Le survol de Bruxelles limité: ça change quoi?
La Justice demande au Fédéral de prendre des mesures pour cesser les violations de l’arrêté Gosuin sur les routes du Canal et du Ring. Elle lui demande de réaliser une étude d’incidences sur l’activité de l’aéroport.
Nouvelle victoire pour le gouvernement bruxellois, plusieurs communes (Crainhem, Woluwe-Saint-Pierre, Wezembeek-Oppem, etc.) et deux associations (Ubcna, Piste 01 ça suffit) dans leur combat contre la réduction des nuisances sonores liées au survol de la capitale par les avions de Brussels Airport. Dans un jugement d’une centaine de pages, le tribunal de première instance francophone de Bruxelles (section civile) leur a donné raison sur plusieurs des points soulevés dans le cadre des trois actions en cessation environnementale introduite en juin 2016.
Le jugement condamne l’Etat à "faire cesser les violations manifestes" de l’arrêté Gosuin de 1999 liées à l’usage de la route du Canal et de la route du Ring entre 23 h et 7 h. La juge Anne Dessy lui demande de faire cesser aussi les violations liées à l’utilisation de la route aérienne pour les atterrissages sur la piste diagonale 01. Le Fédéral doit adresser un courrier à l’exécutif bruxellois indiquant "les mesures opérationnelles qu’il entend prendre dans les plus brefs délais pour atténuer les répercussions des nuisances sonores sans affecter, voire sans affecter sensiblement la capacité opérationnelle de l’aéroport". L’Etat a 4 mois pour s’exécuter dès la signification du jugement. C’est le temps qui lui est donné pour informer la Région bruxelloise des mesures à prendre et les délais de leur mise en œuvre. À défaut, il paiera une astreinte de 100.000 euros par semaine de retard avec un maximum de 5 millions.
Porte de sortie
Le jugement offre une porte de sortie au Fédéral: il peut ne pas prendre les mesures opérationnelles, à condition d’avoir "une motivation formelle et matérielle à cet égard". L’Etat belge doit aussi réaliser, à ses frais et dans un délai de 12 mois à dater la signification du jugement, une étude d’incidences de l’exploitation de l’aéroport sur l’environnement.
Le tribunal ne suit pas les plaignants dans leurs demandes d’une révision des normes de vent et de mise en place d’une autorité indépendante de contrôle du bruit des avions en coopération avec l’exécutif bruxellois. Le "virage gauche" échappe à la sanction du tribunal, de même que les normes de vent qu’il refuse de changer pour ne pas empiéter sur les compétences fédérales. Il confirme toutefois que la mise en place de mesures d’accompagnement (insonorisation d’habitations survolées, etc.) incombe au Fédéral. Le jugement confirme, si besoin en est encore, que l’arrêté Gosuin n’est pas illégal. D’après le jugement, 6.339 infractions ont été constatées dans le ciel bruxellois en 2015, soit 2,7% des mouvements (décollages, atterrissages) à Brussels Airport. Contacté par nos soins, le cabinet du ministre Bellot (MR) veut analyser le jugement avant de réagir.
Une nouvelle ère
La ministre bruxelloise de l’Environnement Céline Fremault (cdH) entend signifier très vite le jugement. Il faut dire que c’est sa détermination et la mobilisation des riverains qui sont couronnées de succès. "C’est une victoire collective, celle de la Région, des 19 communes et des associations de riverains qui se sont mobilisés avec nous. Cela démontre que lorsqu’on travaille ensemble de façon constructive et au-delà des clivages politiques, on parvient à des résultats tangibles dans l’intérêt de tous les Bruxellois. Il ne faut pas lire la décision à l’aune d’une confrontation entre activité économique et environnement, j’ai toujours considéré qu’il faut pouvoir concilier les deux. Ce jugement permet surtout de faire bouger les lignes et de faire entrer l’activité aéroportuaire autour de Bruxelles dans une nouvelle ère", conclut Céline Fremault.
Pour Benoît Cerexhe (cdH), bourgmestre de Woluwe-St-Pierre, le jugement est une avancée. Il veut poursuivre le combat pour la fin des vols de nuit, "le retour aux normes de vent historiques, la mise sous tutelle de Belgocontrol, l’allongement de la piste 25L de 1.800 m à l’est et la spécialisation de l’aéroport de Zaventem en city-aiport moderne". Pour le député bruxellois Ridouane Chahid (PS), "ce jugement, que l’on peut qualifier d’important, protège l’ensemble des Bruxellois des nuisances sonores et renforce l’autonomie des autorités bruxelloises dans les défenses des normes environnementales". Les associations Ubcna et Piste 01 ça suffit veilleront à ce que le jugement soit respecté. Mais d’après elles, "les propos du ministre Bellot pour qui rien n’a changé démontrent bien qu’en plus de Belgocontrol, l’Etat belge n’a pas l’intention de respecter les décisions de justice".
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