Clément Delépine: "À la Ville, on a compris que la marque Art Basel est au service de Paris"
Clément Delépine, directeur d'Art Basel Paris, revient sur la réintégration de la foire au Grand Palais, la place de Paris sur le marché de l'art et l'offre spécifique qui le distingue.
Après avoir vécu à Bâle et à New York, Clément Delépine est revenu à Paris où il a codirigé Paris Internationale, foire dédiée aux arts émergents, entre 2016 et 2021, avant d'être nommé à la tête de Paris+ by Art Basel, en 2022, aujourd’hui rebaptisée Art Basel Paris. Nous l'avons rencontré, mercredi, à l'ouverture de la foire…
Qu'apporte le nouvel écrin du Grand Palais à Art Basel Paris?
Il y a un gain de taille considérable puisque nous sommes passés à 195 exposants: 41 galeries de plus que lors de l'édition 2023 au Grand Palais Éphémère. Cela modifie complètement la nature d'un événement de cette taille, qu'il a fallu repenser tant du point de vue du contexte que du concept. La rénovation a permis, par exemple, de rouvrir la circulation des balcons et d'y présenter de jeunes galeries en les rendant visibles depuis la nef. Nous avons pu aussi rajouter "Premise", un espace curatorial au sein de la foire qui fait la part belle aux récits, aux histoires que racontent les galeries.
En 2022, la Réunion des musées nationaux-Grand Palais a évincé RX, l'opérateur historique de la Foire internationale d'art contemporain (Fiac), au profit du groupe suisse MCH, qui pilote la Foire d’art contemporain de Bâle et ses deux pendants, Art Basel Miami et Art Basel Hong Kong. Qu'apporte la marque Art Basel, utilisée cette année de plein droit par la succursale parisienne?
La demande de rebaptiser "Paris+ by Art Basel" en "Art Basel Paris" est initialement venue des galeries. Art Basel est un label d'excellence et elles ne voulaient pas que Paris+ soit perçue comme autre chose qu'une foire Art Basel de plein droit. On a ensuite poursuivi la discussion au ministère de la Culture et à la Ville de Paris, qui nous ont soutenus et accompagnés dans cette démarche. À la Ville, on a compris que la marque Art Basel est puissante et globale, et qu'elle est au service de Paris, à la condition qu'elle puisse se déployer et rayonner.
"Avec notre retour au Grand Palais, il y a un gain de taille considérable puisque nous sommes passés à 195 exposants: 41 galeries de plus que lors de l’édition 2023."
L'attractivité de Paris, avec son offre d'expositions, d'hôtels et de restaurants prisée par la clientèle internationale, ne risque-t-elle pas de faire de la concurrence à la maison mère de Bâle?
Je ne le pense pas. Nous avons cent galeries de moins qu'à Bâle, où toute la ville est en syntonie avec la foire. Mais nous nous adressons au même public: l'enjeu pour nous est de proposer quelque chose qui nous distingue, comme notre section thématique "Premise", "Émergence" et ses jeunes galeries, et le fait qu'un tiers de nos galeries soient françaises.
Frieze London, du groupe concurrent d'Art Basel, se tenait la semaine passée à Londres. Le Brexit profite-t-il au marché français?
La France est le 4e marché mondial de l'art, avec 7 à 8% de parts de marché. 50% des transactions dans l'Union européenne se font en France, c'est considérable. Mais le Royaume-Uni campe sur la 3e place du podium avec 16 à 17% de parts de marché (derrière les États-Unis et la Chine, NDLR). J'étais à Frieze, la semaine passée, et il semble que les ventes aient été bonnes. On coexiste. Le marché peut absorber tout cela à condition, à nouveau, d'avoir des propositions distinctes et spécifiques.
"Nous traversons deux guerres très médiatisées, on sort à peine d’un climat inflationniste, mais les signes sont plutôt encourageants…"
En 2023, le marché de l'art s'est contracté de 4% en valeur au niveau mondial. Qu'espérez-vous des ventes d'Art Basel Paris?
Cette année, les chiffres de ventes n'étaient pas bons au printemps, mais ils ont été meilleurs à l'automne. Nous traversons deux guerres très médiatisées, on sort à peine d'un climat inflationniste, mais les signes sont plutôt encourageants…
Que pensez-vous de la nouvelle tendance des "foires boutiques", comme Art Athina, la Sofia Art Fair, Particolare ou Parallel à Vienne, qui prennent le contrepied de la course au gigantisme d'Art Basel et de Frieze en proposant des lieux plus intimes et exclusifs, des sélections d'œuvres plus resserrées et des performances pour enrichir l'accrochage?
Je le vois d'un bon œil. C'est d'ailleurs de là que je viens. Avant de diriger Art Basel Paris, je co-dirigeais Paris Internationale (qui se tient à Paris au même moment qu'Art Basel Paris, NDLR), une foire qui fête ses 10 ans, itinérante, qui se destine aux jeunes galeries et à l'art émergent, extrêmement agile et libre dans son format. Il y a une interdépendance dans le champ de l'art. Je suis heureux que Paris puisse accueillir les deux.
FOIRE D'ART
Art Basel Paris
Art contemporain, émergent, d'après-guerre et moderne
Commissaire: Clément Delépine
Du 18 au 20 octobre 2024
3 avenue du Général Eisenhower - 75008 Paris. Accès Métro: Franklin-Roosevelt ou Champs-Élysées-Clemenceau
Note de L'Echo:
- Art Basel et Paris, l'alliance du fer et du verre au Grand Palais
Du 18 au 20 octobre, la foire Art Basel Paris réintègre le Grand Palais avec 41 galeries de plus qu'en 2023. Un écrin sublime pour 195 marchands venus proposer un siècle d'art... Très peu de déchets, mais trop peu de prises de risque. - Clément Delépine: "À la Ville, on a compris que la marque Art Basel est au service de Paris"
Clément Delépine, directeur d'Art Basel Paris, revient sur la réintégration de la foire au Grand Palais, la place de Paris sur le marché de l'art et l'offre spécifique qui le distingue. - "Arte Povera" à la Bourse de Commerce: la réalité libérée
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