Édito | Face aux imprévus, notre pays n'est pas prêt

Rédacteur en chef adjoint

L'envolée des coûts de l'île énergétique nous montre combien nous sommes peu préparés face aux déconvenues. Pourtant, d'autres cygnes noirs voguent à l'horizon.

Dire que notre État est désargenté tient de la lapalissade. Ce qui l'est moins, c'est de voir, outre notre incurie budgétaire, combien certaines décisions politiques peuvent ouvrir sous nos pieds de véritables gouffres financiers si ces mesures ne sont pas correctement calibrées. C'est ce que nous apprend cette semaine le dérapage potentiel du budget prévu pour la construction de l'île énergétique au large de nos côtes.

De 2,2 milliards d'euros, il apparaît que l'ardoise pourrait atteindre 7 milliards d'euros, soit plus d'un triplement du budget original. Une explosion des coûts qui fait jaillir d'autres interrogations. Que deviennent les projets de Ventilus et de la Boucle du Hainaut censés ramener les électrons sur la terre ferme et les répartir sur le territoire? Et quel en sera désormais le coût?

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Même inquiétude sur la facture finale du démantèlement des centrales nucléaires dont, rappelons-le, l'État a repris la gestion des mains d'Engie. Une facture estimée à 60 milliards actuellement répartis sur plusieurs décennies. Au vu de la flambée des coûts, la Belgique gardera-t-elle le cap de son plan de financement?

Rien que pour nos infrastructures énergétiques, la pression financière sur les deniers publics est et restera colossale, voire en constante augmentation. Un constat qu'il nous faudra appliquer à nos autres enjeux, rabâchés ad nauseam, comme le vieillissement de la population, la décarbonation de nos industries, de notre bâti, et, préoccupation récente mais non moins onéreuse, nos engagements militaires.

Des inquiétudes qui doivent figurer tout en haut de la liste des discussions politiques.

Saut dans le vide

Il est en effet de notre responsabilité de dégager des marges budgétaires pour affronter l'inconnu. De ne plus nous limiter, comme on a pu le voir en Région wallonne, à des mesures à la marge, à du fine tuning comptable, à des techniques de la râpe à fromage, où chaque département promet la bouche en cœur de réduire un peu son train de vie.

Face à nos défis dantesques, voire existentiels, cette stratégie des petits pas, pire, cette politique des totems nous pousse vers l'abîme en ce qu'elle défaille devant les imprévus financiers comme ceux de l'île énergétique.

Ni à des mesures idéologiques comme cette suppression, sous prétexte de rationalisation, de l'agence de commerce extérieur agitée par le formateur fédéral au profit des agences régionales. Et ce, à l'heure où la diplomatie économique est plus importante que jamais pour notre économie ouverte à tous les vents (allez parler de la Wallonie à Pékin, vous verrez leurs regards interrogateurs).

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Face à nos défis dantesques, voire existentiels, cette stratégie des petits pas, pire, cette politique des totems nous pousse vers l'abîme en ce qu'elle défaille devant les imprévus financiers comme ceux de l'île énergétique. Un saut dans le vide que guettent les agences de notation financière. Elles n'ont en tout cas, pour l'heure, aucune raison de relâcher la pression.

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