Frances Haugen met Facebook face à ses contradictions et pousse le Congrès à agir
Le Congrès a entendu mardi la lanceuse d'alerte Frances Haugen, qui a violemment chargé le réseau social. De son côté, Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, nie ces allégations.
L'audition de Frances Haugen, ancienne employée de Facebook se présentant comme une lanceuse d'alerte, a été l'occasion mardi pour les parlementaires américains de multiplier les attaques contre le réseau social, accusant son cofondateur et PDG Mark Zuckerberg de privilégier la recherche du profit au détriment du bien-être des utilisateurs.
Dans une rare unité bipartite entre Démocrates et Républicains, les élus du Congrès des États-Unis ont aussi exigé que les autorités de tutelle de Facebook enquêtent sur les accusations portées par Frances Haugen, selon laquelle les différentes messageries du groupe nuisent à la santé mentale des enfants et attisent les divisions au sein de la société.
Intervenant devant la sous-commission sénatoriale de la Protection des consommateurs et de la Sécurité des données au lendemain de la panne géante ayant affecté Facebook et ses messageries WhatsApp, Instagram et Messenger, Frances Haugen a déclaré que "pendant cinq heures, Facebook n'a pas pu être utilisé pour creuser les divisions, déstabiliser les démocraties et rendre les jeunes filles et les jeunes femmes mal dans leur peau".
Dans son propos introductif, le président de la sous-commission, le démocrate Richard Blumenthal, a affirmé que Facebook avait conscience du caractère addictif de ses produits, telles des cigarettes.
"Moment de vérité"
"Le secteur de la 'tech' connaît désormais son moment de vérité saisissant, comme celui qu'a connu l'industrie du tabac", a-t-il dit.
Il a invité Mark Zuckerberg à venir témoigner devant sa commission et a réclamé l'ouverture d'enquêtes de la part de la Securities and Exchange Commission (SEC), le "gendarme" de Wall Street, et de la Federal Trade Commission (FTC), la commission fédérale du commerce.
"Aujourd'hui, aucun régulateur n'a une liste toute prête de solutions pour régler les problèmes de Facebook, parce que Facebook n'a pas voulu qu'ils en sachent suffisamment sur les causes de ces problèmes."
"Les victimes, ce sont nos enfants. Les adolescents qui se regardent aujourd'hui dans un miroir ressentent des doutes et de l'insécurité. Mark Zuckerberg devrait se regarder dans un miroir", a insisté Richard Blumenthal, reprochant au CEO de Facebook de préférer faire de la voile plutôt que de se livrer à un tel exercice d'introspection.
Maintenir le secret sur le fonctionnement
Frances Haugen, ancienne cheffe de produit au sein de l'équipe travaillant sur la désinformation civique chez Facebook, a pour sa part, accusé le groupe de chercher à entretenir le secret sur son fonctionnement.
"Aujourd'hui, aucun régulateur n'a une liste toute prête de solutions pour régler les problèmes de Facebook, parce que Facebook n'a pas voulu qu'ils en sachent suffisamment sur les causes de ces problèmes. Sinon, il n'y aurait pas eu besoin d'une lanceuse d'alerte", a-t-elle dit, deux jours après être apparue pour la première fois en public en tant que lanceuse d'alerte sur CBS.
La sénatrice Marsha Blackburn, principale représentante des républicains au sein de la commission, a abondé dans ce sens: "Il est évident que Facebook accorde la priorité au profit sur le bien-être des enfants et de tous les utilisateurs."
Fuites dans la presse
Dans un courriel envoyé avant cette audition, Kevin McAlister, porte-parole de Facebook, a assuré que le groupe accordait davantage d'importance à la protection de ses utilisateurs qu'à la recherche du bénéfice. Il a ajouté qu'il était inexact d'affirmer que des notes internes ayant fuité auprès du grand public apportaient la preuve qu'Instagram est "toxique" pour les adolescentes.
Lors de son apparition dimanche sur CBS, Frances Haugen a révélé être la source des documents utilisés dans une enquête du Wall Street Journal et lors d'une audition au Sénat sur les conséquences de l'utilisation d'Instagram chez les adolescentes.
Les articles du Wall Street Journal ont montré que Facebook avait contribué à intensifier la polarisation des débats en ligne en modifiant son algorithme de contenus, s'était montré incapable de prendre les mesures suffisantes pour lutter contre le scepticisme à l'égard des vaccins, et avait conscience de la nocivité d'Instagram pour le bien-être mental des adolescentes.
Frances Haugen a aussi accusé Facebook de n'avoir quasiment rien entrepris pour empêcher des utilisateurs de se servir de ses réseaux pour organiser des actions violentes.
Des messages et des discussions sur Facebook ont ainsi précédé l'envahissement du Capitole, le 6 janvier à Washington, par des partisans de l'ancien président américain Donald Trump contestant sa défaite au scrutin de novembre face à Joe Biden.
Mark Zuckerberg a défendu son entreprise, mardi, face aux accusations de la lanceuse d'alerte Frances Haugen, qui a affirmé, devant le Congrès américain, que le géant des réseaux sociaux privilégiait ses profits au détriment de la sécurité.
"Au cœur de ces accusations réside l'idée que nous privilégions les profits plutôt que la sécurité et le bien-être. Ce n'est tout simplement pas vrai", a affirmé Mark Zuckerberg dans une longue publication sur sa page Facebook.
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