L'Europe sanctionne la Biélorussie après le déroutage d'un avion Ryanair
Les Vingt-Sept ont décrété un blocus sur le ciel biélorusse et de nouvelles sanctions contre le régime d'Alexandre Loukachenko après le détournement d'un avion de ligne Ryanair.
Un incident majeur provoqué par le président biélorusse Alexandre Loukachenko, le déroutage d'un avion de ligne Ryanair et l'arrestation d'un opposant ont bouleversé l'ordre du jour du sommet européen extraordinaire qui s'est ouvert lundi à Bruxelles.
Lors du dîner, les 27 dirigeants de l'Union européenne (UE) ont concentré les débats sur les sanctions à prendre contre le régime de Loukachenko. Les discussions étaient intenses, tous téléphones éteints pour en préserver la confidentialité. Initialement, il devait être question avant tout de la Russie, du Royaume-Uni et du Moyen-Orient, mais le dictateur biélorusse leur a volé la vedette.
Blocus aérien
La décision est tombée très vite, après deux heures de débats. Les Vingt-Sept ont décidé prendre les mesures nécessaires pour interdire le survol aérien européen à la compagnie nationale Belavia et d'appeler les compagnies aériennes européennes à ne plus survoler le territoire biélorusse.
L'UE avait déjà pris trois paquets de sanctions contre la Biélorussie. L'adoption d'un quatrième paquet traînait. Cet incident a accéléré le processus.
Environ 2.000 avions de ligne empruntent chaque semaine l'espace aérien de la Biélorussie, selon Eurocontrol. Belavia assure, pour sa part, une vingtaine de vols quotidiens au départ ou à destination d'aéroports de l'UE.
Sanctions
Les dirigeants européens ont aussi avalisé de nouvelles sanctions contre des responsables biélorusses. Des sanctions économiques ciblées seront également prises contre la Biélorussie.
Les ministres des Affaires étrangères ont été chargés de mettre en place ces sanctions. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, est invité à proposer "sans délai" des sanctions économiques ciblées.
L'UE avait déjà pris trois paquets de sanctions contre la Biélorussie, frappant 88 personnalités et sept entités proches du dictateur Loukachenko suite à la répression menée contre l'opposition. L'adoption d'un quatrième paquet traînait. Cet incident a accéléré le processus.
"Nous ne tolérons pas que l'on tente de jouer à la roulette russe avec la vie de civils innocents."
Enfin, les Vingt-Sept ont encore exigé que l'opposant Roman Protassevitch et sa compagne soient "immédiatement libérés", et demandé à l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) d'enquêter en urgence sur cet incident.
"Menace contre la sécurité internationale"
Les événements ont été décrits comme "inacceptables, choquants et scandaleux", par le président du Conseil européen Charles Michel. "C'est une menace contre l'aviation civile et c'est une menace contre la sécurité internationale", a-t-il dit lors d'une conférence de presse. "Nous ne tolérons pas que l'on tente de jouer à la roulette russe avec la vie de civils innocents. Ce qui s'est passé hier n'est pas acceptable", a-t-il précisé.
"Le jugement a été unanime. C'est une attaque de la démocratie, de la liberté d'expression et de la souveraineté européenne", a déclaré la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, tenant les autorités biélorusses responsables de la santé de Roman Protassevitch et de sa compagne. "Nous avons 3 milliards d'euros de fonds qui sont prêts à destination de la Biélorussie, qui sont en attente, gelés, tant que la situation sera ce qu'elle est", a-t-elle ajouté.
"Ils m'exécuteront, je vais mourir ici."
Les Vingt-Sept ont également approuvé durant la nuit des conclusions sur la Russie, condamnant "les activités russes illégales, provocatrices et perturbatrices" contre l'UE et ses États membres. "Nous exprimons notre solidarité avec les États membres, en particulier la Tchéquie", a précisé Charles Michel.
"Terrorisme d'État"
Tout avait commencé dimanche vers 13 heures. Un Boeing 737 de la compagnie Ryanair faisant route d'Athènes vers Vilnius a été alerté par les contrôleurs aériens bélorusses d'une "menace potentielle pour la sécurité à bord".
Un MIG 29, armé de missiles air-air, a soudain fait irruption et enjoint le pilote d’atterrir à Minsk. À son bord se trouvait Roman Protassevitch, 26 ans, l’ancien rédacteur en chef du média d’opposition Nexta. Cet activiste, recherché par le régime biélorusse, a commencé à paniquer. "Ils m'exécuteront, je vais mourir ici", a-t-il dit, selon plusieurs passagers. Selon plusieurs sources, quatre agents du KGB, les services biélorusses, étaient également à bord de l'avion.
Une fois le vol posé, les forces biélorusses ont arrêté l'opposant et sa petite amie, Sofia Sapéga. L'avion a été immobilisé durant trois heures à Minsk pour subir une fouille complète. La plupart des 120 passagers à bord, dont un Belge, étaient des Européens.
Un test pour l'Europe
L'opération menée par le régime biélorusse à la veille d'un sommet européen est apparue comme une provocation de plus à l'encontre de l'Europe, avec la bénédiction de la Russie, son principal allié. Et ce, alors que les dirigeants européens devaient discuter lundi soir de la relation de l'UE avec la Russie.
Pour mater les opposants, le dictateur a mis en place une répression d'une violence inouïe menée par sa police d'État et le KGB, les services biélorusses liés au FSB russe.
Le président Loukachenko, contesté lors sa réélection en août dernier, s'est inféodé à Moscou pour obtenir sa protection face à une révolte sans précédent. Des centaines de milliers d'opposants ont manifesté durant six mois, soutenus par la communauté internationale.
Pour les mater, le dictateur a mis en place une répression d'une violence inouïe menée par sa police d'État et le KGB, les services biélorusses liés au FSB russe (ex-KGB). Pour échapper à la prison, la cheffe de l'opposition Svetlana Tikhanovskaïa, s'est exilée à Vilnius, d'où elle dirige la révolte.
L'UE et les États-Unis, refusant de reconnaître le président biélorusse, ont pris une série de sanctions pour tenter d'infléchir cette répression. Sans succès. La révolte a commencé à faiblir au début de l'année, sous le coup des arrestations et des emprisonnements.
Parallèlement, les relations entre la Russie et l'UE se sont dégradées. Moscou multiplie les tests à l'encontre des Européens, en particulier avant les sommets, comme ce fut le cas lors de l'humiliation du chef de la diplomatie Josep Borrell à Moscou en février dernier.
- Les dirigeants de l'UE ont décidé de sanctionner durement le régime biélorusse après le déroutage d'un avion de ligne Ryanair et l'arrestation d'un opposant menés sur ordre du président Alexandre Loukachenko.
- L'opération menée par le régime biélorusse à la veille d'un sommet européen apparaît comme une provocation et un test vis-à-vis de l'Union européenne.
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