La leçon de cinéma de Nuri Bilge Ceylan
Un film turc de 3 heures? Où il ne se passe pas grand-chose? Courez voir "Le poirier sauvage": on en ressort rempli et heureux, comme après un long voyage initiatique…
Nuri Bilge Ceylan n’est pas n’importe qui. Il s’agit ni plus ni moins de l’un des plus importants cinéastes contemporains. La preuve? Le prix qu’il reçut en 2014 pour un autre film contemplatif de 3 heures (et quart celui-là), "Winter Sleep". Oui, rien moins que la Palme d’Or. Il remet le couvert avec ce "Poirier sauvage", revenu de Cannes bredouille l’année dernière, mais tout aussi envoûtant.
- Note : 4/5
- Drame
- De Nuri Bilge Ceylan
- Avec Dogu Demirkol, Murat Cemcir, Hazar Ergüçlü…
Sinian retourne dans la petite ville de province qui l’a vu naître. Avec presque un diplôme de prof de lettres en poche – il doit encore passer l’examen final. Et l’envie de devenir écrivain. Mais pour franchir ce cap, en Turquie, la tradition est d’auto-éditer un premier opus. Et pour cela il faut trouver les deniers nécessaires. En attendant, Sinian retourne avec son paternel au village, dans la vieille maison familiale croulante où le père espère trouver de l’eau et tout faire reverdir… Sinian retombe aussi sur Hatice, une amie d’enfance qui veut tout savoir de son séjour à la ville, et lui apprend qu’elle a accepté un mariage avec un bijoutier, et l’enfermement qui va avec. Sinian continue à s’interroger, lui, et à interroger le monde qui l’entoure. Qu’est-ce qui pourrait donner un sens à sa vie?
Pour nous immerger dans les lieux qu’il a choisis comme décor, Nuri Bilge Ceylan préconise de longs plans-séquences où les personnages discutent comme dans la vraie vie. Mais la beauté des choses est ici perpétuellement soulignée par les couleurs, la lumière, et le cadre qui les sublime. Les sous-entendus, psychologiques aussi bien que poétiques, éclatent alors sous les yeux du spectateur qui les recueille. Le film imite la vie, mais une vie où tout ce qui nous échappe serait miraculeusement à porté de conscience, et comme magiquement révélé à nos sens reconnaissants. Et si c’était ça, le cinéma?
Mais le metteur en scène ne s’arrête pas en si bon chemin. Ces séquences parfaites, remplies d’émotions brutes aussi bien que de phrases, de regards, de gestes, ne sont que les éléments d’une question plus vaste: qu’est-ce qui fait de nous ceux que nous sommes – ou que nous pourrions devenir?
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