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Zeebruges espère résister au Brexit aux dépens de Calais

©Photo News

Champion européen des échanges avec le Royaume-Uni, le port de Zeebruges est particulièrement exposé au risque d’un “hard Brexit”. Son espoir: tirer profit de l’engorgement de Calais pour faire de la menace une opportunité.

Soyons clairs. Dire que le port de Zeebruges pourrait faire du Brexit une opportunité est pour le moins audacieux. La perspective de barrières douanières entre le continent et le Royaume-Uni relève plutôt du cauchemar pour le premier port “britannique” du continent. Avec 17 millions de tonnes échangées chaque année, c’est 45% du trafic du port ouest-flandrien qui est pieds et poings liés aux négociations du Brexit.

"Tout ce qui détériore la fluidité, l’efficacité du trafic entre le continent et l’Angleterre a une influence négative sur nos activités."

Joachim Coens
Patron du port de Zeebruges

Ce n’est pas pour rien que le négociateur en chef de l’Union, Michel Barnier, s’y est rendu en personne le 6 juillet... Avec toute l’empathie qu’on lui connaît, le Savoyard y a écouté les inquiétudes de Joachim Coens, le patron du port. Qui répète cette évidence: "Tout ce qui détériore la fluidité, l’efficacité du trafic entre le continent et l’Angleterre a une influence négative sur nos activités."

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Pas besoin cependant d’attendre l’acte de divorce et l’installation des barrières pour voir les chiffres fléchir. Ces dernières années, les échanges de Zeebruges avec le Royaume-Uni affichaient des chiffres de croissance presque insolents - 4, 5, 6%... Mais depuis un an, depuis ce sinistre mois de juin 2016, c’est fini.

On a enregistré une petite diminution, de 0,6%", explique Joachim Coens. "Ce n’est pas encore grave, pas autant que ce qu’il se passe avec les passagers à Calais, où les Britanniques sont beaucoup moins nombreux à venir chez nous.

L’alternative aux files

À courte vue, si la livre sterling se stabilise, l’activité du port devrait se maintenir. Mais après mars 2019, dans quelles eaux les cargos vogueront-ils? Faudra-t-il remplir des montagnes de formalités pour envoyer un conteneur à Tilbury? Et laisser des liasses de billets aux douaniers pour livrer un client à Grimsby?

2,6%
Dans ce scénario, le produit intérieur brut de la Flandre, de très loin la région de Belgique la plus exposée, chuterait de 2,6% d'ici 2030.

Si au terme des négociations le Royaume-Uni devient pour l’Union européenne un “pays tiers” comme les autres, soumis aux standards OMC, il faudra compter sur 10% d'augmentation des droits d'importation sur les automobiles, idem sur les boissons (mais jusqu'à 25% sur le jus d'orange), 8% sur les tapis... Sans compter les barrières non tarifaires.

Dans ce scénario, le produit intérieur brut de la Flandre, de très loin la région de Belgique la plus exposée, chuterait de 2,6% d'ici 2030. Face à ces menaces, le port fait ses calculs et prépare l’avenir. Sa planche de salut, ce pourrait être de vampiriser Calais... Car Zeebruges est un port de stockage: les produits de l’Europe entière viennent en train et en camion, y sont entreposés, et réexpédiés à la demande au Royaume-Uni.

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"Quand une frontière sera rétablie, il sera plus facile de gérer ce passage s’il n’y a pas de chauffeur: payer un chauffeur à attendre le temps de gérer les formalités, ça coûte cher...”

Joachim Coens

À Calais-Douvres, par contre, les chauffeurs de camions accompagnent la cargaison. Quand une frontière sera rétablie, il sera plus facile de gérer ce passage s’il n’y a pas de chauffeur: payer un chauffeur à attendre le temps de gérer les formalités, ça coûte cher...”, souligne Joachim Coens. Face à la perspective de longues files de camions à Calais, Zeebruges prévoit de nouveaux agrandissements de ses zones de stockage pour devenir l’alternative parfaite.

Pour tirer pleinement avantage de son atout, Zeebruges entend encore mettre en place des procédures entièrement électroniques et établir une douane britannique avancée sur le continent, comme c’est déjà le cas à Calais pour le transport des personnes, souligne de son côté le président de l’APZI, l’association des entreprises du port, Marc Adriansens.

“Si nous parvenons à mettre ces deux éléments en place, nous pourrons peut-être faire du Brexit une opportunité pour nous préparer mieux que les ports environnants. Nous pourrons nous profiler comme un port “adapté au Brexit”, qui rendrait les barrières le moins visibles possible.”

Marc Adriansens
Président de l’APZI, l’association des entreprises du port

Lors de sa visite à Zeebruges, Michel Barnier a tweeté cette phrase, sous une photo du parc de Toyota entreposées à Zeebruges : Brexit will affect some regions and sectors more. Savoir, c’est déjà agir.

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