"Boire toujours le même champagne, c’est aussi ennuyeux que de porter toujours la même robe." Pour les fêtes, Virginie Taittinger, propriétaire de sa maison de champagne, propose une cuvée spéciale pour accompagner les macarons Ladurée.
Et dire qu’elle n’est pas un du tout un bec sucré! Étrange, non, pour quelqu’un qui produit un champagne spécialement pour Ladurée, le plus célèbre fournisseur de macarons? "C’est grâce à notre collaboration que j’ai appris à apprécier les créations du pâtissier parisien", sourit Virginie Taittinger. "J’adore les macarons à la framboise. Ils sont irrésistibles!"
Pendant un an et demi, Virginie Taittinger, fondatrice de la maison de champagne VIRGINIE T., a travaillé avec son fils sur le projet ‘Champagne spécial Macaron’. "Je voulais faire un champagne qui souligne le goût si particulier des macarons Ladurée. Ce pâtissier incarne le chic à la française, comme l’est le château de Versailles."
"Pour en définir le goût, je me suis imaginé deux amies en train de déguster des macarons avec une coupe de champagne dans un salon de thé sur les Champs-Élysées ou rue Royale. Les macarons sont une pâtisserie particulière, douce et parfumée. Le plus prisé est le macaron à la vanille, nous l’avons donc pris comme référence."
Biscuits de Reims
En tout cas, Virginie Taittinger est fière de son champagne spécial Macaron - un millésimé 2009 extra-dry. "2009 a été extraordinaire", précise-t-elle. "Cette année-là, nous avons pu vendanger fin août, ce qui est exceptionnellement précoce. Les raisins avaient une très belle teneur en sucre, ce qui a donné un vin d’une belle rondeur."
On trouve normal d’accorder mets et vins lors d’un dîner, mais cette pratique n’est malheureusement pas encore courante pour le champagne.
L’assemblage est composé de pinot noir de la Montagne de Reims, de pinot meunier et d’environ 25% de chardonnay. "Le pinot noir est un cépage très fruité, qui met parfaitement en valeur le goût des macarons. Exactement ce qu’il nous fallait!"
Est-ce qu’un champagne extra-dry n’est pas un choix étrange, vu que la plupart des gens opteraient plutôt pour le demi-sec plus doux, de la famille des vins de dessert? "Absolument pas! Avec l’équipe de Ladurée, nous avons, à l’unanimité, choisi un extra-dry. Comme les macarons sont très sucrés, un champagne à plus forte teneur en sucre n’aurait pas été un choix agréable."
L’évolution des goûts a également eu son mot à dire. "Autrefois, le champagne était beaucoup plus sucré parce qu’on le buvait souvent avec des desserts", explique la Française. Ma grand-mère, qui a été présidente de Piper-Heidsieck, servait un champagne demi-sec accompagné de biscuits de Reims et de mignardises. Aujourd’hui, plus personne ne fait ça. Sauf peut-être en Asie ou alors en mode “piscine”, avec des glaçons."
"J’ai tenu compte du fait que nous ne consommons plus autant de sucre qu’avant. Quand je consulte un livre de pâtisserie ancien pour repiquer une recette de dessert, par exemple, j’enlève toujours le tiers du poids du sucre indiqué, sans quoi ce serait beaucoup trop sucré. Cela en dit long sur notre palette gustative actuelle!"
Trait de famille
Le champagne coule littéralement dans les veines de Virginie Taittinger. Son père, Claude, a fait de la maison de champagne Taittinger un label réputé et la famille de sa mère était propriétaire de Piper-Heidsieck jusqu’en 1988. Avant de fonder sa propre marque de champagne, VIRGINIE T., Virginie a travaillé chez Taittinger pendant 21 ans, notamment en tant que responsable des exportations.
En 2007, il se produit un revirement, quand Pierre-Emmanuel Taittinger, son cousin, prend la tête de l’entreprise et confie les fonctions de direction à ses enfants, Vitalie et Clovis. Du jour au lendemain, Virginie Taittinger n’a plus sa place au sein de l’entreprise.
"Quand j’ai dû quitter Taittinger, mon père m’a dit: “lance ta propre affaire, ma fille!” Le timing était parfait: j’avais 47 ans et une très grande expérience dans le monde du champagne. Quand j’ai fondé ma propre maison, je savais aussi que je n’avais pas les moyens de concurrencer les grandes marques. Mon seul avenir, c’était de créer un atelier haute couture pour élaborer des champagnes spéciaux, à l’opposé de ce que proposent les grandes maisons. Je voulais être pointue et créer une marque de niche."
Géant ou artiste
Cette formule lui permet de tenir bon dans un univers dominé par les grands noms. "Mon père me disait toujours: soit tu es un géant, soit tu es un artiste. Le groupe LVMH, toutes marques confondues, représente un tiers du marché mondial. En ce qui me concerne, je vendrai environ 35.000 bouteilles cette année. J’ai pour ainsi dire posé les lèvres sur tous les raisins que j’ai choisis! (rires)"
"Ou bien prenez le leader mondial, Moët & Chandon, qui fait un très bon champagne, qui est bu dans tous les pays et sous toutes les latitudes. C’est un foudre de guerre! Si l’on devait se battre contre lui, on n’aurait aucune chance. Par contre, il y a encore de la place pour les artisans."
"Nous avons produit 5.000 bouteilles de champagne spécial Macaron, ce qui, pour nous, est énorme. Et ce n’est pas vraiment du champagne pour tout le monde. De même, la haute couture ne s’adresse pas à tout un chacun non plus. Mais je n’ai pas le choix."
L’accord parfait
Si Virginie Taittinger devait encore préciser une chose, ce serait qu’il n’existe pas un seul style de champagne. "Il y en a un pour chaque moment de la journée. Un champagne pour le brunch sera différent de celui de l’apéritif. On trouve tout à fait normal d’accorder mets et vins lors d’un dîner, mais cette pratique n’est malheureusement pas encore courante pour le champagne."
"C’est dommage, car il y a énormément de nuances: boire toujours le même champagne, c’est aussi ennuyeux que de porter toujours la même robe. En ce qui me concerne, je le choisis en fonction des circonstances et des mets avec lesquels il sera servi."
En ce moment, Virginie Taittinger travaille sur un champagne spécialement destiné à accompagner le caviar.
Champagne Macaron, disponible dans les boutiques Ladurée à Paris. www.laduree.fr