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L'instabilité des berges du canal précipite la chute du musée Mima

Le Mima n'est pas le seul à souffrir de la situation. Deux hôtels qui lui sont mitoyens, le Belvue et le Meininger, sont également impactés par les problèmes de stabilité de la voirie. ©Kristof Vadino

Privé de plus de la moitié de ses visiteurs depuis la fermeture de la voirie au quai du Hainaut, qui menace de s'effondrer, le musée des arts visuels va fermer définitivement. Un coup dur pour Molenbeek et le centre-ville de Bruxelles.

C'est une petite indiscrétion d'Alice Van den Abeele, jeudi soir, sur le stand qu'elle occupe à la foire Art On Paper, qui fait l'effet d'une bombe. Le Mima, musée qu'elle a créé avec Raphaël Cruyt et qui draine depuis neuf ans, le long du Canal, à Molenbeek, près de 60.000 amateurs d'art visuels et urbains par an, va définitivement fermer ses portes le 5 janvier 2025.

En cause, la clôture de l'accès au quai du Hainaut depuis le pont de la Porte de Flandre, qui relie la chaussée de Gand et la rue Antoine Dansaert. Ce barrage est intervenu, fin juin, après que les experts du Port de Bruxelles, qui a la gestion des berges, ont constaté des problèmes de stabilité de la voirie. "Selon notre bureau d'études, les pieux qui la soutiennent à cet endroit ne seraient plus assez résistants pour porter la charge continue du trafic routier. C'est essentiellement cela qui a motivé Bruxelles Mobilité à interrompre la circulation, laissant toutefois un passage aux piétons et aux vélos", explique Sylvain Godfroid, porte-parole du Port de Bruxelles.

Le Mima drainait entre 50.000 et 60.000 visiteurs par an.
Le Mima drainait entre 50.000 et 60.000 visiteurs par an. ©Kristof Vadino

Le problème est double: la stabilité de la voirie qui menace ici de s'effondrer et le risque de basculement du quai tout entier dans le canal, tel qu'il s'est manifesté au début de l'année du côté du Port de Bruxelles, au quai Monnoyer, et a nécessité l'empierrement du mur de quai. "Une solution d'urgence que l'on pourrait envisager pour le quai du Hainaut, mais qui ne permettrait pas de rouvrir la chaussée", poursuit Sylvain Godfroid, qui précise que le Port de Bruxelles planche sur un cahier des charges pour qu'une firme spécialisée puisse intervenir. "Mais à ce stade, il n'y a pas de planning d'exécution des travaux puisque le marché est en cours de réalisation."

Communication floue

"Nous avons participé à deux réunions et c'est le flou", réagit Raphaël Cruyt, cofondateur du Mima. "Il n'y a pas de réponse quant à une date d'échéance, ni sur les travaux qu'il faut entreprendre. Comme je le comprends, c'est: 'Si vous croyez au père Noël, ce sera dans un an et demi', mais pas de promesses ni d'engagement".

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50 à 75%
Depuis la clôture de l'accès aux voitures suite aux travaux, la fréquentation du musée a rapidement chuté de 50 à 75%.

Et le constat est là: depuis la clôture de l'accès aux voitures, la fréquentation du musée a tout de suite chuté de 50 à 75%, rapporte-t-il. Or son modèle économique repose à plus de 50% sur les recettes du ticketing et à hauteur de 15% sur le crowdfunding, dont les opérations ont dû être annulées. Les 35% restants sont assurés par des subsides non structurels et des partenaires privés. "Privatiser le lieu est devenu impossible. Nos événements aussi ont dû tous être annulés. On ne sait plus exploiter le lieu".

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Le Mima n'est pas le seul à souffrir de la situation. Deux hôtels – le Belvue et le Meininger – forment avec le musée un pôle d'attractivité touristique aujourd'hui menacé, analyse Andreas Kountouriotis, directeur général du Meininger City Center. "Sans pouvoir encore chiffrer précisément notre manque à gagner, nous avons vu une chute de notre fréquentation depuis l'été. Rien qu'avec notre emplacement de parking, aujourd'hui inaccessible, nous avons déjà perdu 60.000 euros. Et vous imaginez les difficultés pour rejoindre notre lieu de travail et livrer la quantité de draps, de boissons et de produits d'entretien que requiert un hôtel de 750 lits... On peut invoquer le danger pour tout fermer, mais nous avons le droit de savoir ce qui se passe et d'avoir des perspectives. Or, ce n'est pas le cas."

Plus tôt dans l'année, des problèmes de stabilité ont aussi été constatés au quai Monnoyer, dans le Port de Bruxelles.
Plus tôt dans l'année, des problèmes de stabilité ont aussi été constatés au quai Monnoyer, dans le Port de Bruxelles. ©Nicolas Becquet

Comportement collectif

Inge Paemen, porte-parole de Bruxelles Mobilité, invoque effectivement le "risque trop grand d'effondrement" pour justifier la fermeture de la voirie tout en annonçant la pose d'un arrêt de bus pour les visiteurs du Mima et les clients des hôtels. "Nous sommes en pleine réflexion sur le sujet, en concertation avec la commune." Malgré plusieurs sollicitations, nous n'avons pas pu obtenir de réaction de Catherine Moureaux, bourgmestre PS de Molenbeek.

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"Je ne dis pas que 75% de nos visiteurs venaient en voiture au Mima, mais la fermeture de la rue a été le déclencheur d'un comportement collectif", conclut Raphaël Cruyt, amer. "Bien sûr, on peut encore venir à pied au Mima, mais on peut aussi aller à pied à Saint-Jacques de Compostelle."

Alice Gallery quitte le centre-ville de Bruxelles

Est-ce la fermeture du Mima qui a décidé Raphaël Cruyt et Alice Van den Abeele de déménager l'Alice Gallery, qu'ils ont également fondée, du centre-ville, à Ixelles, en lieu et place de la Galerie Baronian? "Ce n'est pas lié", précise Raphaël Cruyt. "C'est arrivé par hasard. Après 15 ans et 70 expositions, on avait envie de se renouveler. Mais il est vrai que la ville a changé. En 2005, quand on a ouvert, après les vernissages, on allait faire la fête au bar du Walvis. Maintenant, il y a des Walvis partout. Il y a désormais plusieurs pôles à Bruxelles et cela change forcément l'envie d'aller dans le centre-ville."

MIMA Museum euronews (Français)
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