Le rez avec jardin a la cote
Cet été confiné et anormalement chaud aura-t-il un impact durable sur le logement? Les professionnels du marché résidentiel révèlent des tendances qui dépassent les caricatures.
Ces derniers mois, une rumeur a grossi à la terrasse du café du commerce, progressivement repeuplé avec ou sans masque. Les Belges se rueraient sur les logements avec jardin; une ruée souvent couplée à l’obligation de déserter la ville pour trouver offre à prix abordable. Si l’hypothèse semble réaliste, un rapide tour du marché montre que formulée ainsi, elle est excessive et trop simpliste. Explications.
1. De la verdure à proximité et une vraie terrasse
Ce qui transpire nettement auprès des professionnels interrogés, c’est que les appartements neufs avec de vraies terrasses, des jardins privatifs communs ou des espaces verts publics à proximité sont davantage recherchés aujourd’hui qu’hier. Et la donne vaut autant dans les villes wallonnes que dans la capitale. "On développe déjà depuis longtemps des quartiers avec espaces verts privés, tant pour les maisons individuelles que pour les appartements. Et c’est vrai que ce type de produits a vraiment la cote aujourd’hui", résume Régis Ortmans, directeur chez Matexi pour les provinces de Liège, Namur et Luxembourg.
Christophe Nihon, gérant de Promactif Groupe, qui développe actuellement au centre de Liège une résidence (appartements) adaptée aux personnes à mobilité réduite, fait le même constat: "Les acheteurs veulent de vraies terrasses. Et comme les nôtres sont prévues larges et de plain-pied (PMR), cela tombe particulièrement bien."
Même son de cloche dans les communes bruxelloises les plus cossues, terrain de chasse de l’agence Latour & Petit. Selon le patron, on y note clairement une tendance liée à la conjonction des facteurs "confinement + canicule". "D’habitude, dans les projets neufs où des dizaines – voire des centaines – d’appartements sont mis conjointement en vente, les rez de jardin sont souvent les biens qui partent en dernier lieu. Aujourd’hui, sur certaines commercialisations, c’est le contraire. Et on s’en réjouit! On le constate notamment sur la dernière phase en date (71 appartements de 1 à 4 chambres) du nouveau quartier résidentiel Greenwood, que nous commercialisons pour l’instant à Woluwe-Saint-Lambert pour le compte d’Eiffage. C’est flagrant. Et ce n’est pas le seul cas vécu", insiste Denis Latour, qui relève une autre constante croissante: la demande d’un espace modulable (chambre ou coin salon) permettant d'installer un bureau à domicile sans trop empiéter sur l’espace de vie privé.
2. Les banquiers au pilori
Du côté de Marche-en-Famenne et même de Namur, Pierre Closon, à la tête d’une florissante agence du réseau Trevi, ne note pas de tendance de fond de ce genre. Mais il faut dire que l’offre de logements avec jardin y est historiquement foisonnante. "Les acheteurs s’inquiètent d’avoir un parc à proximité ou une vraie terrasse, ça oui. Mais ce qui nous inquiète surtout pour l’instant dans notre métier au quotidien, c’est la frilosité accrue des banques, qui compliquent et postposent les transactions. Et je ne parle même plus des primo-acquéreurs, qui fondent comme neige sous la canicule sur le marché acquisitif. Même pour les investisseurs, dont nous gérons souvent les biens mis en location, la porte se rétrécit."
Un constat partagé par Denis Latour, à Bruxelles, qui trouve fort de café que les banques, plutôt que soutenir l’économie belge actuellement sur le flanc, en remettent une couche. "Mes collègues sont unanimes pour dire qu’il faut une rapide réaction pour remettre de l’huile dans les rouages", insiste-t-il.
3. Report de décision
Dans son pré carré waterlootois, Michel Dussart, d'Immo Dussart, s’excuse presque de ne pas noter de tendance de fond découlant du récent confinement ou de la canicule, ni sur le marché du neuf ni sur celui de la revente de biens. Mais il faut dire que là non plus, au cœur du Brabant wallon, on ne manque généralement pas d’offre avec jardin et/ou grande terrasse. Si toutefois on en a encore les moyens: lui aussi pointe du doigt, comme le faisait récemment avec virulence le patron du réseau Immotheker-Finotheker, John Romain, les habituels fournisseurs de crédits.
Il relève également un autre élément conjoncturel qui se généralise pour l’instant: "Lorsque nous diffusons un offre, nous avons énormément de marques d’intérêt de la part d’acheteurs potentiels. Mais très souvent, ceux-ci postposent le passage à l’acte d’achat en spéculant sur une baisse des prix d’ici la fin de l’année. Je pense pour ma part qu’ils se trompent, mais le résultat est là : le passage par la case ‘compromis’ est plus lent qu'avant la crise."
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