’arôme du café.
Et il peut être recyclé facilement, entièrement et à l’infini. La fine couche de plastique à l’intérieur des capsules fond lors du recyclage, si bien qu’on obtient 100 % d’aluminium. Cet aluminium recyclé est vendu par Nespresso.
À l’échelle mondiale, l’entreprise ne transforme en nouvelles capsules que 13 % de l’aluminium. Nous demandons à la responsable du développement durable quelle en est la raison. "Toutes les capsules étant fabriquées dans nos trois usines en Suisse, il est trop compliqué d’y expédier tout notre aluminium recyclé", explique-t-elle.
Projet pilote
Nespresso, division de la multinationale suisse Nestlé, a été lancée dans les années 1980 et a percé dans les années 1990. La marque a également lancé son programme de recyclage il y a 25 ans. Depuis 2009, les clients belges peuvent retourner leurs capsules et Nespresso met tout en œuvre pour leur faciliter la tâche: il y a dans notre pays un millier de points de collecte, dont les boutiques Nespresso et les points relais Q8 et UPS.
À l’heure actuelle, seul un quart des capsules vendues en Belgique est recyclé. 75% de ce précieux aluminium est perdu.
Il est également possible de déposer son sac de capsules usagées au transporteur qui vient livrer la nouvelle commande, et un projet pilote de parcs à conteneurs est en cours au Brabant Wallon. Pourtant, le rêve de Nespresso est que les capsules se retrouvent dans les sacs PMC.
"Pour faciliter la vie des clients. En effet, nous constatons que ce tri supplémentaire est une barrière." En Allemagne (et dans certaines régions de France), les capsules sont déjà autorisées dans le sac bleu. Résultat: 87 % des capsules sont recyclées. Et Nespresso fait pression pour que les petits articles en aluminium soient autorisés dans les sacs PMC. Mais, pour l’instant, la réponse est non, car la Belgique ne dispose pas encore des bonnes usines.
Tour des Flandres
Trêve de bavardage: le moment d’enfourcher le ‘Re:Cycle’ est venu. Östholm nous invite à explorer Djurgården, l’oasis de verdure de Stockholm. Chemin faisant, il nous explique qu’il s’en est fallu de peu pour que Vélosophy ne voie jamais le jour. Avant de fonder la marque, en 2015, il avait déjà tenté de lancer un label de vélo, une aventure qui s’est soldée par échec.
"Pendant des années, j’ai travaillé comme consultant dans le design et la publicité. Mais le contact avec le produit me manquait et je rêvais de ma propre marque. Et comme toute ma vie tourne autour du vélo ...", raconte le Suédois. "J’ai fait du vélo pour la première fois à cinq ans et j’ai adoré. D’un coup, mon univers s’est agrandi et ça ne m’a plus lâché.
J’ai construit mon premier vélo à quatorze ans, avec l’aide de mon père. C’était un super vélo, mais on me l’a volé. Pour moi, le vélo est un rituel quotidien. La Suède est un pays de cyclistes, mais elle fait pâle figure à côté de la Belgique, où ce sport est une religion. Ma course préférée est le Tour des Flandres. J’ai fait le parcours à deux reprises, mais pas sur un vélo Vélosophy, ce serait impossible!"
Retour à sa première débâcle cycliste. En 2012, Östholm va frapper chez le plus grand fabricant de vélos de Suède, qui l’autorise à tester son projet: fabriquer un vélo urbain. "Le look était inspiré du fixie, tout nouveau à l’époque, mais avec des vitesses. Le fait de ne pas être payé ne me dérangeait pas, tant qu’on me laissait faire mon truc. J’aime essayer des choses, c’est ma motivation."
Nerfs à fleur de peau
Östholm baptise son vélo Porteur et en vend plus de deux cents. Mais, contrairement à ce qui avait été convenu, les vélos avaient été produits en Chine avec des matériaux bon marché. "Ils n’étaient pas solides et j’ai dû les rappeler un à un. La cata!
Après des nuits blanches, les nerfs à fleur de peau, j’ai appelé personnellement chaque client pour présenter mes excuses et le remercier pour son soutien. Personne ne s’est fâché. Ils m’ont même encouragé à persévérer. Ils aimaient le look du vélo et le principe du ‘Un pour un’. Cela m’a donné le courage de faire un deuxième essai. Si je ne les avais pas appelés, Vélosophy n’aurait jamais vu le jour. Et certains de mes anciens clients Porteur roulent en Vélosophy!"
Pour Vélosophy, il a pris le contrôle des opérations. Il a fait appel à un fabricant français et utilise de l’aluminium. Il travaille à petite échelle: il a un assistant et deux collaborateurs. Chaque année, il en vend entre 300 et 400. "Je tiens à faire du monde un lieu plus beau", déclare le Suédois.
Si vous souhaitez découvrir Stockholm à vélo (Nespresso), nous vous recommandons Bonne Mécanique, un bike café doublé d’un magasin et d’un atelier de réparation cofondé par mister Östholm. Servent-ils des Nespresso? Qui sait ...
Le vélo ‘Re:Cycle’, 1.290 euros, est disponible sur www.velosophy.cc. Jusqu’au 15 septembre, vous pouvez tenter votre chance d’en gagner un dans une des onze boutiques Nespresso de Belgique.