La Région de Bruxelles-Capitale a mis en ligne ce 1er janvier un site internet permettant aux locataires et aux bailleurs de connaître le montant indicatif de leur loyer selon la localisation du bien, sa superficie, son niveau de confort, etc. En répondant à six questions concernant le bien loué, les locataires peuvent ainsi savoir si le loyer demandé est correct, s'ils font une bonne affaire ou s'ils paient le prix fort. Bien sûr, les propriétaires sont encouragés de leur côté à utiliser et respecter la grille des loyers s'ils mettent un bien en location. Cette grille n'est toutefois qu'indicative. Elle n'est donc pas du tout contraignante.
Le Gouvernement a décidé de lancer une première phase-test de 6 mois de la grille et d’en réaliser une première évaluation par un consultant externe après ces premiers six mois.
Sur quelles données se base la grille ?
1. Les loyers indicatifs de référence s'appuient sur les données cumulées de trois Observatoires des Loyers (2012, 2013 et 2015), à savoir 8.400 enquêtes menées auprès de locataires différents. Ces données ont également été combinées avec des informations issues d'environ 170.000 certificats PEB. Il s'agit donc de loyers réellement pratiqués tels que communiqués par les locataires. Les 118 quartiers identifiés par le Monitoring des Quartiers ont été divisés en 7 groupes sur la base des loyers pratiqués. Toutes ces données ont été recoupées pour former une grille de laquelle ressortent les loyers indicatifs de référence selon divers critères.
2.Ces loyers indicatifs de référence sont majorés ou minorés par un montant forfaitaire selon des indicateurs de confort ou d'inconfort spécifiques au logement. Ces indicateurs ont été choisis sur la base de leur degré d'influence sur le loyer, de leur fiabilité statistique et de la facilité avec laquelle les parties peuvent les constater. Ainsi, un bonus est ajouté au loyer indicatif de référence lorsque le bien présente un bon niveau de performance énergétique ou lorsqu'il est loué avec une seconde salle de bain, un garage, un grenier ou une cave. De même, un malus diminue le loyer indicatif de référence lorsque le bien présente un mauvais niveau de performance énergétique ou lorsqu'il est loué en l'absence d'un système de chauffage central, d'outils de régulation thermique ou d'espaces récréatifs tels qu'un jardin, un balcon ou une terrasse.
3. Finalement, une marge de 10% est créée autour du loyer médian. Elle matérialise d'autres éléments pouvant influencer le loyer, tels qu'une cuisine équipée, une vue exceptionnelle, une architecture particulière, la présence extérieure d'équipements collectifs ayant une influence positive ou négative sur le quartier, etc.
Deux exemples
Nous avons testé la grille des loyers pour deux appartements.
- Un appartement de deux chambres, de 90m2, construit avant 2000, PEB D, avec un garage situé dans le quartier de la Chasse à Etterbeek, devrait idéalement se louer entre 841 et 1012 euros par mois, soit entre 9,34 et 11,24 euros par m2.
- Un studio de 45 m2, construit avant 2000 PEB C, situé dans le quartier européen devrait se louer entre 585 et 711 euros par mois, soit entre 13 et 15,8 euros par m2.
Pas d'encadrement des loyers
La grille des loyers bruxelloise n'a aucun caractère contraignant. Elle est purement informative. Pour Céline Frémault, la ministre bruxelloise du Logement, plusieurs raisons ont guidé ce choix.
"Un grand nombre de bailleurs sont en réalité des propriétaires qui se comportent en bon père de famille et pour lesquels l'investissement se fait dans une vision à long terme, notamment sur base d'emprunts hypothécaires. Il s’agit également d’avoir égard à cette réalité. De nombreux économistes ont par ailleurs critiqué le blocage des loyers, la jugeant contre-productive. Les principaux arguments évoqués sont l’absence d’impact sur le phénomène d’exclusion et le risque de désinvestissement dans le logement, tant au niveau de la construction qu’au niveau de l’entretien de celui-ci. Or, la hausse du coût de l’immobilier actuellement constatée est en partie due à la pénurie de logements", affirme-t-elle dans une note.
- La barémisation des loyers est pratiquée dans différents pays dont la France mais de manière ciblée. Force est de constater toutefois, que le texte est jugé problématique. Un bon nombre de recours introduits contre cette loi viennent de connaître un épilogue positif pour les plaignants
- En Suède, la législation a été critiquée par la Commission qui la jugée contraire à la libre concurrence. Celle-ci a été par conséquent assouplie en 2011.
- En ce qui concerne le Portugal et les Pays-Bas, le système semble avoir eu un impact sur l’investissement privé dans le secteur locatif. A propos des Pays-Bas, l’OCDE a d’ailleurs, en 2010, plaidé pour l’abandon partiel et progressif de la mesure.
"Compte-tenu de ce qui précède, je privilégie donc la voie incitative en vue de la modération des loyers. Au-delà de l’aspect informatif, il n’est pas exclu que ce type de grille puisse à terme être utilisée pour d’autres politiques tels que la mise en place d’incitants fiscaux, etc.", conclut-elle.