Google sera-t-il le dernier géant de la Tech à sabrer dans l'emploi?
Face à des perspectives économiques sombres, Google s'apprête à supprimer 12.000 de ses 187.000 emplois. L'entreprise signerait ainsi la plus grande réduction de postes de son histoire.
Les annonces de suppressions d'emplois dans les entreprises technologiques n'en finissent plus de pleuvoir. Selon le site spécialisé Layoffs.fyi, près de 194.000 salariés du secteur ont perdu leur emploi aux États-Unis depuis le début 2022. Google s'ajoute à la liste en allant bien plus loin que le simple gel des embauches annoncé l'été dernier. Selon un message interne, la filiale d'Alphabet prévoit, en effet, une réduction de 12.000 emplois, soit 6% de son effectif.
L'action Alphabet gagnait suite à cette annonce jusqu'à 1,8 % lors des échanges de pré-marché à New York. L'an dernier, elle a perdu environ 30% de sa valeur.
"Je suis responsable"
Sundar Pichai, le CEO de Google, dit prendre "l'entière responsabilité des décisions qui ont conduit l'entreprise ici". "Il s'agit d'un moment important pour recentrer notre attention, réorganiser notre base de coûts et orienter nos talents et notre capital vers nos priorités." Les observateurs soulignent toutefois la pression dont Google faisait l'objet de la part d'investisseurs afin d'adopter une stratégie plus agressive et moins dépensière.
Ces réductions affecteront toutes les unités et tous les marchés de l'organisation. En Belgique, 400 personnes travaillent au centre de données et 120 dans l'administratif. Pour l'heure, Michiel Sallaets, responsable de la communication, affirme ne pas pouvoir dire quel sera l'impact sur l'emploi.
Les salariés américains licenciés recevront une indemnité d'au moins 16 semaines et six mois de prestations de santé. Dans les autres pays, les indemnités varieront en fonction des lois et pratiques locales. Sundar Pichai précise que l'octroi des primes ne sera pas affecté.
Outre la baisse des revenus publicitaires, Google pâtit aussi de son retard dans le développement du cloud dominé par des Amazon ou Microsoft.
La fin de l'abondance
Microsoft a aussi annoncé cette semaine vouloir faire "plus avec moins de personnes". Quelque 10.000 emplois vont y passer à la trappe. Mais la vague de licenciements touche tous les géants technologiques américains: Amazon, Twitter, Meta, Snap... Des acteurs qui ont leurs faiblesses, rappelle Nicolas Van Zeebroeck, professeur d'économie digitale à la Solvay Business School .
Pour les Google, Facebook et Twitter, il pointe la dépendance à la publicité en ligne, qui, après avoir été dopée pendant le confinement dû à la pandémie, a réduit sa voilure.
Google avait toutefois mieux résisté grâce à son activité recherche, mais outre la baisse des revenus publicitaires, il pâtit aussi de son retard dans le développement du Cloud dominé par des Amazon ou Microsoft.
"Le bilan n'est donc pas totalement fini, mais avec les Gafa, le plus gros de l'impact devrait être derrière nous."
Pour Microsoft, Apple et Amazon, il souligne le recrutement à tour de bras opéré ces dernières années pour répondre à l'accélération digitale forcée des entreprises en période de crise sanitaire. "Pour satisfaire une croissance annuelle de 10 à 15%, Microsoft a eu besoin de davantage de personnel. Or avec la fin du confinement, on a vu l'emballement pour la transformation digitale se tasser avec notamment le retour au bureau des télétravailleurs. À cela s'ajoute la crise énergétique. Le tout provoque une croissance plus molle à un chiffre alors que l'entreprise a poursuivi son recrutement. Pour maintenir ses marges bénéficiaires, elle doit mettre le frein."
D'autres annonces à venir?
Avec l'annonce du jour, l'ensemble des Gafa semble avoir fait le point de sa situation. Néanmoins, Nicolas Van Zeebroeck n'exclut pas de voir d'autres acteurs technologiques moins visibles leur emboîter le pas. Il se veut aussi attentif au secteur du gaming. "Le bilan n'est donc pas totalement fini, mais avec les Gafa, le plus gros de l'impact devrait être derrière nous."
Ensuite, il reste le cas Meta. Le groupe reste vulnérable à cause de sa dépendance au système d'exploitation de Google et Apple. Et puis, il y a le métavers et les investissements colossaux qui ont été opérés sans aucune vue sur une éventuelle échéance de rentabilité.
"L'industrie européenne est fournisseur de l'industrie technologique américain. Un effet retard n'est donc pas exclu (...)."
Effet boule de neige
Les acteurs américains souffrent-ils plus que leurs homologues chinois ou européens? Certes, les Gafa ont peu d'équivalents mondiaux. Il y a bien les Alibaba & co chinois, mais la transparence sur leur état de santé est toute relative et leur intégration dans des conglomérats rend l'analyse plus compliquée.
Et en Europe? "Nous avons davantage en Europe des acteurs de niche, qui sont dans une situation différente. Nous avons aussi des entreprises qui tentent de concurrencer les grands acteurs américains, comme Odoo face à SAP, Oracle ou Microsoft. Ils n'ont pas connu une croissance de même ampleur et sont moins dépendants du marché."
Néanmoins, Nicolas Van Zeebroeck n'exclut pas un effet boule de neige de la situation des techs américaines à plus long terme. "L'industrie européenne est fournisseur de l'industrie technologique américain. Un effet retard n'est donc pas exclu, même si je ne l'anticipe pas de la même ampleur."
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