Georges et Roza ont choisi de ne pas consacrer leur retraite à des voyages, mais à la réalisation d’un rêve: construire leur maison idéale, qu’ils envisagent comme un "fragment d’immortalité".
Georges et Roza ont choisi de ne pas consacrer leur retraite à des voyages, mais à la réalisation d’un rêve: construire leur maison idéale, qu’ils envisagent comme un "fragment d’immortalité".
© Tim Van de Velde

Bienvenue dans une maison patio en béton et en verre

À l’approche de la retraite, un couple de sexagénaires s’est offert un cadeau: une maison d’architecte en béton et en verre, surmontée d’un étage miroir.

Entreprendre un long voyage, suivre enfin un cours de photographie, faire plus de sport, s’investir dans le bénévolat ou passer plus de temps avec ses proches: voilà les projets que beaucoup envisagent à l’approche de la retraite. Mais Georges Schrevens et Roza Dierckx, originaires de Mol, près d’Anvers, avaient un autre projet: construire une maison. "En tant que passionnés d’architecture, nous voulions réaliser une dernière fois la maison de nos rêves. Un bijou qui serait comme un souvenir de nous."

Ce n’est pas parce que ses cheveux grisonnent qu’il faut renoncer à ses ambitions ou suivre docilement la tendance générale. Avec leur nouvelle maison, le couple a choisi une voie résolument audacieuse et hors du commun. Leur "fragment d’immortalité" est radical et avant-gardiste. Avec un brin d’exagération, on pourrait le décrire comme un OVNI ayant atterri au milieu des fermettes banales d’un ancien lotissement près du centre de Mol. Des compromis? Cela ne faisait pas partie du plan de Georges et Roza.

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Le couple a donné carte blanche au bureau d’architectes Dhoore Vanweert Architecten pour concevoir leur maison, un projet qui allie géométrie rigoureuse et esthétique minimaliste.
Le couple a donné carte blanche au bureau d’architectes Dhoore Vanweert Architecten pour concevoir leur maison, un projet qui allie géométrie rigoureuse et esthétique minimaliste.
© Tim Van de Velde

Géométrie minimaliste

Pour cela, le bureau Dhoore Vanweert Architecten s’est révélé être le partenaire idéal, après être apparu sur le radar du couple un peu par hasard. C’est en effet Georges, fervent cyclotouriste, qui est passé devant l’une de leurs réalisations lors d’une sortie et en est resté bouche bée. "J’ai immédiatement sonné à la porte pour demander qui était l’architecte."

Le bureau d’architectes limbourgeois s’était déjà distingué par plusieurs réalisations spectaculaires de maisons privées au design sculptural, comme un pavillon semblant flotter avec des cloisons en béton en forme de lobes ou une villa avec une façade en blocs de verre surmontée d’un silo métallique. Sur le plan esthétique, les architectes ont eu carte blanche, bien que quelques exigences pratiques aient été posées. Le couple souhaitait une maison pratique et facile à entretenir, avec toutes les fonctions sur un seul niveau, très lumineuse et une terrasse ensoleillée pour prendre ses repas à l’extérieur. "Le plus important, c’était que ce soit beau."

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La réponse du bureau d’architecture? Une belle bâtisse reposant sur des formes géométriques. Dans la façade rectangulaire en béton, une grande fenêtre circulaire a été percée. À côté, une grille en métal et verre semi-transparent, au sommet de laquelle trône un cube. "Même le plan au sol est une ode à la géométrie", explique Vanweert. "Tout est basé sur des carrés de 1,20 mètre sur 1,20 mètre. Cette trame se retrouve partout: des carreaux en pierre bleue belge aux joints des murs en béton. Les lignes se prolongent sur l’ensemble du bâtiment."

"En tant que passionnés d’architecture, nous voulions réaliser une dernière fois la maison de nos rêves. Un bijou qui serait comme un souvenir de nous."
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© Tim Van de Velde

Cela peut sembler strict, mais le rythme des lignes crée une sensation de sérénité. Vanweert partage cet avis. "C’est un design sobre et épuré qui rappelle l’esthétique des Case Study Houses: des maisons expérimentales conçues dans l’Amérique d’après-guerre comme exercice d’efficacité et de construction abordable. De grands noms comme Richard Neutra ou Ray et Charles Eames ont participé à ces projets."

Le bureau d’architectes limbourgeois n’a pas de style défini: sa passion pour la construction et la faisabilité est le fil conducteur de son travail. "À chaque étape du processus de conception, nous réfléchissons à la manière dont cela sera construit. Pour nous, la beauté de l’architecture réside dans la construction même. D’où notre slogan: "The poetry of structure".

"Cela se reflète également dans notre choix de matériaux. Nous recherchons toujours des matériaux de construction qui soient esthétiques, comme le béton. En recouvrant le cube d’un matériau réfléchissant, il devient une sorte de phare, un point de repère dans le quartier."

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Passion architecture

Dans une vie, la question du déménagement se pose à plusieurs reprises. Quand des enfants arrivent ou quand ils partent, le cocon devient trop petit ou trop grand, on passe d’un appartement à une maison ou inversement. Ce scénario trop prévisible ne séduisait pas Georges et Roza. On pourrait les appeler des "yeps" (young elderly persons, NDLR), autrement dit, la version senior des yuppies. Ce groupe socio-économique, âgé de 60 à 80 ans environ, se sent loin d’être prêt à prendre une retraite classique.

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La cheminée centrale en bois plaqué vert est au centre de la maison. Elle sépare le salon de l’entrée tout en faisant office de bibliothèque et de meuble télé.
La cheminée centrale en bois plaqué vert est au centre de la maison. Elle sépare le salon de l’entrée tout en faisant office de bibliothèque et de meuble télé.
© Tim Van de Velde

"Presque tous nos amis vendent leur maison familiale et emménagent dans un appartement. Cela ne nous attirait pas du tout", lance Geogres. "Un appartement est généralement un espace assez standard, sans grand intérêt architectural, ce qui est précisément le contraire de ce que nous recherchions. Depuis mes humanités, je suis passionné par l’architecture et les bâtiments."

Roza a hérité de cette passion de ses parents. "Ils étaient très simples et modestes, mais quand ils ont fait construire une maison à la fin des années 1960, ils ont choisi un style moderne avec beaucoup de verre. Cela leur a valu de nombreuses critiques, car personne dans le village ne construisait ainsi. Grâce à eux, j’ai découvert à quel point il est merveilleux de vivre dans une maison lumineuse et moderne. Quand Georges et moi avons construit notre première maison, en 1985, nous avons travaillé avec Adri Van Eemeren, un architecte lié à l’école de Turnhout."

Pour Georges, ses talents de jardinier sont une raison supplémentaire de ne pas vivre dans un appartement. "Je ne peux pas imaginer une vie sans jardin", avoue-t-il. Leur jardin a été conçu par le paysagiste Puur, basé à Alken, en collaboration avec le bureau d’architecture. La décision de cacher partiellement ce jardin derrière une paroi vitrée a été dictée par l’orientation: le côté ensoleillé au sud donne sur la rue. Grâce au patio vitré, les habitants disposent d’une terrasse ensoleillée où ils peuvent s’installer en toute intimité, sans empêcher la lumière d’affluer dans leur espace de vie.

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Conçu par le paysagiste Puur, le jardin offre à la fois intimité et expérience visuelle raffinée.
Conçu par le paysagiste Puur, le jardin offre à la fois intimité et expérience visuelle raffinée.
© Tim Van de Velde

Les parois en verre agissent comme une sorte de voile de lingerie fine pour la maison: elles suggèrent ce qui se trouve derrière, sans le dévoiler. "Un architecte doit être prudent avec une façade entièrement fermée. Si elle est trop anonyme et trop fermée, et qu’il n’y a aucun contact avec l’intérieur depuis la rue, l’esprit de village se perd. C’est pourquoi nous avons intégré un grand portail, permettant d’ouvrir partiellement ces parois vitrées de temps en temps. Et la fenêtre ronde dans la cuisine est un clin d’œil à la rue au sens littéral."

Deux chambres d’enfant

Construire une maison à soixante ans, ce n’est pas du tout la même chose qu’à trente ans. Dhoore Vanweert Architecten a donc pensé cette maison non seulement pour le couple de retraités, mais aussi en tenant compte des besoins des futurs occupants. L’architecte Jan Vanweert explique: "Georges et Roza vivent au rez-de-chaussée, mais en prévision de l’avenir, nous avons ajouté un étage avec deux chambres d’enfant et une petite salle de bain. Le rez-de-chaussée n’a pas de murs porteurs intérieurs et peut donc être entièrement réaménagé."

Pour réaliser ces grandes portées, les architectes ont recouru à un exosquelette en béton avec un seul pilier de soutien, dissimulé dans la cheminée. "Même s’il faut changer les fonctions des espaces, cela ne posera pas de problèmes, car les grandes caves permettent de déplacer facilement les conduits et autres éléments techniques", précise l’architecte.

Mais pour l’instant, ce n’est pas à l’ordre du jour. Georges et Roza comptent bien rester aussi longtemps que possible dans cette maison originale. "Tant que nous en aurons la capacité physique et mentale, nous resterons ici. Ce projet a été long et parfois difficile, mais depuis que nous nous y sommes installés, c’est fabuleux. Nous adorons y vivre. Chaque jour est un plaisir. Cette maison est tout simplement parfaite. Même si je le pouvais, je n’y changerais rien."

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