À bord du train de nuit Bruxelles-Berlin lors du trajet inaugural

Le train de nuit Bruxelles-Berlin a effectué son premier voyage dans la nuit du 25 au 26 mai. Parmi des passionnés de trains bavards et des slow travellers occasionnels, Sabato était du voyage.

Prêts pour le départ

Dès 21 heures, une dizaine de passionnés de train enthousiastes se tiennent prêts sur le quai 7 de la gare de Berlin Gesundbrunnen. Appareil photo en main, ils ont une seule mission: être les premiers à apercevoir ce qui marquera pour eux le début d’une ère nouvelle. En effet, avec l’arrivée de ce train de nuit circulant entre Bruxelles-Midi et Berlin Hauptbahnhof, la Belgique dispose désormais d’un deuxième train de nuit. Malheureusement, un horaire modifié est déjà en vigueur en raison de travaux. C’est pourquoi ce soir, je pars exceptionnellement de la gare de Berlin Gesundbrunnen, aussi facilement accessible que la gare centrale.

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Dix minutes plus tard, alors que j’entends au loin le train de nuit approcher, parfaitement à l’heure, les appareils photo se mettent à crépiter bruyamment et j’entends derrière moi un ‘tjonge jonge, wat fantastisch’ en limbourgeois. Dès que le train est à l’arrêt, les jeunes stewards ouvrent manuellement les portes des wagons. L’extérieur est un peu décevant, car seul le logo de la compagnie belgo-néerlandaise European Sleeper reste épargné par les saletés. Les stewards saluent les passagers qui se dirigent vers le wagon où ils passeront une nuit mouvementée.

Women only

C’est la cohue dans le couloir étroit où chacun cherche le bon compartiment. Je suis dans un compartiment partagé ‘women only’, avec six couchettes. Mes compagnes de compartiment ont dû nous entendre approcher, la photographe et moi, car à peine tournons-nous la tête qu’elles demandent déjà: ‘Seid ihr aus Belgien?’. Christine (29 ans) et Julia (22 ans), respectivement copywriter et étudiante en psychologie, se rendent chez une amie à Lille. “Je ne suis pas du matin, c’est pourquoi nous avons choisi de prendre le train plutôt que l’avion”, avoue Christine. Un pur hasard, car elles viennent seulement de réaliser qu’elles vivront le tout premier voyage officiel de ce train de nuit.

Dans mon compartiment partagé ‘women only’, je trouve six couchettes.
Dans mon compartiment partagé ‘women only’, je trouve six couchettes.
©Siska Vandecasteele

Alors que je fais plus ample connaissance avec elles, quatre autres voyageuses entrent dans le compartiment comme si c’était journée portes ouvertes. Ces quatre Allemandes sont membres du collectif européen ‘Back-on-Track’, qui milite en faveur du retour des trains de nuit. “Nous sommes fières d’avoir pu contribuer à ce retour malgré de nombreux obstacles politiques”, déclare l’une d’elles. Avec un gobelet en plastique rempli de vin rosé bon marché, elles trinquent à un avenir rempli de réussites similaires en matière de circulation transfrontalière des trains de nuit en Europe. “L’enjeu écologique est grand”, ajoutent-elles.

Sur chaque lit se trouvent un oreiller, une housse de couette sans couette et une couverture tout neufs.
Sur chaque lit se trouvent un oreiller, une housse de couette sans couette et une couverture tout neufs.
©Siska Vandecasteele

Expérience magique

Bien qu’Elmer van Buuren, le directeur et cofondateur d’European Sleeper, apprécie le fait qu’il s’agisse d’un moyen de transport durable, sa principale motivation est plus personnelle. Je le rencontre dans le train: “Enfant déjà, j’étais fasciné par les trains de nuit. Et c’est tout simplement une excellente façon de voyager. Il y a quelque chose de magique à rouler ensemble dans la nuit, dans une sorte de cocon, et à rencontrer des gens avec lesquels on ne parlerait sinon jamais. Je ne suis peut-être pas fan des compartiments partagés, mais j’adore la connexion entre les voyageurs.”

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Elmer van Buuren, le directeur et cofondateur d’European Sleeper.
Elmer van Buuren, le directeur et cofondateur d’European Sleeper.
©Siska Vandecasteele

Lorsque je lui demande quelle est sa meilleure expérience en train de nuit, il ne parvient pas à choisir. “Lorsque j’étudiais encore le russe, je me suis rendu à Saint-Pétersbourg en train de nuit avec d’autres étudiants. Vivre mon premier contact avec la Russie dans un train de nuit rempli de contrôleurs ivres par -20°C, c’était vraiment spécial!”, s’exclame van Buuren en riant. Grâce aux paysages magnifiques, aux wagons-lits assez luxueux et aux personnes sympathiques, son voyage en train de nuit vers la Turquie reste également gravé dans sa mémoire. “Lorsque j’attendais sur le quai, des cheminots étaient assis sur des tabourets autour d’un poêle à charbon et préparaient du thé. Ils m’ont demandé si je voulais me joindre à eux. On n’oublie jamais ça.”

Cinq lignes de train de nuit en Europe qui vont bon train

Luxe en rose layette

Quelques instants plus tard, le steward Nathan se présente à son tour. “Je voyagerai à bord de ce train chaque mois, ce qui me permettra de combiner ce travail avec mon emploi en psychiatrie”, explique ce jeune homme d’une vingtaine d’années. Bien qu’il s’agisse de ses premiers jours en tant que flexi-jobber à bord d’un train, sa passion pour les voyages et son expérience dans l’horeca donnent l’impression qu’il fait cela depuis des années. Le soir, il fournit des couvertures supplémentaires aux passagers frileux et le matin, il parcourt le wagon instable avec des gobelets débordant de café et de thé.

Le steward Nathan travaillera chaque mois en tant que flexi-jobber à bord du train.
Le steward Nathan travaillera chaque mois en tant que flexi-jobber à bord du train.
©Siska Vandecasteele

Vers minuit, lorsque chacun quitte notre compartiment pour rejoindre le sien, nous transformons les authentiques et quelque peu poussiéreux sièges bleus en tissu de 1967 en trois paires de lits confortables. Avec un oreiller, une housse de couette sans couette et une couverture tout neufs, nous préparons les couchettes pour une nuit agitée. Doit-on également faire son lit soi-même dans les compartiments de luxe? Non. Dans les compartiments rose layette, je découvre trois lits faits (avec une couette), une armoire en bois renfermant un cabinet de toilette et un miroir, ainsi qu’un fauteuil bleu.

Dans les compartiments de luxe, je trouve une armoire en bois renfermant un cabinet de toilette et un miroir.
Dans les compartiments de luxe, je trouve une armoire en bois renfermant un cabinet de toilette et un miroir.
©Siska Vandecasteele

Contrairement aux privilégiés des compartiments de luxe, je me brosse les dents dans une cabine grisâtre et propre, située un peu plus loin dans le couloir. L’espace est si exigu qu’avec le bout de mes chaussures contre le lavabo, je parviens tout juste à refermer la porte. Je n’ai pas besoin de plus qu’un lavabo, un miroir et un distributeur de savon ‘Château Beau Savon’ – on se croirait en France, mais j’ai trouvé le produit sur le site web d’Action. La toilette la plus proche se trouve dans le wagon suivant. Quand on mesure 1m67, on peut tout juste s’asseoir sur la lunette de la toilette sans devoir adopter des positions inconfortables. Une aventure sanitaire que les plus grands préféreront reporter le plus longtemps possible.

Quand on mesure 1m67, on peut tout juste s’asseoir sur la lunette de la toilette sans devoir adopter des positions inconfortables.
Quand on mesure 1m67, on peut tout juste s’asseoir sur la lunette de la toilette sans devoir adopter des positions inconfortables.
©Siska Vandecasteele

The morning after

Après une nuit dans un bon lit que j’ai dû quitter à plusieurs reprises à cause d’une porte de compartiment qui s’ouvrait, je profite vers 6 heures du défilement d’interminables prairies hollandaises réchauffées par les premiers rayons de soleil de la journée. Une fois rafraîchie, j’attrape avec curiosité le sac petit déjeuner que le steward Nathan est venu me remettre la veille au soir en me recommandant de ne pas m’attendre à grand-chose. En effet, les repas gastronomiques ne sont pas au programme. Sous une brise délicieusement rafraîchissante (les fenêtres peuvent d’ailleurs s’ouvrir dangereusement), je mords dans mon sandwich pas vraiment frais sorti d’un sachet en plastique, avec un peu de confiture.

Si, comme moi, vous aimez voyager lentement, vous apprécierez sans aucun doute le train de nuit. Il n’est pas question de s’habiller élégamment pour se régaler de mets délicieux, de se retirer complètement et de se détendre agréablement sous la douche, mais ce luxe ne peut rivaliser avec les rencontres inoubliables, l’ambiance de camping et le doux assoupissement collectif au rythme de la nuit – petit conseil: n’oubliez pas vos bouchons d’oreille! La première nuit dans un nouveau lit est toujours difficile, mais je donnerai certainement une seconde chance au train de nuit.

Informations de voyage

Classes et prix
| Wagons-lits – Luxe / Les prix varient entre 149 et 169 euros.
| Couchettes – Confort / Les prix varient entre 79 et 149 euros. Nous avons payé 149 euros pour un billet.
| Sièges – Budget / Les prix varient entre 49 et 79 euros.

Arrêts | Bruxelles-Midi / Antwerpen-Centraal / Roosendaal / Rotterdam Centraal / Den Haag HS / Amsterdam Centraal / Amersfoort Centraal / Deventer / Bad Bentheim / Berlin Hauptbahnhof

Fréquence
| Départ de Bruxelles-Midi / Le lundi, le mercredi et le vendredi
| Départ de Berlin Hauptbahnhof / Le mardi, le jeudi et le dimanche

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A partir de mars 2024, European Sleeper prévoit d’étendre la liaison jusqu’à Prague et, à partir du printemps 2025, ils desserviront même Barcelone.

Site web | europeansleeper.eu

Consultez le site web pour trouver les horaires mis à jour.

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