Cette année, la touche summer est apportée par le raphia, une fibre tropicale qui a mis du soleil sur les catwalks de Dior, Dolce & Gabbana et de Natan. En effet, Edouard Vermeulen a créé quelques pièces en raphia.
Est-ce parce que les années 70 sont trendy ou parce que l’écologie est aujourd’hui omniprésente? Peu importe: le raphia est incontournable cette saison. L’été dernier, les chapeaux de paille XXL et les sacs en raphia de Jacquemus étaient plus hot que le climat. Et cette saison, Dior, Jil Sander, Stella McCartney et Fendi, pour ne citer que quelques noms, présentent également des eye-catchers dans cette matière naturelle.
Chez les créateurs ayant un lien avec l’Afrique, comme Grace Wales Bonner, Stella Jean et Imane Ayissi (nouveau venu au calendrier français de la mode), le travail manuel revêt une valeur symbolique plus profonde: le raphia est intimement mêlé à la tradition africaine.
La créatrice britannique Grace Wales Bonner a réalisé pour Dior quelques silhouettes pour la collection croisière: "Je voulais faire quelque chose qui ne soit pas seulement un modèle de luxe européen, mais comporte aussi une perspective culturelle différente", a-t-elle déclaré à Vogue.
Dior n’en est pas resté à un ‘one shot’: dans la prochaine collection PE, le raphia sera également à l’honneur dans des robes, des chapeaux et des sacs légèrement moins imposants. Une fibre séculaire reprend sa place dans la mode.
Plus près de chez nous, Edouard Vermeulen a également créé une série de vêtements en raphia, pour la maison de couture Natan. Sa collection était déjà quasi terminée, mais cela n’a pas empêché Édouard Vermeulen de revoir ses plans. "Quand une idée est surprenante, peu importe si c’est en dernière minute!", déclare le couturier, fournisseur de la Cour et baron.
Made in Madagascar
De petit extra décoratif, l’idée du raphia est rapidement devenue un ensemble complet de vêtements et accessoires. C’est une première pour Natan. "Nous avions déjà réalisé une robe du soir en tissu recyclé du Burkina Faso, dont les bénéfices ont été reversés à des organisations caritatives en Afrique, mais, en général, ce genre de tissus est relativement difficile à travailler", explique le couturier.
"Par contre, le raphia, est sophistiqué sans être ‘too much’; idéal pour une collection de basiques! Avec cette matière, la fibre est mieux mise en valeur, ce qui augmente les chances de succès pour tous, car, oui, cette collection va générer également des revenus à l’autre bout du monde." Natan a ainsi développé les patrons à Bruxelles et les a ensuite envoyés à une équipe de production d’Akra Collection, à Madagascar, où des artisans locaux ont crocheté le fil de raphia. Une fois les différents pans achevés, ils ont été renvoyés à Bruxelles pour être assemblés par les petites mains de l’équipe couture de Natan.
Ce n’est pas un hasard si Akra Collection se trouve à Madagascar: le savoir-faire en matière de travail du raphia est né sur l’île il y a plus de mille ans. En effet, Madagascar est le pays du raphia, un genre de palmier dont la fibre peut être transformée en cordages, en vannerie et en textiles.
Depuis, le raphia est également omniprésent dans nos contrées: chapeaux et paniers, mode expérimentale des années trente, projets de bricolage loufoques et sets de table dans les années 90 jusqu’à ce véritable come-back dans l’univers de la mode. Oui, aujourd’hui, il y a un engouement réel pour les produits naturels, dont le raphia.
No greenwashing
Les pièces de la collection Natan sont disponibles à partir d’un peu moins de mille euros. "Les clientes seront peut-être arrêtées par ce prix, car le raphia est une matière première peu coûteuse, mais nos vêtements en raphia sont aussi complexes que le reste de notre collection", explique Édouard Vermeulen.
Vermeulen proteste: "Ah non! Pour moi, il s’agissait en premier lieu d’une superbe matière et d’un travail artisanal minutieux, représentatifs de l’esprit couture tel que nous le pratiquons. Le message positif n’est venu que dans un deuxième temps. C’est vrai, le greenwashing existe et, bien sûr, il y a des marques qui le pratiquent."
"Aujourd’hui, nous devons tous prendre soin de notre planète -rien qu’à penser à cette soupe de plastique dans les océans, c’est terrifiant!- mais, franchement, j’ai eu le coup de foudre pour ce raphia."
Il marque une pause, sourit, puis déclare, un brin provocateur: "Je n’ai pas fait cette collection afin de pouvoir proclamer que je suis un eco-warrior! Je suis trop âgé pour ce genre de choses."