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Les partis francophones prêts à revoir la fiscalité des placements

©Vincent Dubois

Les huit principaux partis francophones ont tous de nouveaux projets pour les taxes et exonérations des différents types d’investissements. En sens très divers, évidemment…

Dans exactement cinquante jours, les Belges seront appelés à voter. Les partis fourbissent leurs arguments de campagne. La fiscalité des placements n’est pas en reste. Les huit principales formations politiques francophones souhaitent toutes modifier les taxes, exonérations et réductions d’impôts relatives aux investissements.

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Mais dans des sens très divers, ce qui n’étonnera personne. Une chose semble certaine: à moins d’une coalition au sein de laquelle les projets fiscaux des uns et des autres seront abandonnés pour avancer sur d’autres dossiers plus pressants (emploi, santé, justice, etc.), la prochaine législature ne semble pas promettre un statu quo de la fiscalité des placements…

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1. Compte d’épargne

5 partis veulent globaliser les revenus mobiliers avec les autres revenus: fin du caractère libératoire du précompte et risque de taxe au taux marginal, souvent supérieur à 30%…

 (exonération de précompte mobilier jusqu’à 980 euros d’intérêts et taux de 15% au-delà)

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  • Le PS et le PTB veulent maintenir l’exonération.
  • Les listes Destexhe veulent la porter à 1.500 euros.
  • Le cdH veut instaurer un système dual où tous les revenus du travail sont taxés d’une part et tous les revenus du capital (y compris les livrets) sont taxés d’autre part, avec une exonération qui doit maintenir le niveau de l’avantage fiscal actuel.
  • DéFI veut une globalisation des revenus pour les taxer ensemble mais avec une quotité de revenus du capital (y compris les livrets) exonérée à hauteur de maximum 13.670 euros. Par conséquent, "l’exonération des intérêts jusqu’à 980 euros restera acquise", promet le parti.
  • Ecolo veut globaliser les revenus du capital (dont l’épargne) et du travail pour moins taxer ces derniers, mesure qui aura "un effet positif pour les petits épargnants", estime le parti.
  • Le MR veut instaurer une corbeille d’épargne entièrement exonérée de toute taxe, quel que soit le type d’investissement (livrets, actions, etc.). "Autrement dit, explique le parti, les réductions et exonérations existantes comme celle sur les carnets d’épargne ou les exonérations sur les dividendes d’actions seraient remplacées par une quotité exonérée unique et indépendante du type d’investissement."
  • Le PP veut supprimer toutes les niches fiscales, dont celle du livret, et globaliser tous les revenus.

2. Épargne-pension

 (réduction d’impôt de 30% pour les versements jusqu’à 980 euros et de 25% jusqu’à 1.260 euros)

Le cdH, DéFI, le MR, le PS et le PTB sont plutôt favorables au statu quo de cet avantage fiscal.

  • Le cdH trouve que l’investissement ainsi encouragé fiscalement devrait revenir intégralement au particulier alors qu’actuellement, un pourcentage (parfois jusqu’à 3% prélevés sur la prime) va aux institutions financières.
  • DéFI reverrait la taxe de 8% à 60 ans pour globaliser les revenus de l’épargne-pension avec les autres revenus.
  • Le MR ne serait pas contre une simplification du système de double plafond.
  • Le PS et le PTB préféreraient revaloriser la pension légale.
  • Ecolo veut évaluer et éventuellement réviser la mesure, en particulier en corrigeant l’introduction du nouveau plafond.
  • Le PP veut supprimer toutes les niches fiscales.
  • Les listes Destexhe plaident pour une exonération des primes de 2.000 euros par an maximum.

3. Précompte mobilier

(prélèvement à la source libératoire de 30% sur la plupart des revenus mobiliers)

  • Le MR est pour le statu quo.
  • Le cdH veut un système d’imposition dual – revenus du travail et revenus du capital – sans changement de la charge fiscale pour ces derniers.
  • Les listes Destexhe veulent réduire le précompte à 20%.
  • Les cinq autres partis veulent globaliser les revenus et rendre le précompte non libératoire: les revenus mobiliers devraient donc être déclarés et taxés au taux marginal de l’impôt du contribuable qui, en moyenne, est supérieur à 30%, selon le Bureau du plan.

4. Taxe boursière

(ou TOB: taxe sur les opérations de Bourse, applicable aux transactions sur obligations au taux de 0,12%, sur actions au taux de 0,35%, et sur certains fonds au taux de 1,32%)

  • Pour le PS, à moins d’instaurer une taxe sur les plus-values, "la TOB reste un impôt nécessaire qui pourrait être revu à la hausse".
  • Chez Ecolo, on se dit prêt à "relever les plafonds de la taxe en priorité et éventuellement revoir les taux" si un compromis politique le requiert.
  • Le cdH, le MR, le PP et le PTB ne prévoient pas de modification de la TOB.
  • DéFI veut la remplacer par une taxe sur les transactions financières de 0,1% sur les actions et obligations et de 0,01% sur les dérivés, sans plafond.
  • Les listes Destexhe estiment que la TOB doit être supprimée.

5. Tax shelter pour start-up

(réduction d’impôt égale à 30% d’un investissement de maximum 100.000 euros par an dans une start-up, taux porté à 40% pour les très petites entreprises et ramené à 25% pour les entreprises en croissance)

  • Le cdH souhaite étendre la mesure aux entreprises qui font l’objet d’une reprise.
  • DéFI veut augmenter le plafond annuel à 150.000 euros.
  • Les listes Destexhe sont favorables à un maintien.
  • Ecolo veut "renforcer cet avantage".
  • Le MR veut assouplir les conditions et renforcer les mesures pour les PME.
  • Le PP veut un système "plus généreux".
  • Pour le PS, cette mesure est une "bonne idée" mais "le plafond et les taux pourraient être revus".
  • Le PTB veut évaluer la pertinence de la mesure avant de se prononcer.

6. Comptes-titres

(taxe de 0,15% sur la valeur des comptes-titres d’au moins 500.000 euros)

  • Le cdH et DéFI s’opposent à la taxation du capital et privilégient la taxation des revenus du capital si on veut faire contribuer les grands patrimoines.
  • Les listes Destexhe et le PP proposent de supprimer cette taxe.
  • Pour le MR, elle pourrait faire l’objet d’une évaluation pour vérifier sa pertinence.
  • Ecolo veut la remplacer par une contribution de crise sur la fortune qui frapperait les patrimoines supérieurs à 1 million d’euros à un taux de 0,8% et à 1,5% au-delà de 5 millions d’euros, avec une exonération dans la base de calcul de l’habitation principale, des dettes ainsi que des biens productifs utilisés dans le cadre d’une activité professionnelle.
  • Le PS veut élargir la mesure et taxer les grands patrimoines.
  • Le PTB veut élargir la taxe à tous les éléments de patrimoine, pas uniquement les actifs des comptes-titres.

7. Assurances-vie

(taxe de 2% sur la prime versée dans les produits des branches 21 et 23)

  • Le cdH, Ecolo, le MR et le PS sont pour un statu quo de ce prélèvement.
  • DéFI et le PP proposent de supprimer cette taxe.
  • Les listes Destexhe proposent de la réduire à 1%.
  • Le PTB accepterait de la réduire pour parvenir à un compromis politique, en échange d’un impôt sur les grandes fortunes, par exemple.

8. Fonds obligataires

(précompte de 30% sur la plus-value de la part d’obligations si celle-ci atteint au moins 10% des actifs)

  • DéFI veut globaliser cette plus-value avec les autres revenus de capitaux, dont une tranche de 13.670 euros sera exonérée.
  • Ecolo veut une "contribution dégressive sur les plus-values réalisées" en fonction de la durée de l’investissement.
  • Le PP veut supprimer cette taxe.
  • Les cinq autres partis ne comptent pas la modifier.

9. Dividendes

(exonération de précompte mobilier à hauteur de maximum 800 euros de dividendes)

  • Le PTB souhaite "évaluer l’impact de cette exonération pour la revoir éventuellement à la baisse".
  • Le PS n’envisage pas de la modifier.
  • Le cdH souhaite un système d’imposition dual (revenus du travail et revenus du capital) avec une exonération non liée à un actif déterminé, qui aboutirait à une charge fiscale inchangée.
  • DéFI globaliserait les dividendes avec les autres revenus du capital, exonérés jusqu’à 13.670 euros.
  • Les listes Destexhe proposent une exonération totale des dividendes des sociétés européennes.
  • Ecolo veut renforcer l’avantage pour l’investissement dans l’économie coopérative.
  • Pour le MR, les dividendes entreraient dans la corbeille d’épargne exonérée de taxe (voir point 1).
  • Le PP veut supprimer cette niche fiscale.

10. Innovation

Une chose semble certaine: la prochaine législature ne semble pas promettre un statu quo de la fiscalité des placements.

(chaque parti compte apporter une touche innovante à la fiscalité des placements)

  • Le cdH veut un système d’imposition dual qui ne modifie pas la charge fiscale globale mais permet plus d’équité dans la taxation de tous les revenus, quelle que soit leur provenance.
  • DéFI prévoit une globalisation des revenus avec des taux moins élevés mais appliqués à une base plus large.
  • Les listes Destexhe plaident pour la prise en compte de l’inflation dans la taxation des revenus mobiliers en laissant le choix au contribuable: soit un précompte mobilier libératoire de 20% sur le revenu mobilier sans déduction de l’inflation, soit une déclaration des capitaux et de leurs revenus qui seront taxés à 20% après déduction de l’inflation.
  • Ecolo entend encourager l’investissement dans l’économie du futur et le secteur culturel sur le modèle du Tax shelter. 
  • Le MR exploite la même veine et prévoit un "Tax shelter climat" pour encourager l’innovation dans la réduction d’émissions, l’énergie verte, etc.
  • Le PP compte supprimer toutes les niches fiscales et globaliser tous les revenus (du travail, du capital, immobiliers) et les taxer sur base de trois tranches (0% jusqu’à 20.000 euros, 15% de 20.000 à 40.000 euros et 35% au-delà de 40.000 euros), soit "une révolution fiscale", assure le parti.
  • Le PS dit ne pas prévoir d’innovation fiscale mais estime que "les plus-values sur actions et parts doivent être taxées".
  • Le PTB veut lui aussi une taxe sur l’ensemble des plus-values financières mais aussi un avantage fiscal sur l’épargne dans une "banque publique 4.0".
Ce que le Fédéral a modifié en 5 ans

Le gouvernement Michel a été actif en matière de fiscalité des placements au cours de la législature écoulée. Le feuilleton de la taxe sur les comptes-titres a tenu banquiers, courtiers et investisseurs en haleine pendant de longs mois. Finalement, la première application de ce tout nouvel impôt, qui consiste en un prélèvement de 0,15% sur la valeur des comptes-titres d’au moins 500.000 euros, a rapporté 226,4 millions d’euros en 2018, un montant proche de l’estimation initiale de 254 millions d’euros.

Par ailleurs, le Fédéral a introduit une taxe sur la spéculation en 2016, applicable aux plus-values réalisées dans les six mois de l’achat d’une action, au taux de 33%. Elle fut supprimée dès l’année suivante parce que non seulement, elle n’avait pas généré les revenus espérés mais en plus, elle avait fait chuter le nombre de transactions, ce qui avait nui aux recettes de la taxe boursière.

Cette dernière a par ailleurs été alourdie par l’exécutif Michel. En 2017, les plafonds de cette TOB (taxe sur les opérations de Bourse) ont été multipliés par deux. Et en 2018, les taux de la taxe boursière ont été portés à 0,12% sur les obligations et 0,35% sur les actions, contre 0,09% et 0,27% respectivement auparavant. Certains fonds ont également été touchés par cette hausse. De plus, la TOB a été élargie aux transactions réalisées via des courtiers étrangers.

Le précompte mobilier est passé de 25 à 27% en 2016 puis à 30% en 2017.

Depuis l’an dernier, les plus-values des fonds obligataires, soumises au précompte mobilier, sont taxables dès qu’un fonds détient au moins 10% d’obligations, contre 25% précédemment.

L’exonération de précompte mobilier des intérêts des comptes d’épargne a été divisée par deux en 2018. Elle est de 980 euros par personne cette année. Une autre exonération de précompte a été introduite, cette fois en faveur des dividendes d’actions pour un total de maximum 800 euros cette année. Ces deux mesures sont censées être neutres sur le plan budgétaire, l’une finançant l’autre.

L’an dernier, le gouvernement Michel a introduit un nouveau plafond à l’épargne-pension, assorti d’un taux de 25% pour le calcul de la réduction d’impôt, contre 30% pour les montants limités au plafond précédent. Cette mesure induit une perte fiscale pour ceux qui dépasseraient le premier plafond sans s’approcher suffisamment du second plafond.

De quoi rendre cette modification neutre sur le plan budgétaire.

Au rayon des cadeaux fiscaux, on note encore l’introduction du Tax shelter pour start-up, qui permet aux particuliers de financer des entreprises débutantes en recevant une réduction d’impôt égale à 30% du montant investi, voire 45% pour les très petites entreprises. En 2018, la mesure a été étendue aux entreprises en croissance, à un taux de 25%.

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