Nadine Khouzam, la fibre sociale de Facebook
Ils n’ont pas encore trente ans mais sont déjà des pointures dans leur domaine. Chaque samedi durant cinq semaines, L’Echo part à la rencontre de jeunes belges bourrés de talent. Rencontre ce samedi avec Nadine Khouzam, une jeune belge expatriée à Londres, aussi douée avec la fibre optique qu’un stick de hockey.
Ce n’est pas vraiment une surprise mais dans le style "entreprise branchée", les bureaux de Facebook à Londres sont probablement la référence. Avec 3.500 travailleurs à accueillir chaque jour, le réseau social s’étend sur trois sites. Celui choisi par Facebook pour une rencontre avec Nadine Khouzam, une jeune belge active au sein du groupe, occupe quatre étages d’un bâtiment ultramoderne. À l’intérieur, tous les éléments de la start-up sont là: une moyenne d’âge plus proche de l’adolescence que de la retraite, du mobilier aux formes et couleurs toujours plus improbables, sans oublier évidemment les espaces de détente version table de ping-pong et bar à bonbons.
Chez Facebook, on aime montrer qu’on est cool. Mais on peut aussi être très sérieux. De ce côté, cela débute dès l’entrée avec un solide agent de sécurité qui joue les escortes jusqu’à la réception avant de passer le relais à une responsable communication. L’accueil se veut chaleureux mais interdiction de se déplacer dans le bâtiment sans elle et l’interview se fera en anglais. Et tant pis si l’interlocutrice du jour a grandi au plat pays. L’entretien durera trente minutes, pas plus. "L’efficacité est l’un des éléments les plus importants que j’ai appris chez Facebook, sourit Nadine Khouzam. Ici, la réunion de base dure trente minutes. Au-delà, c’est trop long. Les rencontres de deux heures, ça n’arrive pas. Ou alors ce sont des workshops où on parle de toute la stratégie avec l’équipe entière."
Connexion avec les pays émergents
"L’efficacité est l’un des éléments les plus importants que j’ai appris chez Facebook."
Nadine Khouzam est l’une des rares Belges à aujourd’hui arpenter tous les jours le bâtiment. En fonction depuis un an et demi, "Nadine est analytics manager" au sein de "l’infrastructure connectivity program". Traduit en langage commun, son job consiste à assurer le développement de la connectivité dans les pays émergents, via notamment l’implantation de la fibre optique en collaboration avec les acteurs télécoms locaux. "Pour beaucoup de gens, Facebook ce n’est qu’un réseau social mais il y a énormément d’autres activités beaucoup moins connues", explique-t-elle.
Son emploi du temps se partage donc entre son bureau londonien, des meetings réguliers chez ses collègues californiens et l’implantation concrète de ses projets sur le terrain, principalement en Afrique subsaharienne. "Durant les prochaines semaines, j’ai déjà deux voyages prévus en Californie, un en Zambie et un au Nigeria", explique la jeune ingénieur. Facebook fait donc aussi du social. "C’est ce qui me motivait à venir. J’aime aussi beaucoup l’ambiance de travail et l’inclusion mise en place dans l’entreprise. Dans mon équipe, le profil minoritaire c’est celui de l’homme blanc américain. Il y a énormément de nationalités et un bon équilibre hommes-femmes", glisse encore Nadine.
Profil
- Âge: 29 ans
- Formation: Diplôme d’ingénieur informatique à Polytechnique.
- Fonction: Analytics manager chez Facebook et fondatrice de CodeNPlay.
- Plus beau succès: Qualification pour les JO de Londres en 2012 comme gardienne de l’équipe nationale de hockey.
Son job dont elle parle avec un large sourire, lui a été apporté sur un plateau par Facebook. "Ils sont venus me chercher après une rencontre avec l’un de mes anciens collègues", explique Nadine. Elle n’est toutefois certainement pas là par hasard. À 29 ans, elle a déjà quelques jolies références. La première s’est écrite au sein de la scale-up bruxelloise Riaktr. Nadine Khouzam y a été l’une des premières engagées par les deux fondateurs. "J’ai du coup vécu toute l’évolution. Je suis devenue responsable d’un département avant de reprendre le suivi de Proximus qui était notre plus grand client européen", ajoute-t-elle encore. Mais après cinq ans et une croissance qui a explosé, elle décide de partir à la recherche d’un autre challenge.
L’ingénieur lance alors CodeNplay sa "start-up sociale" comme elle l’appelle. Un projet sans but lucratif qui s’attaque à un chantier que le service public n’ose pas encore prendre tout à fait à bras-le-corps: l’enseignement du codage. "C’est pourtant une compétence essentielle que tout le monde devrait acquérir", glisse-t-elle. Pour cela, elle attaque le problème à la base en se focalisant directement sur les plus jeunes. "On propose une initiation au codage à partir de six ans en partenariat avec les écoles. On forme les enfants mais aussi les professeurs et bientôt les étudiants-professeurs", explique encore la responsable.
En seulement deux ans, son projet a pris de l’ampleur. Six personnes travaillent désormais à temps plein pour CodeNPlay, 800 élèves ont déjà été formés dans une vingtaine d’écoles à Charleroi et Bruxelles. L’ambition est sociale. Nadine s’est donc entourée de divers soutiens. Sa start-up est hébergée dans le campus digital de BeCentral, elle reçoit une aide publique et des investissements de Google. L’histoire se dessine bien. Et continue.
Malgré son activité chez Facebook, débutée seulement quelques mois après sa start-up, Nadine n’a en effet jamais renoncé à son projet social. Il continue d’ailleurs à prendre de l’ampleur. La jeune ingénieur mène donc deux vies professionnelles à temps plein. "On m’a dit quand j’ai été engagée que je devrais nécessairement lâcher CodeNPlay. Cela semble effectivement le plus simple. Mais c’est le genre de remarque qui me pousse à vouloir prouver le contraire", sourit-elle. Sa vie se partage donc entre Londres et Bruxelles, quand elle trouve du temps pour y rentrer. "Je travaille du coup beaucoup sur CodeNPlay d’ici. Chez Facebook, on est jugés sur nos résultats et pas sur le temps passé au bureau. Cela me laisse l’opportunité de m’organiser."
Entre auditoire et JO
Mais Nadine n’est certainement pas du genre à se plaindre de son agenda qui déborde. Sa vie a toujours été organisée comme ça. Malgré cet emploi du temps qui sent bon le travail et les heures passées devant un ordinateur, Nadine Khouzam est également une athlète. Elle aura d’ailleurs très certainement un œil attentif sur les résultats de ses anciennes coéquipières lors de la Coupe d’Europe de hockey. Dès ses 16 ans et pendant près d’une décennie, elle a défendu les cages des Red Panthers. Son palmarès affiche notamment un stick d’or, soit le titre de meilleure joueuse de Belgique, ainsi qu’une qualification et une participation aux Jeux olympiques de Londres en 2012. Le tout mené en même temps que ses années d’étude en ingénieur informatique à Polytechnique. "Là aussi, quand j’ai commencé on me disait que cela serait impossible de poursuivre ces deux vies en même temps. À la fin, nous avions neuf entraînements par semaine et nous étions en moyenne quatre mois par an à l’étranger pour le hockey", explique-t-elle.
Elle sortira finalement de ses cinq années d’études sans le moindre accro avec une grande distinction et pas une seule seconde session.
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