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L'Europe renforce son soutien à l'Ukraine et décide de se réarmer en cinq ans

Le chancelier allemand Olaf Scholz, le premier ministre belge Bart De Wever, la Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Kaja Kallas, le premier ministre luxembourgeois Luc Frieden et le chancelier fédéral autrichien Christian Stocker, lors du sommet européen, à Bruxelles, ce jeudi 20 mars 2025. ©BELGA

Les dirigeants de l'UE ont décidé de poursuivre leur aide militaire à l'Ukraine en contournant le veto de la Hongrie. Ils ont aussi décidé de réarmer l'Europe pour répondre à la menace russe et au désinvestissement américain.

Ukraine, défense, compétitivité, Moyen-Orient, migration… Les sujets se bousculaient sur la table des 27 dirigeants de l'Union européenne (UE) réunis jeudi à Bruxelles pour leur traditionnel sommet de printemps. Face à la menace russe et au désintérêt croissant des États-Unis pour la sécurité du Vieux continent, l'Europe a décidé de poursuivre son aide militaire à Kiev et de lancer le programme de réarmement le plus ambitieux de son histoire pour être capable de se défendre seule d'ici à 2030.

"Il me semble qu'on est loin de négociations."

Bart De Wever
Premier ministre belge

"Pas de réelles négociations de paix"

Les Vingt-Sept ont échangé par vidéoconférence avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui les a informés sur les négociations en cours avec les États-Unis et la Russie. Il a détaillé son dernier appel avec Donald Trump sur l'accord de cessez-le-feu partiel.

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Le dirigeant ukrainien a dénoncé la dernière attaque massive de drones russes contre l'Ukraine, en affirmant que malgré les promesses de Poutine, "rien n'a changé". Il a aussi réclamé le maintien des sanctions contre la Russie.

"L'opinion générale dans la salle est qu'il n'y a pas de réelles négociations de paix en ce moment", a confié une source proche des discussions.

"Il me semble qu'on est loin de négociations", a confirmé le Premier ministre belge Bart De Wever (N-VA), "je suis un politicien belge, et je connais la différence entre parler et négocier."

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L'éléphant dans la pièce était l'incapacité de l'Europe à s'imposer à la table des négociations. Washington et Moscou sont résolus à mener le jeu à deux, comme du temps de la guerre froide. Si l'UE n'est pas invitée aux négociations, "elle n'acceptera pas forcément les résultats", a averti un diplomate européen.

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Certains dirigeants n'ont pas mâché leurs mots. "L'Europe ne doit pas accepter qu'un homme à Moscou définisse l'avenir de l'UE ou de l'Otan", a martelé la première ministre danoise Mette Frederiksen.

Après la rencontre, le président français Emmanuel Macron annoncé la tenue d'un sommet de la "coalition des volontaires" le 27 mars à Paris avec Volodymyr Zelensky et des alliés de Kiev. La Belgique pourrait y participer. "S'il m'invite, je serai là", a dit De Wever, en ajoutant qu'il avait plaidé pour "plus de structure dans cette coalition".

"Pour les prochains mois, on adoptera les textes sur l'Ukraine à 26. Il faut banaliser l'opposition à Orban, et ne pas en faire une star."

Un diplomate

Une coalition à 26 pour soutenir l'Ukraine

Après avoir écouté Zelensky, les dirigeants européens se sont entretenu deux heures sur l'Ukraine. Ils ont réaffirmé leur volonté de soutenir l'Ukraine, dans une déclaration adoptée à vingt-six pour contourner le veto du Premier ministre hongrois Viktor Orban.

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Dans ce texte, les Européens ont convenu de maintenir les actifs russes gelés jusqu'à la fin de l'agression russe en Ukraine, la majorité de ces avoirs étant logés dans la société belge Euroclear.

Lors de la discussion, plusieurs États membres ont insisté sur la nécessité d'accélérer l'adhésion de l'Ukraine à l'UE.

Orban est apparu isolé. "Pour les prochains mois, on adoptera les textes sur l'Ukraine à 26", prédit un diplomate, "c'est la Hongrie qui est sortie du processus. On ne va pas passer la soirée à en discuter. Il faut banaliser l'opposition à Orban, et ne pas en faire une star".

Le premier ministre hongrois Viktor Orban, lors du sommet européen, à Bruxelles, le 20 mars 2025.
Le premier ministre hongrois Viktor Orban, lors du sommet européen, à Bruxelles, le 20 mars 2025. ©AFP

"Certains États membres sont frustrés que Kaja Kallas ne les ait pas consultés avant de mettre sa proposition sur la table."

Un diplomate européen

Le plan Kallas torpillé

L'Europe poursuivra son aide militaire à Kiev, mais elle n'a pu s'accorder sur le plan à 40 milliards d'euros proposé par Kaja Kallas, la Haute représentante de l'UE pour les affaires étrangères et à la politique de sécurité.

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L'Estonienne proposait de répartir l'effort entre les 27 États européens selon leur revenu national brut. Cette clé de répartition avait pour but d'impliquer davantage les grandes économies, alors que les petits États, comme les pays baltes, dépensent plus que d'autres pour l'Ukraine.

Au moins six pays, dont la France, l'Italie et la Slovaquie, ont critiqué la méthode. "Certains États membres sont frustrés que Kaja Kallas ne les ait pas consultés avant de mettre sa proposition sur la table", décode un diplomate européen.

La cheffe de la diplomatie européenne est revenue, jeudi, avec une nouvelle proposition, plus dépouillée: une aide de cinq milliards d'euros pour acheter 2 millions d'obus à l'Ukraine. Lors de la vidéoconférence, Zelensky a poussé les Vingt-Sept à accepter. En vain. Paris et Rome ont bloqué la décision.

"On va aider l'Ukraine, mais la priorité n'est pas de donner des chiffres. Il faut regarder ses besoins et mettre cela en cohérence", résume un autre diplomate.

Derrière cette réticence se trouve aussi un impératif économique. Les Européens projettent des investissements massifs en défense, et les pays affrontant des difficultés budgétaires rechignent à chiffrer leur aide par avance.

La présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, et le président du Conseil européen, Antonio Costa, lors du sommet européen, à Bruxelles, le 20 mars 2025.
La présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, et le président du Conseil européen, Antonio Costa, lors du sommet européen, à Bruxelles, le 20 mars 2025. ©AFP
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"Si les États-Unis nous lâchaient demain, l'Europe aurait des faiblesses pour se défendre."

Un diplomate européen

L'Europe veut devenir une superpuissance militaire

Plus tard dans la soirée, les Vingt-Sept ont approuvé le "paquet défense", proposé par la Commission européenne. Cet ensemble de mesures, chapeauté par le livre blanc sur la défense, comporte un emprunt Safe à 150 milliards d'euros, l'activation de clauses nationales dérogatoires au Pacte de stabilité jusqu'à 650 milliards, la réorientation des fonds de cohésion vers des dépenses militaires et un rôle accru de la Banque européenne d'investissement (BEI) en défense.

Ce plan à 800 milliards d'euros traduit la volonté de l'UE, une des premières puissances économiques du monde, de devenir d'ici à cinq ans une superpuissance militaire. L'ambition est forte, d'autant plus que les services de renseignements danois et allemands avertissent d'une menace russe dans trois à cinq ans. Même les pays "frugaux", comme les Pays-Bas, généralement opposés à de nouvelles dépenses, se rallient.

"Si les États-Unis nous lâchaient demain, l'Europe aurait des faiblesses pour se défendre. C'est justement pour cela que nous devons accélérer le réarmement", explique un diplomate européen.

Certains pays voudraient assortir l'emprunt Safe de conditions plus strictes. D'autres, comme la Grèce, voudraient une politique plus ambitieuse.

Achats communs

L'emprunt Safe permettra à deux ou plusieurs États européens de réaliser des achats communs, dont 65% devront avoir lieu sur le marché européen. Ces contrats pourront être élargis à des partenaires de l'UE, comme la Norvège et l'Ukraine. D'autres pays tiers, comme Royaume-Uni, le Canada ou la Turquie, pourront rejoindre l'initiative pour autant qu'ils concluent un partenariat de défense avec l'UE.

Mais les modalités de cette révolution copernicienne ne sont pas toutes fixées. Certains pays voudraient assortir l'emprunt de conditions plus strictes. D'autres, comme la Grèce, veulent aller plus loin.

La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, propose d'utiliser l'exécutif européen comme centrale d'achat du matériel militaire, comme pour les vaccins lors de la pandémie. Par contre, Kaja Kallas estime que ce rôle est déjà rempli par l'Agence européenne de défense. La question doit encore être tranchée. Mais pour l'instant, le débat n'est pas là. "Le sujet du livre blanc, c'est renforcer la base industrielle de défense, et non réformer l'architecture institutionnelle", confie un haut fonctionnaire.

Dossier | Guerre en Ukraine

Dossier spécial sur la guerre en Ukraine, lancée le 24 février 2022 par Vladimir Poutine: toute l'actu et les dernières infos sur le conflit armé entre l'Ukraine et la Russie.

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