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Face à la première vague de froid, l'Europe puise massivement dans ses réserves de gaz

En un peu plus de trois semaines, le taux de remplissage des stocks de gaz de l'Europe est passé de plus de 95% à 87,4%. ©Bloomberg

Si l'hiver n'a pas encore commencé, l'Europe est déjà en train de puiser - massivement - dans ses réserves de gaz. Les tensions persistantes sur l'approvisionnement font grimper les prix du gaz à leur plus haut niveau de l'année.

C'est bien plus tôt et surtout beaucoup plus que ces dernières années: la quantité de gaz que les États membres de l'Union européenne ont déjà dû puiser dans leurs réserves construites ces dernières semaines est sans précédent. C'est ce qui ressort d'une analyse réalisée par nos confrères du Tijd sur la base des chiffres de Gas Infrastructure Europe (GIE), l'organisation faîtière des opérateurs de réseaux gaziers européens.

Depuis le début du mois de novembre, près de 9 milliards de mètres cubes de gaz ont été prélevés sur les réserves européennes en termes nets. C'est plus du double de la moyenne des cinq dernières années et le plus grand retrait net depuis que GIE a commencé à suivre l'évolution de la situation en 2015 (voir graphique).

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La combinaison d'un premier coup de froid et d'un manque de soleil et de vent a provoqué un pic de consommation, tant pour le chauffage que pour la production d'électricité par les centrales à gaz. En l'absence d'un approvisionnement en gaz suffisamment important et constant, l'Europe a été contrainte de puiser dans ses réserves de manière remarquablement précoce.

À titre de comparaison, en 2022, alors que les prix étaient très élevés, les réserves de gaz ont à peine été exploitées au cours des premières semaines de novembre. En 2023, le prélèvement net a été de 1,96 milliard de mètres cubes, soit moins d'un quart de la quantité déjà utilisée.

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87,2%
En Belgique, le taux de remplissage du site de stockage de Loenhout est passé de 98,2 à 87,2% entre le 1er et le 25 novembre.

Des réserves européennes plus faibles que ces dernières années

En un peu plus de trois semaines, le taux de remplissage de l'Europe est ainsi passé de plus de 95% à 87,4%. Cela signifie que les stocks sont encore plus importants que la moyenne avant le début de la guerre en Ukraine à la fin du mois de février 2022 et la crise énergétique qui a commencé dès 2021. Mais la situation des États membres de l'UE est pire que la moyenne des cinq dernières années.

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Par rapport à la même période en 2023, le taux de remplissage est aujourd'hui inférieur d'environ 10 points de pourcentage. À l'époque, les réserves n'étaient réellement utilisées qu'à partir de la fin novembre. En 2022 également, les réserves de gaz étaient sensiblement plus pleines qu'aujourd'hui.

La France et les Pays-Bas - les États membres ayant la plus grande capacité de stockage dans l'UE après l'Allemagne et l'Italie - sont même en dessous de la moyenne d'avant la crise avec leurs taux de remplissage actuels. Entre le 1ᵉʳ et le 25 novembre, ces deux pays ont également vu leurs stocks tomber nettement en dessous de la moyenne européenne, avec encore 82,7% en France et seulement 76% aux Pays-Bas. Seule la Roumanie a connu une diminution des stocks relativement plus importante. Dans notre pays, le taux de remplissage du petit site de stockage de Loenhout est passé de 98,2 à 87,2%, ce qui correspond à peu près à la moyenne européenne.

Moins de demande en gaz

Bien que davantage de gaz liquéfié arrive en Europe par le biais des méthaniers, l'offre totale est plus faible qu'auparavant. Cela est principalement dû à une demande structurellement plus faible, tant de la part des consommateurs que de l'industrie. Par rapport à la moyenne des cinq dernières années, quelque 18% de gaz en moins ont été livrés en novembre. Par rapport aux livraisons d'avant la guerre, la différence est même de près d'un quart.

Pourtant, le gaz continue de provenir de Russie, par le biais de gazoducs. La question est donc de savoir quel sera l'impact de la perte de son transit par l'Ukraine. Après la suspension récente des livraisons russes à l'Autriche, un autre test suit avec la fermeture complète de cette voie d'acheminement du gaz à partir du 1ᵉʳ janvier. Les pays d'Europe centrale tels que la Hongrie ou la Slovaquie sont particulièrement exposés au risque d'une pression supplémentaire.

L'Europe craint de devoir payer de plus en plus cher son gaz naturel liquéfié dans le cadre d'une concurrence accrue avec les pays asiatiques notamment, surtout si elle n'est pas aidée par un nouvel hiver doux.

Le GNL encore plus cher pour l'Europe?

Le prix de référence néerlandais du TTF pour les livraisons de décembre a grimpé à plus de 48 euros par mégawattheure ces derniers jours, soit le niveau le plus élevé de l'année et plus du double de son niveau d'avant la crise. Les prix pour une livraison au printemps 2025 ont augmenté encore plus fortement en raison des inquiétudes concernant la prochaine saison de remplissage. La baisse précoce et marquée des réserves soulève maintenant des questions sur la situation de l'Europe d'ici à la fin du mois de mars. Plus les stocks seront vides à ce moment-là, plus il sera difficile et donc coûteux de les reconstituer suffisamment.

L'Europe craint de devoir payer de plus en plus cher son gaz naturel liquéfié dans le cadre d'une concurrence accrue avec les pays asiatiques notamment, surtout si elle n'est pas aidée par un nouvel hiver doux. Selon les calculs de l'agence de presse Bloomberg, basés sur les données du Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme (CEPMMT), les températures d'ici la fin du mois de mars en Europe resteront inférieures à celles des deux derniers hivers.

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