Découvrez l'appartement de ce collectionneur de design à Montmartre

Adrien De Furia est collectionneur et membre du jury de Collectible, la foire de design contemporain à Bruxelles. Il nous ouvre la porte de son resplendissant appartement à Montmartre.

Comment définit-on un collectionneur? Si c’est "quelqu’un qui possède plus de pièces qu’il n’a d’espace pour les entreposer", Adrien De Furia en est un. Le jeune Parisien est analyste des marchés financiers. Il n’a commencé sa collection de design contemporain qu’en 2019, après avoir acheté un appartement dans le 18e arrondissement. Cinq ans plus tard, sa collection est déjà à l’étroit: c’est dire la passion qui l’anime.

"Nous avons besoin d’espace de stockage", explique-t-il. "Notre nouvel appartement, dans les Hauts-de-Seine, sera trois fois plus vaste. Le déménagement est prévu en avril et les travaux de rénovation sont en cours. Nous avons hâte de découvrir notre collection dans un nouvel environnement, avec davantage d’espace pour respirer. Nous avons fait réaliser quelques pièces spécialement à cet effet. Laurids Gallée concevra la table pour la salle à manger; Johan Viladrich, un meuble pour la salle de bain; Studio Supaform, un canapé pour le salon."

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Nulle trace de vintage ni du moindre objet chiné dans son appartement parisien à mi-chemin entre Montmartre et les Puces de Saint-Ouen. En effet, Furia se consacre au design contemporain novateur. Rien ne laisse présager que la double porte de l’immeuble dissimule une éblouissante collection, foisonnante de talents émergents.

En déambulant dans une foire comme Collectible à Bruxelles, on se prend souvent à se demander qui peut bien acheter ce design contemporain d’avant-garde. Plus rares encore sont les collectionneurs qui aménagent leur domicile avec ces pièces. C’est précisément la raison pour laquelle cet appartement est aussi étonnant: il est unique en son genre.

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Une table de Ferm LIving, des chaises de Supaform, un banc transparent de Laurids Gallée et une boule disco fondue "Quelle Fête" de Rotganzen.
Une table de Ferm LIving, des chaises de Supaform, un banc transparent de Laurids Gallée et une boule disco fondue "Quelle Fête" de Rotganzen.

"Il nous arrive de recevoir des demandes pour organiser des visites VIP en marge de foires d’art ou de design, mais nous déclinons presque toujours. Après tout, c’est chez nous", explique-t-il. "Quand nous aurons déménagé, nous ne vendrons pas l’appartement: nous le mettrons en location sur Airbnb. Nous comptons y laisser quelques pièces de design afin que les locataires puissent profiter de notre collection."

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On pourrait croire que le meuble en métal créé par Johan Viladrich sera une des pièces qui resteront. Ce point de mire de la salle à manger laisse passer la lumière dans le salon adjacent. "Cette pièce unique en aluminium et bronze a été spécialement conçue par Johan pour cet appartement. Cependant, nous l’aimons tellement que nous allons la démonter pour la réinstaller dans notre nouvel appartement", détaille le Parisien. "D’ailleurs, Johan travaille actuellement sur de nouvelles créations pour notre futur domicile. Si le courant passe, nous donnons carte blanche au designer."

Memphis and beyond

De Furia dispose de peu de temps pour nous faire faire le tour du propriétaire. Un rapide coup d’œil dans son appartement ne révèle pas de fil conducteur évident. "Inconsciemment, nous nous inspirons du langage formel du mouvement italien Memphis", explique-t-il. "La toute première pièce de design que nous avons achetée était le ‘Carlton Room Divider’ d’Ettore Sottsass pour Memphis. C’est une des rares pièces historiques de la collection, par ailleurs résolument contemporaine. Comme vous pouvez le constater, nous adorons la couleur et les formes graphiques. Nous nous intéressons aussi aux designers qui explorent des matériaux innovants, comme l’Autrichien Laurids Gallée, dont nous possédons plusieurs pièces en résine synthétique transparente."

"Nous achetons principalement des créations de designers de notre génération, mais ce n’est pas un parti pris: nos décisions sont avant tout intuitives", poursuit-il. "Nous n’avons pas non plus défini de budget annuel, mais nous ne pouvons pas non plus dépenser sans compter. La collection s’étoffe au gré de nos coups de cœur: nous avons besoin de sentir une connexion avec un designer ou une pièce. La fonctionnalité demeure un critère de sélection important: en règle générale, nous optons pour des pièces de design qui sont utilisables au quotidien, même si nous faisons des exceptions à cette règle. Récemment, nous avons investi dans des pièces conceptuelles ou décoratives, ce qui rend notre collection plus éclectique."

Un bureau "Metropolis" et un tabouret de Laurids Gallée, une lampe "Rotonda" d’Adrìan Cruz Éléments et un vase "Duplex" de Rémi Brac.
Un bureau "Metropolis" et un tabouret de Laurids Gallée, une lampe "Rotonda" d’Adrìan Cruz Éléments et un vase "Duplex" de Rémi Brac.

Chiner sur Instagram

Le collectionneur explique qu’il chine sur Instagram. "Cette appli me permet de découvrir des créateurs et d’entrer en contact direct avec eux pour acquérir des pièces. À moins, bien sûr, qu’ils travaillent avec une galerie établie, auquel cas nous passons évidemment par la voie officielle. Nous avons quelques galeries fétiches que nous suivons de près, comme Objects With Narratives à Bruxelles et St Vincents à Anvers. Bien qu’Instagram soit une vitrine parfaite pour les nouveaux talents, je reste convaincu de l’importance du rôle des galeries, à condition qu’elles se renouvellent et fassent l’effort de présenter le design de collection de manière innovante, y compris dans les salons."

Outre PAD Paris et Design Miami / Basel, Collectible à Bruxelles figure parmi les salons que De Furia aime visiter. Lors de la dernière édition, il a acheté une lampe de Laurids Gallée, sa première en résine synthétique. "Nous y avons également fait la connaissance de designers avec lesquels nous travaillons maintenant pour des commandes spécifiques." Toujours à l’occasion de ce salon bruxellois, le collectionneur a rencontré Liv Vaisberg, cofondatrice de Collectible, qui lui a proposé de s’impliquer davantage dans l’événement, au-delà de sa participation en tant que visiteur et acheteur. "Lorsqu’elle m’a proposé de faire partie du jury de la section Curated, je n’ai pas hésité à lui donner mon accord. De nombreux objets sur le thème ‘A Public Display of Affection’ étaient d’une radicalité expérimentale intéressante. Dans cette section, est présentée une pièce de Solène Bonnet qui est destinée à notre futur appartement: ‘Nesso’, une table-miroir organique pour notre chambre à coucher."

Le Parisien ne se limite pas à des pièces uniques ni au design de collection. Dans son appartement se trouve également du design industriel standardisé de Ferm Living et Bolia, ou de maisons d’édition françaises telles que Petite Friture ou Moustache. Sa première acquisition de design contemporain, qui relève également de la catégorie "industrielle", est un miroir en forme de donut d’Oskar Zieta, dont les bords convexes déforment l’espace de vie. De Furia considère ce miroir comme une référence ludique aux miroirs classiques que l’on trouve au-dessus des cheminées dans les appartements parisiens.

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Sur la cheminée: miroir "Rondo" d’Oskar Zieta, lampe "Rainbow" de Haha Design Studio pour Arcade Collection. Fauteuil "Normative" de Supaform. sur l’étagère de Johan Viladrich, de la céramique de Rémi Brac et Marta Dervin et des prototypes de Laurids Gallée.
Sur la cheminée: miroir "Rondo" d’Oskar Zieta, lampe "Rainbow" de Haha Design Studio pour Arcade Collection. Fauteuil "Normative" de Supaform. sur l’étagère de Johan Viladrich, de la céramique de Rémi Brac et Marta Dervin et des prototypes de Laurids Gallée.

Collectionner, c’est s’évader

On pourrait s’imaginer que "créer de la valeur ajoutée via une collection de design contemporain" est un objectif en soi pour ce jeune professionnel du secteur financier. "Honnêtement, je trouve peu de parallèles entre mon travail et ma passion pour la collection", déclare-t-il. "On pourrait penser que ma profession est essentiellement analytique et mathématique, mais elle comporte aussi une grande part de créativité. À l’instar de l’univers du design, notre domaine est en constante évolution, beaucoup plus qu’on ne l’imagine. Nous devons nous réinventer sans cesse. Collectionner, c’est aussi ma manière de m’échapper de mon travail, qui est assez exigeant. C’est s’évader dans un autre monde." Et sous peu, dans un autre appartement.

Collectible ne se limite pas au salon: il a ouvert un espace permanent au cœur du quartier des galeries à Ixelles. L’exposition d’ouverture, "Tablescapes", a été conçue par la rédactrice en chef du magazine Milk Décoration. Elle a choisi des couverts d’avant-garde et des sculptures conceptuelles suivant le thème de la nourriture et de l’hospitalité. Cet espace permanent de Collectible accueillera aussi des dîners et des événements.

| "Collectible, the fair for 21st century design", du 7 au 10 mars à l’Espace Vanderborght, rue de l’Écuyer 50 à Bruxelles.
| Rue saint-georges 9 à Ixelles, sur rendez-vous dès le 11 mars.
| www.collectible.design

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