Gabrielle "Coco" Chanel, ici dans les années 30.
Gabrielle "Coco" Chanel, ici dans les années 30.
© Ministère de la Culture – Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine, Dist. RMN-Grand Palais / André Kertész

7 tendances actuelles dont Coco Chanel raffolait déjà en son temps

Gabrielle (Coco) Chanel, cette grande précurseuse, n’avait encore jamais fait l’objet d’une rétrospective. C’est désormais chose faite.

"C'est peut-être parce que son histoire et sa mode sont omniprésents à Paris qu'il ne semblait pas nécessaire de la redécouvrir. Je suis donc heureuse que nous soyons les premiers", déclare Miren Arzalluz, la curatrice du Palais Galliera à Paris, aujourd'hui le tout premier musée à présenter une rétrospective Coco Chanel

Après deux ans de rénovations, le musée de la mode de Paris rouvre maintenant ses portes, sur près du double de la surface. "Gabrielle Chanel. Manifeste de Mode" s'étend sur près de 1.500 mètres carrés, dont les nouvelles galeries en sous-sol, qui portent le nom de "Salles Gabrielle Chanel" en l’honneur de la créatrice de la petite robe noire.

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Coco Chanel dans son appartement du Ritz à Paris.
Coco Chanel dans son appartement du Ritz à Paris.

À son décès à l'âge de 87 ans, en 1971, Coco Chanel quittait une vie pour le moins mouvementée, dans laquelle elle avait réussi à sortir de la pauvreté de façon inventive avant de connaître succès, personnalités fascinantes, liaisons et intrigues politiques. Les films et biographies axés sur ces ragots et histoires sont aujourd’hui légion, raison pour laquelle Arzalluz a pris la décision "radicale" de ne pas en parler. "Raconter sa biographie détournerait l'attention de l’objet de l’exposition."

En l’occurrence, 350 vêtements, de la haute joaillerie et des produits de beauté prouvant qu’il y a un siècle, la visionnaire Gabrielle Chanel avait des années-lumière d'avance sur ses contemporains.

Voilà donc 7 tendances modernes dont Coco Chanel raffolait déjà il y a un siècle.

1. SPORTSWEAR CHIC

Vous souvenez-vous de la récente révolution de l’athleisure, ces vêtements sportifs que l’on porte alors qu'on ne fait pas de sport? Coco le faisait déjà. Elle utilisait les robustes tissus en tweed des costumes de chasse pour ses tailleurs iconiques, tandis que les tissus en laine des joueurs de tennis et des golfeurs se retrouvaient dans ses cardigans amples.

Gauche tailleur en tweed, 1927-1929. Droite: robe de gala en jersey, été 1919.
Gauche tailleur en tweed, 1927-1929. Droite: robe de gala en jersey, été 1919.
© Paris, Patrimoine de CHANEL © Julien T. Hamon / NH
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Et le jersey? "Je l'ai inventé", aurait-elle déclaré. Ce n'est pas le cas, mais elle en a réinventé l'usage: les jerseys sont agréablement élastiques pendant le sport, et donc idéaux en guise de robe T-shirt sous une robe de gala transparente délicatement brodée. 

2. GENDER BENDING

Dès ses premières silhouettes de 1916, Coco Chanel a cherché la liberté de mouvement et le confort. Comme elle ne trouvait pas ces qualités dans la garde-robe féminine, elle les a empruntées aux hommes: d'abord au sens propre (chez ses amis), puis au sens figuré, avec son style. On le remarque à des détails comme les poches de ses vestes et pantalons, non seulement "pratiques" pour avoir les mains libres, mais aussi pour y fourrer ses mains dans une intrépide posture masculine. 

Gauche: Modèle Anne Sainte Marie dans un costume Chanel dans Vogue UK, octobre 1955. Droite: pantalon, chemise et veste Diana Vreeland, 1937-38 .
Gauche: Modèle Anne Sainte Marie dans un costume Chanel dans Vogue UK, octobre 1955. Droite: pantalon, chemise et veste Diana Vreeland, 1937-38 .
© Paris Musées © Henry Clarke, Musée Galliera / Adagp, Paris 2020 - NH

Cette liberté et ce confort se retrouvent également dans ses silhouettes achevées, comme celle de son amie Diana Vreeland, la rédactrice en chef du Harper's Bazaar: une combinaison pantalon de 1937 inspirée d'un costume, à une époque où une femme en pantalon risquait encore une amende.

3. LINGERIE COUTURE

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"Marinière", été 1916.
"Marinière", été 1916.
© Paris, Patrimoine de CHANEL © Julien T. Hamon

Le décolleté profond de cette blouse attirerait peut-être l'attention aujourd'hui, mais à l’époque de Chanel (qui, bien sûr, portait toujours quelque chose en dessous), c'était surtout le tissu qui choquait.

Porter un pyjama en soie pendant la journée reste un fashion statement audacieux et rend cette "Marinière" de 1916 encore plus osée: à l’époque, la soie ivoire de cette blouse moderne et souple à col marin était réservée aux... sous-vêtements masculins.

4. COMFORT COOL

Jupe pliée dans un tissu confortable.
Jupe pliée dans un tissu confortable.

Difficile à imaginer aujourd'hui, mais "à l'époque de Chanel, pouvoir bouger librement était tout sauf une exigence pour la haute couture", explique la curatrice Arzalluz. Mais pas pour Gabrielle: "Pas d'élégance sans confort, pas de chic sans liberté de mouvement", résume la curatrice. Ce qui se reflète dans son choix de tissus, comme dans les modèles présentés sur cette photo.

Le confort avec un grand C, jusque dans les moindres détails: ses jupes souvent plissées étaient beaucoup plus courtes que celles de ses prédécesseurs, mais au moins, elles permettaient à une femme du monde de monter dans un bus.

5. CRÉATRICE STAR

 Le premier flacon de Chanel N°5, 1921.
Le premier flacon de Chanel N°5, 1921.
© Paris, Patrimoine de CHANEL © Julien T. Hamon

Si quelqu'un savait commercialiser sa marque et son image comme le fait aujourd'hui tout créateur ambitieux, c’est bien Gabrielle Chanel. Son marketing était ingénieux: des amies actrices faisaient office d'influenceuses dans de petits films de mode tournés près de la Tour Eiffel. Elle aimait aussi s'entourer de mystères généreusement agrémentés de fausses anecdotes.

Il suffit de regarder la manière dont elle a lancé son tout premier parfum. Non seulement Chanel N°5 (de 1921) allait devenir le parfum le plus vendu au monde, mais en plus, son packaging est aujourd’hui légendaire grâce à son aspect minimaliste épuré, à son monogramme de C entrelacés qui est apparu ici pour la première fois et à son nom. Chanel était alors si connue qu'elle fut la première créatrice pour laquelle seul le nom de famille devait figurer sur le flacon de parfum.

6. BIJOUX STATEMENT

Ses vêtements étaient aussi simples que ses bijoux étaient accrocheurs. Avant même de savoir qu'il existerait plus tard un terme pour cela, Gabrielle Chanel concevait déjà des bijoux "statement" avec l'aide de l'orfèvre Robert Goossens. Afin de contrebalancer la sobriété de ses silhouettes, elle les combinait souvent avec des bijoux opulents, et de préférence en grand nombre: non pas un seul collier de perles, mais facilement dix, ainsi que des chaînes en or et des pendentifs. 

Bracelet et collier création Chanel, realisés par Goossens entre 1965 et 1971.
Bracelet et collier création Chanel, realisés par Goossens entre 1965 et 1971.
© Links: Paris, Patrimoine de CHANEL © Julien T. Hamon / Rechts: NH

Celle opulence est magnifiquement mise en valeur dans le nouvel espace du sous-sol qui, tel la caverne d'Ali Baba, est parsemé de centaines de bijoux scintillants. On y trouve également une silhouette, qui a une connexion avec la Belgique. La robe, la veste et le grand collier présentés sur la photo ci-dessus ont appartenu en 1961 à la reine Paola. 

7. MAXI-MINIMALISME

Chanel était donc à la fois tellement minimaliste et maximaliste que le résultat contradictoire en devenait presque obscène. Une robe du soir à première vue ultra simple, avec des franges coupées à la main dans de la soie noire, qui, vue de plus près, s’avère garnie de milliers de perles. Un tissu de laine qui nous entraîne sur une fausse piste avec le fantastique trompe-l'œil d'un imprimé de tweed. 

Robes de gala, 1920-1923.
Robes de gala, 1920-1923.
© 1- Paris, Patrimoine de CHANEL © Julien T. Hamon / 2- NH

Ou encore une robe en soie à manches asymétriques composée de pas moins de vingt pièces de tissu mais tombant parfaitement. Des pièces d’apparence simple, mais incroyablement complexes, qu'elle concevait sans le moindre croquis, car elle travaillait toujours directement sur un modèle. Chanel était tellement minimaliste qu'il est presque impossible qu’elle n’ait pas inspiré des noms modernes tels que Maison Margiela, Helmut Lang et Jil Sander.

Conclusion?

Les femmes ne pourront jamais s'émanciper grâce à la mode à elle seule, le monde est trop complexe pour cela. Cependant, Arzalluz est fermement convaincue de la contribution de Chanel: "Je ne pense pas qu'elle se soit considérée comme une féministe en son temps, mais je ne peux m'empêcher de qualifier de féministe sa contribution à notre façon actuelle de bouger et de construire un style et une identité avec des vêtements dans lesquels nous sommes à l'aise."

"En effectuant des recherches, j'ai trouvé une photo de Gabrielle alors âgée de septante ans, au travail à son bureau, en tailleur et bottes d'équitation. Cette attitude, c'est Chanel, et c'est ce que nous faisons aujourd'hui encore lorsque nous combinons des baskets ou des bottes avec des robes et des jeans."

Infos - Gabrielle Chanel. Manifeste la mode. Jusqu'au 14 mars 2020 au Palais Galliera à Paris, www.palaisgalliera.paris.fr

Important - En raison du nombre élevé d'infections au coronavirus, il est actuellement déconseillé de se rendre à Paris. N'oubliez pas de visiter le site diplomatie.belgium.be si vous prévoyez un voyage prochainement.