Le secteur du private equity a profondément évolué. Autrefois associé à la simple maximisation des profits, il est désormais synonyme de partenariats durables et de création de valeur. Dans le contexte géopolitique actuel, la demande d'investissements dépasse largement l'offre.
Ces dernières décennies, le private equity s'est imposé comme un acteur majeur des marchés financiers mondiaux. "Cette tendance, issue du monde anglo-saxon, a atteint notre pays il y a environ 25 ans", souligne Mark Sheikh, spécialiste des fusions et acquisitions chez EY Belgique.
"Alors qu’auparavant, les investisseurs se concentraient principalement sur les entreprises cotées en Bourse, l'intérêt pour les entreprises privées a rapidement augmenté. Nous observons aussi une croissance significative de ces véhicules d'investissement familiaux que sont les family offices." En 2021, plus de 1.000 milliards de dollars ont été investis dans le private equity à l'échelle mondiale. Un record.
Incertitudes géopolitiques
La croissance du private equity s'explique en partie par sa capacité à retirer les entreprises de la Bourse, leur permettant ainsi d'opérer à l'abri des pressions des marchés d'actions à court terme. "Le private equity représente une véritable alternative aux marchés de capitaux publics, souvent marqués par la volatilité et la pression des actionnaires à court terme", note Sievert Ver Eecke, spécialiste de la due diligence chez EY Belgique. "Il offre également la possibilité de changements stratégiques à long terme, favorisant ainsi la création de valeur."
"De nombreuses entreprises se trouvent confrontées à un manque de connaissances et d'expérience pour soutenir leur croissance, ce qui les pousse à se tourner vers le private equity."
L'importance de la due diligence et de l'analyse des aspects fiscaux, financiers, juridiques et commerciaux lors des transactions a considérablement augmenté ces dernières années, poursuit l’expert. "Les conditions du marché ont changé en profondeur. Après le pic de 2021, une forte baisse a suivi. Pour lutter contre l'inflation élevée, les banques centrales ont largement relevé des taux d'intérêt historiquement bas. Parallèlement, nous avons été confrontés à des crises successives : la pandémie de coronavirus, les perturbations des chaînes d'approvisionnement, la guerre en Ukraine, la crise énergétique, les tensions au Moyen-Orient et de nombreuses élections dans les grands pays occidentaux."
Mark Sheikh met en lumière l'impact de ces facteurs : "Les investisseurs en private equity qui dépendent du financement externe sont affectés par l'incertitude géopolitique. Bien qu'il y ait encore beaucoup de liquidités sur le marché, les dossiers intéressants se font rares. Par conséquent, les prix d'entrée sont trop élevés, le financement est plus coûteux et la création de valeur prend davantage de temps. Cela influence les attentes de rendement. Les investisseurs veulent être certains qu'une réelle création de valeur est possible après leur entrée, et que le modèle de valorisation sous-jacent est solide."
Un parcours de croissance efficace
Le private equity suscitait auparavant la méfiance, car il était perçu comme axé exclusivement sur les économies de coûts et la maximisation des profits. "Heureusement, cette époque est révolue", affirme Sievert Ver Eecke. "Dorénavant, la création de valeur durable est la priorité. Les fonds de private equity apportent du capital supplémentaire mais aussi une expertise opérationnelle et stratégique. Des équipes spécialisées aident les entreprises de leur portefeuille à mettre en œuvre des améliorations opérationnelles et financières. Ces équipes ne se composent plus uniquement de profils financiers : elles incluent des spécialistes stratégiques et opérationnels. En tant que sparring-partners, ils stimulent l'innovation produit, le développement de nouveaux marchés, l'expansion internationale et les acquisitions."
"Les investisseurs constituent des équipes spécialisées pour mener des trajectoires d'optimisation au sein des entreprises de leur portefeuille. Des équipes qui ne se limitent pas à des profils financiers."
Aux yeux de Mark Sheikh, le private equity offre une valeur ajoutée cruciale pour les entreprises privées, qui souffrent fréquemment d'un manque de financement pour soutenir leur croissance ou restructurer l'actionnariat, surtout dans un climat d'incertitude géopolitique. "Nous constatons que les acteurs du private equity conservent désormais leurs participations plus longtemps, ce qui peut avoir un impact négatif sur le rendement. C'est pourquoi il convient de rester activement impliqué, même avec une participation minoritaire."