Les biens à vendre s'accumulent sur le marché immobilier
Entre juillet 2021 et juillet 2022, le stock de biens à vendre en Belgique a augmenté de 7%. Signe supplémentaire du ralentissement du marché, qui touche surtout les biens "moyens" énergivores et à rénover.
Les "années covid" ne sont plus qu'un souvenir pour le marché immobilier. L'euphorie, les enchères, les achats dans la précipitation, les prix irrationnels, c'est terminé.
Aujourd'hui, la donne a complètement changé. Les taux hypothécaires remontent en flèche, diminuant la capacité d'emprunt des ménages, la facture énergétique a été propulsée en tête des préoccupations des futurs acquéreurs et les coûts de rénovation explosent. Sans compter les craintes de récession et le contexte géopolitique anxiogène. Selon SmartBlock, une société qui collecte, consolide et analyse les données immobilières publiques disponibles, ce climat se traduit dans les chiffres suivants: en juillet 2022, le stock de biens anciens en vente en Belgique était d’environ 90.000, soit 7% de plus qu’à la même période l’an passé. "Un stock qui augmente signifie que les biens mis en vente ne trouvent plus suffisamment de preneurs à ce prix-là. Par ailleurs, une augmentation du stock et une baisse du volume de transactions sont souvent annonciatrices d’une baisse de prix relative", commente Alexandre Verdonck, data scientist et fondateur de SmartBlock. Or, les notaires constatent que l'activité immobilière a baissé dans les trois Régions du pays au premier semestre de 2022, par rapport au premier semestre de 2021, et qu'une baisse de prix s'est amorcée entre le premier et le deuxième trimestre de l'année.
Faut-il y voir une simple normalisation d'un secteur qui avait perdu la raison ou le début d'une sévère correction?
Kim Ruysen, CEO du réseau d'agences immobilières Trevi, constate que "pendant la période de surchauffe en 2020 et 2021, les biens se vendaient en moyenne en deux semaines. Aujourd'hui, c'est plutôt deux mois. C'est un marché qui retrouve son équilibre". Mais un équilibre nuancé, étant donné que les biens rénovés et peu énergivores continuent à se vendre vite et cher, alors que les biens "moyens" partent au prix, voire en-dessous. "Les critères d'achat ont complètement changé depuis la guerre en Ukraine et l'envolée des prix de l'énergie. Alors que, pendant la pandémie, les acquéreurs recherchaient des biens avec un jardin ou une terrasse et avec un espace de bureau, aujourd'hui, c'est le PEB qui est devenu le critère numéro 1. L'inflation est une réalité pour tout le monde. Les gens prennent en compte le coût mensuel du projet, dont les factures d'énergie et les rénovations", explique-t-il.
Bien sûr, la remontée des taux d'intérêt vient également alourdir leurs charges. "En effet, un bien qui valait 100.000 euros en 2020 vaudrait en 2022 près de 115.000 euros. On considère, en tenant compte de la hausse des taux et pour un bien identique, que les mensualités sont actuellement 29% plus élevées qu’en 2020", poursuit Alexandre Verdonck. Ajoutons à cela les coûts de rénovation qui ont explosé et dont on ne sait pas s'ils redescendront un jour, et cela explique, par exemple, pourquoi les "quatre façades" des années 1980, qui avaient bénéficié d'un intérêt parfois délirant pendant la pandémie, font aujourd'hui face à davantage de difficultés (comme les biens à rénover de manière générale).
Mais de manière générale, "le rapport de force entre le vendeur et le candidat acquéreur est aujourd'hui équilibré. Le vendeur n'est plus le roi. Jusqu'ici, le marché ne répondait plus à aucune logique, cela ne pouvait pas durer. L'équilibre revient donc grâce à une hausse des stocks", constate Emmanuel Deboulle, business development manager Wallonie-Bruxelles chez ERA.
Le Nord-Ouest de Bruxelles se refroidit
Selon les données de SmartBlock, c’est en région bruxelloise que la hausse du stock immobilier est la plus élevée (+12,4%). En Wallonie, le stock n'a augmenté que de 6,1% et il a même baissé de 2,6% en Flandre.
Le marché du nord de Bruxelles semble avoir le plus ralenti. En effet, les communes de Berchem-Sainte-Agathe, Anderlecht, Schaerbeek et Saint-Josse-ten-Noode ont vu leur stock de biens en vente augmenter significativement. Dans l'ouest de la capitale, la hausse a même atteint 21% à Anderlecht. "C'est un marché dans lequel le pouvoir d'achat est moins élevé, et pour lequel les candidats acquéreurs ont pour le moment du mal à sortir le budget nécessaire", confirme Kim Ruysen. Même constat chez ERA: "les communes du nord de Bruxelles attirent surtout les primo-acquéreurs. Ce sont eux pour lesquels la situation est la plus compliquée. Il ne suffit même plus d'avoir un beau salaire pour devenir propriétaire, mais un beau sponsoring des parents", souligne Emmanuel Deboulle. À l'inverse, les communes de Bruxelles-Ville et Saint-Gilles ont vu leur stock de biens diminuer (de respectivement 7,4% et 7,6%) au cours de l’année.
Les critères d'achat ont complètement changé depuis la guerre en Ukraine et l'envolée des prix de l'énergie.
De manière générale, constate SmartBlock, ce sont les grandes villes qui souffrent le plus de difficultés à vendre avec des hausses records des stocks également à Namur (+16,7%) et à Liège (+8,5%). D'ailleurs, "on observe les plus grandes disparités en Wallonie où les villes ont vu leur stock augmenter grandement alors qu’il n’y a pas d’effet significatif observable en zone rurale", précise la société.
Pas de stress sur le luxe
C'est simple, voire basique, mais le luxe ne connait pas la crise. C'est ce que constate Emmanuel Deboulle chez ERA, mais aussi Quentin Pinte, responsable du département vente chez Latour et Petit (une agence immobilière plutôt positionnée haut de gamme), "les clients sont plus regardants pour des biens dont le prix se situe entre 450.000 euros et 800.000 euros. Pour ces biens, il est désormais plus rare d'obtenir le prix demandé. Mais au-dessus du million, et dans l'ultra-luxe, on ne constate pas encore de tassement ni de ralentissement".
D'ailleurs, si, en termes de stock, le marché flamand semble avoir mieux résisté à l’accalmie post-covid, c'est principalement grâce aux communes côtières et à leurs résidences secondaires. "L'offre de biens a diminué de 15,6% à Knokke-Heist, de 10,8% à Nieuport, de 10,7% à Middelkerke et de 6,9% à Coxyde. La seule exception à cette règle s’observe à Blankenberge, qui a vu son offre immobilière doubler au cours de cette année", conclut SmartBlock.
- Le stock de biens immobiliers mis en vente a augmenté de 7% en un an, ce qui traduit le ralentissement du marché immobilier.
- Cela équilibre l'offre et la demande et normalise le marché après des années d'euphorie.
- La Région bruxelloise, particulièrement les communes au nord, connait la plus forte hausse du stock immobilier.
- Le segment "luxe" n'est pas encore impacté.
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