Près d'un Bruxellois sur quatre exprime de l'antisémitisme, selon un sondage
Les préjugés antisémites sont très enracinés dans la société belge, en particulier à Bruxelles, selon un sondage réalisé par Ipsos, commandé par l'Institut Jonathas à la veille des élections.
Quatre-vingts ans après la Shoah, alors qu'une guerre a éclaté au Moyen-Orient, la société belge reste très marquée par des préjugés antisémites stigmatisant la communauté juive. Bruxelles est la plus touchée, près d'un Bruxellois sur quatre exprimant de l'antipathie pour les Juifs (22%). Cette aversion se nourrit de préjugés antisémites bien enracinés, tels que "les Juifs contrôlent les médias et les institutions politiques", et une méconnaissance de la judaïté. C'est ce qui ressort d'un sondage réalisé entre le 8 et le 12 mai auprès d'un échantillon représentatif de la société par Ipsos pour l'Institut Jonathas, obtenu en exclusivité par L'Echo et De Tijd.
"Le sentiment d'abandon des Juifs est absolu, beaucoup veulent quitter la Belgique."
Depuis le massacre commis le 7 octobre par le Hamas en Israël, et le déclenchement de la guerre, les Juifs de Belgique vivent une période éprouvante, caractérisée par une recrudescence des actes antisémites.
"Le sentiment d'abandon des Juifs est absolu, beaucoup veulent quitter la Belgique", dit Joël Kotek, historien et président de l'Institut Jonathas, un organisme ayant pour mission "d'objectiver l'antisémitisme sous toutes ses formes" et "de maintenir les Juifs en Belgique". Il s'agit du "premier sondage d'une telle ampleur sur ce sujet", précise-t-il.
Premier constat de l'enquête, 14% des Belges expriment une aversion pour les Juifs. C'est nettement plus qu'en France, où ce sentiment est de 6%, selon un sondage Ifop. L'antipathie pour les Juifs monte à 22% à Bruxelles. Elle est de 16% en Flandre et de 9% en Wallonie. Côté positif, 22% des Belges affichent de la sympathie pour les Juifs.
Des préjugés bien ancrés
"Depuis la Shoah, les gens n'osent plus se dire antisémites, mais si on les interroge sur les préjugés antisémites, on se rend compte que les marqueurs sont très élevés."
À ces données s'ajoute un deuxième constat, plus révélateur : le niveau élevé des préjugés antisémites.
"Depuis la Shoah, les gens n'osent plus se dire antisémites, mais si on les interroge sur les préjugés antisémites, on se rend compte que les marqueurs sont très élevés", poursuit Joël Kotek.
Sur 15 préjugés proposés par Ispos, 8 sont considérés comme vrais par 35% des répondants.
Pas moins de 19% des Belges affirment que "les Juifs sont responsables de la mort du Christ", 28% pensent que "les Juifs ne sont pas des gens comme les autres", 38% pensent que "les Juifs sont trop présents dans la finance" et 39% que "les Juifs ont des lobbies très puissants au plus haut de la société" et 74% estiment que "les Juifs sont très soudés entre eux".
Préjugé racial
Troisième constat : le racisme envers les Juifs est prégnant. Près d'un Belge sur quatre estime que "les Juifs forment une race qui ne veut pas s'assimiler en Belgique". Ce préjugé racial monte à 28% à l'extrême gauche, 26% à l'extrême droite et 39% auprès des répondants musulmans.
"En Belgique, l'adhésion aux préjugés antisémites est, de façon significative, plus élevée à l'extrême gauche, à l'extrême droite, chez les musulmans et à Bruxelles", affirme Joël Kotek.
Méconnaissance
Ces préjugés s'accompagnent d'une méconnaissance de la communauté juive. Plus de 80% des Belges ignorent combien il y a de Juifs dans le monde (15 millions), 1 répondant sur 10 les évaluant à 500 millions.
Environ 75% des Belges ignorent combien de Juifs vivent en Belgique (30.000). Mais paradoxe étrange, pas moins de 11% pensent qu'il y a "trop de Juifs" dans notre pays.
Plus de 60% des Belges ignorent que la religion juive est apparue en première, avant la chrétienté et l'islam.
Intérêt limité pour Gaza
"Mon souhait est que ce sondage contribue à des actions plus efficaces contre l'antisémitisme."
L'hostilité envers Israël et l'islamisme radical exacerbent l'antisémitisme, en particulier depuis le 7 octobre.
L'enquête Ipsos révèle toutefois un intérêt limité pour la guerre à Gaza. À peine 9% des Belges estiment que le positionnement politique des partis influencera "beaucoup" leur vote le 9 juin, tandis que 22% y accorderont "une certaine importance" pour effectuer leur choix électoral.
La moitié des répondants éprouvent de la sympathie pour les victimes, qu'il s'agisse de celles du massacre du 7 octobre (50%), des bombardements à Gaza (52%) ou des otages détenus par le Hamas (47%).
La grande majorité des personnes interrogées rejette le Hamas et le gouvernement israélien. Néanmoins, 5% des Belges ont de la sympathie pour le Hamas, cette affinité étant surreprésentée chez les Bruxellois (11%). Par ailleurs, 6% des Belges ont de la sympathie pour le gouvernement israélien.
Pas moins de 45% des Belges sont en faveur de la solution à deux États, 11% souhaitent "un État binational juif et arabe", 8% "un État palestinien de la Méditerranée au Jourdain dominé par les Arabes", un chiffre montant à 44% auprès des répondants musulmans.
"Mon souhait est que ce sondage contribue à des actions plus efficaces contre l'antisémitisme, notamment contre les groupes minoritaires qui importent le conflit du Moyen-Orient à nos portes. Halte aux pyromanes", conclut Joël Kotek, qui interpelle les autorités sur l'efficacité des politiques en place et sur le type de société voulu par les Belges.
- D'après un sondage réalisé en mai par Ipsos, les préjugés antisémites restent très ancrés dans la société belge. Pour l'Institut Jonathas, ils nourrissent un antisémitisme qui s'exprime au plus haut à Bruxelles et dans la communauté musulmane.
- Le sondage révèle aussi une méconnaissance profonde de la communauté juive, tant sur son nombre que sur la religion.
- La guerre à Gaza et l'hostilité envers Israël exacerbent l'antisémitisme. Mais le positionnement des partis sur cette guerre n'a beaucoup d'importance que pour 9% de la population.
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