Le Conseil des ministres a approuvé (le 20 juillet dernier) un avant-projet de loi visant à permettre à tous les travailleurs salariés de se constituer une pension libre complémentaire (PLCS) dans le cadre de leur relation de travail. Un complément modulable en fonction de ce que le salarié se constituerait déjà comme pension complémentaire. En effet, si actuellement quelque 30% des salariés n’ont pas encore accès au deuxième pilier parce que leur employeur ne leur propose pas de pension, de nombreux autres ne cotisent dans ce cadre qu’un montant bien trop faible pour être utile et suffisant le jour venu.
Le ministre des Pensions, Daniel Bacquelaine a salué dans un communiqué "une nouvelle étape vers la généralisation des pensions complémentaires. Tous les travailleurs salariés pourront désormais se garantir la constitution d’une pension complémentaire d’un niveau au moins égal à 3% de leur rémunération."
Sur base volontaire
L’objectif est donc de permettre à ceux qui le souhaitent de se constituer sur base volontaire une pension complémentaire digne de ce nom dans le cadre de leur activité professionnelle, via des retenues salariales effectuées par l’employeur.
Le travailleur déterminera lui-même librement le montant de ses contributions qui seront versées à l’organisme de pension de son choix.
Limites et calculs
Il n’y a pas de montant minimum. En revanche, ces contributions sont limitées à 1.600 euros par an ou à 3% de la rémunération brute annuelle - si ce pourcentage aboutit à un montant supérieur – après déduction des éventuels droits de pension déjà constitués au cours de la période de référence dans le deuxième pilier en tant que salarié.
"La limite fixée à 3% du salaire de référence peut-être adaptée par arrêté royal", note la ligne d'infos juridiques Lexalert.
Les avantages fiscaux seront identiques à ceux applicables aux régimes de pension complémentaire instaurés par les employeurs.
"Pour calculer sa contribution annuelle maximale, le travailleur devra donc se baser sur son salaire de référence d’une part et sur sa constitution de droits de pension complémentaire d’autre part, souligne Lexalert. Mais vu que les réserves de pension au 1er janvier d’une année ne sont connues qu’à la fin de cette même année par le travailleur, la période de référence est l’année N-2 (par rapport à une année de constitution N) tant pour les droits de pension complémentaire que pour le salaire."
Effets indésirables de l'année de référence
Pour Corinne Merla, avocate chez Younity et spécialisée dans les pensions, s'il est "compréhensible que l'année de référence soit N-2 vu le délai nécessaire pour alimenter DB2P (la banque de données des pensions complémentaires, ndlr) au sujet des droits de pension constitués, ce décalage de deux ans peut néanmoins avoir des effets indésirables."
"Ce système pénalise les salariés qui n'ont pas de pension complémentaire et voudraient profiter d'une belle augmentation (ex: un bonus) durant l'année N pour verser une contribution. Les 3% vont en effet être calculés sur une rémunération inférieure, celle de N-2, observe la spécialiste. A l'inverse, un salarié qui voit sa rémunération diminuer en année N disposera d'un budget autorisé de 3% dont il ne pourra sans doute pas tirer totalement parti." Enfin poursuit-elle, "quid de celui qui en N-2 se constituait une pension complémentaire via son employeur et qui après l'avoir quitté, n'en constitue plus en année N? Il verra son budget autorisé de 3% raboté par une pension complémentaire qu'il ne se constitue plus l'année où il peut/veut verser une contribution. Ou le cas inverse où un salarié aura le budget autorisé 'plein pot' car il n'avait pas de pension complémentaire en N-2 mais en a un en année N?"
Et la règle des 80%?
Me Corinne Merla attend également une clarification au sujet de la règle des 80% en vertu de laquelle la somme de la pension légale et la pension complémentaire ne peut représenter plus de 80% du dernier salaire. Au-delà, les cotisations (employeur et employé) versées dans l’assurance groupe ou le fonds de pension ne sont plus déductibles fiscalement.
"Ces versements PLCS entreront-ils bien en ligne de compte pour les 80%? Sinon comment les employeurs arriveront-ils à gérer ce système, s'interroge-t-elle? Ils risquent en effet de perdre la déductibilité d'une partie de leurs contributions en fonction des initiatives personnelles de certains. Même chose pour la gestion par les organismes de pensions: la complexité des calculs et des vérifications du respect de la limite des 80% va augmenter."