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Pourquoi fusionner les 19 communes n'est pas une bonne idée

©BELGAIMAGE

Une étude flamande énumère une série d’arguments contre une fusion des communes bruxelloises. Ainsi, le maintien d’une concurrence entre les 19 entités locales comporte des avantages en termes de service à la population.

S’il existe des arguments pour fusionner les 19 communes bruxelloises, il y en a aussi qui plaident pour ne pas le faire. Et ces derniers l’emportent largement sur les premiers. L’affirmation a de quoi étonner, surtout qu’elle vient de la KU Leuven, alors que c’est en Flandre que les critiques à l’encontre de la gestion bruxelloise sont les plus virulentes. Pas plus tard qu’hier, le ministre de l’Intérieur Pieter De Crem a encore rappelé que la fusion des zones de police à Bruxelles constitue "un point de rupture pour le CD&V".

Vives, le service d’études économiques de la KU Leuven (l’équivalent de l’Ires à Louvain-la-Neuve), vient donc de publier une étude qui pèse le pour et le contre d’une fusion des 19 communes. L’étude a été rédigée par l’économiste Geert Jennes. Il avance quatre arguments qui plaident contre une fusion des 19 communes et 6 zones de police.

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Les "contre"

Le premier argument a trait à la très grande hétérogénéité du tissu bruxellois. "La gestion décentralisée incite les entités locales à fournir un service sur mesure pour les administrés", plaide Geert Jennes. Dans certaines communes plus pauvres, l’aide sociale sera considérée comme primordiale par les habitants, tandis que dans d’autres, plus nanties, les demandes traiteront davantage de la mobilité, de la propreté ou de l’aide aux personnes âgées, par exemple.

Un deuxième argument est que les économies d’échelle qui pourraient découler d'une fusion ont déjà été en grande partie exploitées. Pourquoi? Parce que les communes bruxelloises sont déjà des entités importantes. Schaerbeek, par exemple, compte 100.000 habitants. À l’échelle de la Belgique, c’est la taille d’une ville moyenne.

L’argument est renforcé par le constat que les communes bruxelloises ne dépensent pas plus que Gand et Anvers, par exemple. Les dépenses par habitant sont de 3.700 euros par an à Bruxelles et Anvers et de 4.200 euros à Gand.

Les communes bruxelloises ne dépensent pas plus que Gand et Anvers. Les dépenses par habitant sont de 3.700 euros par an à Bruxelles et Anvers et de 4.200 euros à Gand.

Geert Jennes
Economiste chez Vives (KU Leuven)

Un troisième argument est la nécessité de maintenir une certaine concurrence entre les 19 communes, afin de soutenir la qualité du service proposé. "La taille budgétaire limitée des entités locales bruxelloises suggère l’existence d’une concurrence interne qui pousse à limiter les dépenses, par crainte de voir certains habitants et entreprises migrer vers d’autres communes", souligne Geert Jennes.

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L’économiste avance enfin un dernier argument: si les 19 communes devaient fusionner, la pression fiscale dans les communes riches de l’Est et du Sud (Woluwe, Boitsfort, Uccle, Auderghem…) augmenterait, ce qui risquerait de provoquer un exode des classes moyennes vers la périphérie du Brabant flamand et du Brabant wallon.

Externalités négatives

Ce constat ne dispense toutefois pas d’améliorer le dispositif actuel, précise Geert Jennes. Le principal handicap de la gestion étalée sur 19 communes, ce sont les "externalités négatives". Lorsqu’une commune prend une mesure (en matière de mobilité ou d’aménagement du territoire par exemple), le risque est grand que cela ait un impact négatif sur les communes voisines, vu la compacité du tissu urbain bruxellois.

La solidarité financière entre les 19 communes bruxelloises laisse à désirer.

Geert Jennes
Economiste chez Vives

Pour y remédier, le chercheur recommande de redessiner les frontières communales de manière plus compacte. La Ville de Bruxelles s’étend tout en longueur jusqu’au Bois de la Cambre et présente ainsi des frontières extérieures très longues avec les communes voisines.

Il pointe du reste un problème de taille financière disproportionnée de Bruxelles Ville par rapport aux autres communes bruxelloises. La Ville tire en effet des recettes fiscales importantes du fait qu’elle héberge des sièges d’entreprises. "Une situation pour laquelle la Ville n’a aucun mérite", épingle Geert Jennes.

Trop peu de solidarité financière

À cet égard, il estime que la solidarité financière entre les communes bruxelloises laisse à désirer. En Flandre, le fonds des communes compense une bonne partie des dépenses supplémentaires que les villes de Gand et Anvers doivent consentir pour rencontrer les besoins liés à la pauvreté sur leur territoire.

À Bruxelles également, il existe un tel mécanisme de solidarité entre communes riches et communes pauvres. Mais d’après Geert Jennes, la compensation est nettement moins importante. "Le fonds des communes devrait être augmenté et les moyens mieux davantage répartis en fonction de critères liés à la pauvreté."


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