La pilule amère des biotechs cotées à Bruxelles
L'examen clinique du parcours boursier des biotechs cotées à Bruxelles révèle de graves carences: huit d'entre elles (sur 13) présentent un cours de Bourse anémié c'est-à-dire inférieur au prix de l'IPO.
Dans quelques semaines, une nouvelle société de biotechnologie rejoindra la Bourse de Bruxelles. Spécialisée dans le développement de traitements des allergies par immunothérapie, Asit Biotech a lancé jeudi dernier son offre en souscription publique qui porte sur un maximum de 3,5 millions d’actions. La fourchette de prix se situe entre 7 et 8,5 euros le titre et sa première cotation devrait intervenir autour du 11 mai. Elle se retrouvera en bonne compagnie puisque l’on compte déjà sur Euronext Bruxelles une bonne douzaine de biotechs cotées.
Ceux qui suivent régulièrement ce blog savent avec quelle extrême prudence j’aborde toujours ce compartiment très particulier des marchés. Très souvent, une société d’un secteur plus traditionnel va en Bourse lorsqu’elle génère déjà du chiffre d’affaires et idéalement du bénéfice à partager sous forme de dividende. Rien de tout cela ici. Dans leur très grande majorité, les biotechs ne produisent rien, ne vendent rien, ne distribuent rien. Elles recherchent et développent et pour cela elles brûlent du cash. Le Graal? Parvenir à franchir toutes les phases des essais cliniques avec succès et obtenir le feu vert des autorités sanitaires pour une mise sur le marché. Fin de la parenthèse.
Pas de quoi se déhancher sur un zouk
Sachant cela faut-il oui ou non participer à l’IPO d’Asit Biotech? Ce n’est pas à moi de vous le dire (même si je paierais cher pour être débarrassé du rhume des foins). A vous de jauger votre niveau de prise de risque et d’au moins parcourir le prospectus pour éclairer votre lanterne.
Pour vous aider dans cette démarche et bien que les performances passées ne présentent aucune sorte de certitude pour l’avenir, j’ai dressé un petit bilan boursier des biotechs inscrites sur Euronext Bruxelles. Et, comme vous allez le voir, il n’y a pas de quoi se déhancher sur un zouk de Magic System.
Sur les 13 valeurs, seules 5 présentent, à l’heure actuelle, un cours supérieur à leur prix de souscription. Depuis début janvier (et jusqu'au 27 avril inclus) , elles sont toutes dans le rouge -à l’exception d’Argen-x qui signe un maigrichon 3%- avec un repli global nettement plus accentué que celui du Bel 20 (-6%). Galapagos , Genticel , et TiGenix ont vu leurs actions fondre de plus de 20% en quatre mois.
Le parcours boursier le plus bluffant revient à la doyenne des biotechs (en terme de cotation boursière) reprise dans le premier tableau ci-dessous. A la date du 27 avril, l’action Galapagos se traitait à 40 euros, un gain de 472% par rapport à son prix de souscription de 7 euros qui remonte à 2005. Le titre a atteint un sommet de 58 euros en septembre dernier quelques mois après son introduction sur le Nasdaq qui fut un véritable succès. Et malgré la récente baisse, il affiche encore un potentiel de hausse de 63% si l’on en croit les analystes financiers.
Les sirènes du Nasdaq
Un signe encourageant pour les biotechs qui végètent en Bourse. Outre le fait que le cours de son action a mis des années avant de prendre son envol, Galapagos a connu une IPO calamiteuse en 2005. Elle a été retardée de quelques jours pour manque d’intérêt et le prix de souscription a été fixé à 7 euros, soit la partie basse d’une fourchette déjà revue, une fois à la baisse!
Celyad aussi a été attirée par les sirènes du Nasdaq mais avec un bilan nettement plus mitigé que celui de Galapagos. Après avoir levé 100 millions de dollars, la société a vu son titre chuter de 15% le premier jour de sa cotation.
Pour TiGenix, l’eldorado du Nasdaq a tourné court. Les conditions défavorables régnant sur les marchés ont poussé la biotech à ranger ce projet dans ses cartons. A la place, elle a lancé un placement privé afin de récolter 15 millions d’euros. Elle en a finalement obtenu 24 millions. Cotée depuis mars 2007, cette société qui a englouti un nombre considérable de millions d'euros pour financer ses recherches affiche le parcours boursier le plus catastrophique. Un investisseur qui aurait souscrit pour 1.000 euros à son IPO n'en aurait plus aujourd'hui que 184.
Un potentiel de croissance à deux chiffres
Si, comme on l’a vu, le bilan boursier de ces valeurs reste très décevant, les perspectives d’évolution des cours laissent rêveur. Le tableau ci-dessous se base sur les avis d’analystes financiers répertoriés par Bloomberg. Quelques explications: 100% achat sur Ablynx, par exemple, cela signifie que tous les analystes qui suivent le titre le recommandent à l’achat. Le "target" est l’objectif de cours moyen sur un horizon de 12 mois. Le potentiel est la différence en pourcentage entre le cours (au 27 avril) et l’objectif de cours moyen.
Vous constaterez que pour toutes les valeurs il affiche une croissance à deux chiffres. Pour Genticel, on atteint même 100%. N’oubliez pas que le segment biotech a été fort malmené ces derniers mois. Dès que les marchés flanchent, ce segment est le premier à décrocher.
ThromboGenics, un cas d'école
A trois exceptions près, les analystes qui suivent une société sont tous à l’achat sur celle-ci. Pour ThromboGenics , la prudence est de mise : la recommandation est à " conserver " avec potentiel de hausse maigrichon (16%) comparé à ses concurrents. Elle paie encore le prix de sa déchéance boursière. Le dossier Thrombo est un cas d’école emblématique de la fièvre spéculative qui peut entourer une biotech avant de retomber comme un soufflé avec, en sus, un travail de sape des vendeurs à découvert. Rappelez-vous : elle a pourtant fait partie du Bel 20 à son époque dorée et vu son cours atteindre les 47 euros pour 3,3 euros aujourd’hui. Un analyste voyait même le titre atteindre les 73 euros…
Pour les biotechs, il ne suffit pas de mettre au point de nouveaux traitements, il faut également être capable de mettre en place une stratégie de marketing efficace. C’est ce qui a notamment fait défaut à Thrombo. Et constitue un défi de plus à relever par ces sociétés lorsqu'elles atteignent une certain maturité.
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