Des exportations d'armes vers les Émirats dans le viseur du Conseil d'État
La Ligue des droits humains voulait la suspension de neuf licences d'exportations d'armes vers les Émirats arabes unis. L'auditeur du Conseil d'État plaide pour en suspendre deux. Une licence octroyée à FN Browning échappe à la suspension.
Après avoir appris que le ministre-président wallon, Adrien Dolimont (MR), avait octroyé une licence d'exportation d'armes vers les Émirats arabes unis (EAU) à la FN Browning, la Ligue des droits humains et d'autres partenaires s'étaient tournés en extrême urgence vers le Conseil d'État pour tenter d'obtenir la suspension de cette licence.
Ce jeudi matin, l'auditeur du Conseil d'État, expliquant que la licence avait déjà été exécutée, a estimé qu'il ne pouvait plus être question d'urgence et que le recours en suspension devait être rejeté.
En introduisant leur action contre la FN Browning devant le Conseil d'État, la Ligue des droits humains, la Coordination nationale d'action pour la paix et la démocratie (CNAPD) et le Forum voor vredeactie – soutenus par Amnesty International – se sont rendu compte que le gouvernement wallon avait octroyé neuf licences d'exportation d'armes vers les EAU.
Quatre licences temporaires ont ainsi été accordées à John Cockerill Defense pour exposer du matériel lors d'un salon de l'armement qui se tiendra dans le courant du mois de février à Abu Dhabi.
Fort de ce constat, ces organismes avaient décidé d'intenter leur action en suspension contre les neuf licences sans réellement savoir de quoi il était question, les dossiers étant frappés de confidentialité. Pour appuyer leur action, les parties requérantes ont estimé qu'il y avait, entre autres, un risque de violation du droit humanitaire et un risque de détournement du matériel exporté qui, le cas échéant, pourrait être utilisé contre des populations civiles dans des conflits au Yémen ou au Soudan.
Les licences en question
Au-delà de la première licence de transit (et non d'exportation) accordée à la FN Browning pour l'acheminement vers la France de pièces de rechange pour des mitrailleuses équipant des chars français Leclerc dans les EAU, l'audience a permis d'en savoir plus sur les autres licences.
Quatre licences temporaires ont ainsi été accordées à John Cockerill Defense pour exposer du matériel lors d'un salon de l'armement qui se tiendra dans le courant du mois de février à Abu Dhabi. La sixième licence (définitive celle-là) également accordée à John Cockerill Defense porte sur du transfert de technologies.
L'auditeur a estimé que la Commission d'avis n'a pas évalué correctement les risques de détournement de matériel et de violation du droit humanitaire [...].
La septième licence, accordée à Sonaca, porte sur de l'importation de pièces d'avion à réparer avant de les réexporter vers les EAU. Une huitième licence, accordée à Aerospacelab, a été abandonnée par la société elle-même, a-t-on appris lors de l'audience. La neuvième et dernière licence, octroyée à Belgian Advanced Technology System (BATS), porte sur des systèmes permettant de neutraliser des drones.
Les deux licences épinglées par l'auditeur du Conseil d'État
Après les plaidoiries de chaque partie, l'auditeur du Conseil d'État a rendu son avis, demandant au Conseil de suspendre les licences octroyées à John Cockerill Defense (transfert de technologies) et à la Sonaca (réparation de pièces). Dans son avis, l'auditeur a estimé que la Commission d'avis sur les licences d'exportations d'armes n'avait pas assez correctement évalué les risques de détournement de matériel et de violation du droit humanitaire dans le cas de ces deux licences.
Pour l'auditeur, rien ne permet d'exclure que le matériel concerné par ces deux licences puisse être utilisé dans des conflits armés au Yémen ou au Soudan. Fort de cela, l'auditeur a demandé la suspension de ces deux licences.
Par contre, celle octroyée à la FN Browning ayant été exécutée (et s'agissant d'une licence de transit vers la France), la requête à son encontre est sans objet, a dit l'auditeur. Tout comme il ne voit pas de risques concernant les quatre licences en vue d'exposer du matériel dans un salon de l'armement.
La requête contre la licence abandonnée par Aerospacelab n'a plus d'objet non plus. Enfin, celle portant sur la neutralisation de drones (BATS) ne semble pas non plus contenir de risques de détournement.
L'affaire a été prise en délibéré.
- La Ligue des droits humains a intenté un recours en suspension contre une licence d'exportation d'armes vers les Émirats arabes unis octroyée à la FN Browning.
- En cours de procédure, la Ligue s'est rendu compte que neuf licences (à différentes sociétés) avaient été accordées.
- In fine, l'auditeur du Conseil d'État a demandé la suspension de deux licences octroyées à Sonaca et à John Cockerill Defense.
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