Le couvent centenaire des Augustines de l'hôpital militaire d'Anvers ressuscite sous la forme d'un hôtel exclusif avec restaurant, spa et boutique. Nous avons rencontré celle qui est à l'initiative de ce projet qui ouvre ses portes demain, Mouche Van Hool.
"Mais qu'est-ce qui se passe avec ces robinets? Le problème sera-t-il résolu avant l'ouverture?" Depuis que nous sommes à bord de l'Eurostar, le smartphone de Mouche Van Hool n'arrête pas de sonner.
Si elle semble garder son calme, le stress des travaux atteint son paroxysme. "Si j'entends encore le mot "chantier", je vais exploser. J'aimerais tellement faire un bond dans le temps de six semaines!", soupire-t-elle. Voilà cinq ans déjà qu'elle se consacre au projet August. Plus l'échéance approche, plus la tension monte. S'il y a une personne qui mérite un spa relaxant, c'est bien elle!
Une fois entrée, j'ai été conquise. Pourtant, le couvent était vide depuis vingt ans, il pleuvait à l'intérieur et les murs étaient couverts de moisissure.
Ça tombe bien: nous sommes en route pour Bamford, un spa exclusif, naturel et bio, au coeur de Londres. Si là, on ne parvient pas à évacuer ses soucis en un massage, personne ne le pourra.
"J'ai découvert Bamford il y a quelques années, lors d'un voyage en Irlande à bord du Belmond Grand Hibernian", se souvient Van Hool. "Et à l'hôtel The Connaught de Londres, ils ont aussi des produits Bamford." Convaincue par la marque exclusive Cotswolds, elle obtient l'exclusivité pour la Belgique: elle sera la première et la seule à pouvoir utiliser ces produits dans un spa et à les mettre à disposition dans toutes les chambres.
Compte à rebours
Aujourd'hui, le repos n'est pas de mise. Le chantier a beau se trouver à plus de 400 kilomètres de là, même à Londres, tout tourne autour de ce que sera son nouvel hôtel. Dans la boutique Bamford, elle choisit les produits pour les salles de bains, les bougies parfumées pour le restaurant et le spa, ainsi que les articles destinés à la boutique. Car August, son nouveau projet dans l'ancien couvent des Augustines de l'hôpital militaire d'Anvers, sera plus qu'un simple hôtel.
Outre les 44 chambres et suites, il proposera un restaurant de 55 couverts, un bar où l'on pourra se restaurer, une boutique d'articles food et non-food, un coin café, un food corner-takeaway, un spa, un pavillon de jardin à louer, trois salles de réunion ainsi que trois jardins clos, dont un avec étang de baignade. Un projet énorme.
Lieu culte
Mouche Van Hool a révolutionné à elle seule le paysage hôtelier anversois. En effet, son premier établissement, l'hôtel Julien, a été l'un des premiers boutique-hôtels à devenir d'emblée un lieu culte. L'endroit discret et accueillant attire hommes d'affaires, touristes et célébrités.
"J'ai ouvert avec onze chambres", se souvient-elle. "Un chiffre que j'ai pu doubler en 2010, après avoir acheté le bâtiment adjacent. Mais il n'était pas possible de poursuivre l'expansion. Et comme la demande ne cessait de croître, je me suis mise à rêver d'un deuxième site. À un moment donné, j'ai pensé à Bruxelles ou Gand, mais je préfère rester chez moi, à Anvers.
Quand on m'a filé le tuyau pour ce couvent, je n'avais pas encore visité le moindre bâtiment. Je suis allée le voir, par simple curiosité. Beaucoup trop grand, me suis-je dit. Mais, une fois entrée, j'étais conquise. Pourtant, il était vide depuis vingt ans, il pleuvait à l'intérieur et les murs étaient couverts de moisissure. Par contre, j'ai tout de suite vu son potentiel."
"Disons que je suis une hôtelière atypique. Mon ambition est de restaurer de vieux bâtiments pour en faire des lieux publics. Oui, même ceux qui ne dorment pas à l'hôtel sont les bienvenus. C'est déjà le cas au Julien, où l'on peut venir prendre son petit déjeuner, boire un apéritif ou profiter du spa.
Le seul obstacle à franchir, c'est la porte d'entrée." Cet obstacle, l'entrepreneuse l'élimine chez August, où la porte reste grande ouverte. Et le spa Bamford aura sa propre entrée séparée. Cependant, les clients de l'hôtel disposent de leur lounge dans une bibliothèque avec feu ouvert et vue sur le jardin. Et, dans le bar, la tribune ne sera accessible qu'aux résidents.
Bâtiments historiques
Il y a cinq ans, Mouche Van Hool achète, sur l'avenue Marialei à Anvers, le bâtiment situé à côté de la porte d'accès du développement immobilier Vanhaerents-Matexi, du nom des promoteurs qui ont transformé l'ancien hôpital militaire désaffecté dans les années 1990 en quartier résidentiel sans voitures. Accessible uniquement aux religieuses et aux malades pendant 150 ans, le site de 8 hectares est aujourd'hui un quartier à part entière, avec de nombreuses constructions neuves.
Cependant, tous les bâtiments historiques ont été conservés: les pavillons où étaient soignés les soldats accueillent désormais des lofts, la chapelle est occupée par le restaurant The Jane, l'ancienne chaufferie est un espace de co-working, et l'ancien bureau de l'état-major abrite des bureaux.
La rénovation du couvent est la phase finale de la réaffectation. D'accord, 't Groen Kwartier est un atout pour tous les habitants d'Anvers, mais August n'est-il pas un peu loin du centre pour les touristes?
En effet, la cathédrale est à une bonne demi-heure de marche. "J'y crois dur comme fer", répond l'entrepreneuse. "C'est un tout nouveau quartier qui monte vraiment. De plus, tout le monde ne désire pas loger dans le centre: il est difficilement accessible en voiture et nombreux sont ceux qui préfèrent passer leurs journées à l'hôtel plutôt qu'en ville.
Ici, on peut se relaxer dans les jardins, aller au spa, manger dans notre restaurant ou au Jane. Notre situation est également idéale pour un public d'affaires. Je suis convaincue que lorsqu'on crée quelque chose d'unique, les gens viennent."
Casque de sécurité
Chaleureuse, accueillante et attentive, Van Hool semble née pour l'univers de l'hospitalité. Chez elle, on se sent tout de suite à l'aise. Pourtant, elle est autodidacte. Après avoir étudié les relations publiques, elle travaille dans la publicité, puis pour un architecte d'intérieur. "J'avais toujours rêvé d'ouvrir un hôtel à l'étranger", confie l'Anversoise. "Mais, voilà, j'ai rencontré mon mari, un jeune avocat pour lequel quitter la Belgique était inenvisageable.
Il m'a demandé pourquoi je n'ouvrirais pas plutôt quelque chose ici." Très vite, elle trouve le bâtiment idéal: charmant et bien situé.
Aussi, dans le monde des affaires, Van Hool est un nom qui fait tilt: son grand-père, Bernard Van Hool, est le fondateur du constructeur d'autobus de Lierre. Elle n'a jamais travaillé dans l'entreprise familiale, préférant suivre sa propre voie et cela n'a pas été facile, surtout quand il a fallu passer par la case crédit bancaire.
Une semaine après notre visite au spa londonien, elle nous fait visiter le chantier. Nous passons sous des rubans noir et jaune en ignorant les panneaux 'Accès interdit'. Si les bottes en caoutchouc et le casque de sécurité ne sont plus nécessaires, le terme 'chantier' est toujours de mise: au moins une cinquantaine de corps de métier s'activent, les meubles sont encore sous plastique et un carton protecteur recouvre le carrelage en ciment d'origine parfaitement restauré.
"Il y a encore une poutre à fixer dans la chambre 11. Les interrupteurs des pièces du haut ne fonctionnent pas. Et quand les grilles de jardin seront-elles livrées?"
Van Hool dit aimablement bonjour à chacun, mais elle a le dossier bien en main. Malgré sa petite taille, son visage doux et ses mots chaleureux, il ne faut pas sous-estimer sa poigne: ces dernières années, lors de la transformation du couvent en hôtel, elle s'est muée en chef de chantier. Pour assurer cette nouvelle casquette, elle est assistée par son mari, Laurent De Scheemaecker, qui dirige son cabinet d'avocats et consacre son temps libre à August.
La rénovation a été un travail de titan auquel ont participé environ trois cents personnes. Presque tous les acteurs clés sont anversois: Vincent Van Duysen pour l'architecture, les frères Wirtz pour les jardins, Christian Wijnants pour les tenues du personnel et le chef Nick Bril du restaurant deux étoiles The Jane pour la cuisine et les boissons. Sans oublier l'équipe de la boulangerie Domestic qui fournit le pain du petit déjeuner et du restaurant ainsi que de tous les produits du takeaway -soupes, salades et viennoiseries.
En souvenir
Mouche Van Hool nous entraîne au pas de charge à travers l'hôtel. "Regardez, c'était le cloître du couvent qui permettait aux soeurs hospitalières d'aller aux pavillons sans se mouiller les pieds. Et derrière, se trouve le restaurant, dans l'ancien jardin d'hiver. Ici, dans l'ancienne chapelle, il y aura le bar. Nous avons retiré les vitraux d'origine, c'était beaucoup trop chargé. À la place, nous avons mis des vitraux transparents, quelque chose que j'ai découvert dans une église danoise."
Hop, hop, hop, elle monte quatre à quatre les escaliers menant aux chambres, toutes différentes. Un concept qui semble logique vu que l'hôtel est réparti sur cinq bâtiments: outre le couvent et le bâtiment à l'avant, il y a deux maisons de maître sur la Marialei ainsi que l'état-major.
"Le plan de l'étage a été remanié, mais certaines pièces sont encore d'origine, comme cette grande chambre destinée à la mère supérieure", précise l'hôtelière en souriant. "En fait, avec leurs 16 mètres carrés, les cellules des Augustines étaient trop petites pour une chambre d'hôtel, mais nous en avons gardé deux, en souvenir. Elles sont fantastiques: compactes, confortables et complètes."
L'endroit compte des chambres mansardées dans lesquelles on se glisse sous la charpente d'origine, de spacieuses suites avec baignoire sur pieds et chambre séparée, ainsi que des chambres offrant une superbe vue sur le jardin, la chapelle ou la Marialei. Cependant, il règne partout la même atmosphère calme et contemporaine, en harmonie avec l'authentique couvent de 1912, ce qui contraste avec l'architecture éclectique, mêlant Renaissance néo-flamande et néo-baroque.
La clé des songes
Cette ambiance se retrouve dans l'approche des chambres. Ici, pas de badges en plastique, mais de vraies clés. "Pour les chambres, je me suis attachée à ce que je trouve important dans un hôtel: le confort et la qualité, sans trop de fioritures. Pas de domotique compliquée, mais des portes acoustiques afin qu'on n'entende pas le bruit venant du couloir. Une bonne liseuse au-dessus du lit et une toilette séparée de la salle de bain. Des choses simples, mais extrêmement importantes."
Son téléphone sonne. "Ils ont besoin de moi en bas: je dois choisir la hauteur des porte-rouleaux." Tandis qu'elle discute avec l'architecte et les hommes de métier, nous repassons sous les rubans jaune et noir. Nous reviendrons dans quelques semaines.
À partir de 153 euros la nuit. L'hôtel August ouvre ses portes le 12 avril, mais il est déjà possible de réserver une chambre, une table ou un soin sur www.august-antwerp.com