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Les trois scénarios économiques de la guerre au Proche-Orient

En cas de confrontation directe entre Israël et l'Iran, Bloomberg Economics pense que le cours du Brent pourrait s'envoler jusqu'à 150 dollars.

À ce stade, la guerre en Israël et en Palestine n'a pas d'impact réel sur le marché pétrolier. Mais une confrontation directe avec l'Iran changerait complètement la donne.

Sommes-nous à l’aube d’un nouveau choc pétrolier? Si la guerre au Proche-Orient a provoqué un regain de nervosité sur les marchés financiers, les investisseurs semblent avoir encore de l'appétit pour le risque. Depuis l’attaque surprise du Hamas au cours du week-end des 7 et 8 octobre, l’indice MSCI All Country World – qui mesure la performance des actions mondiales – a gagné 1,5%, tandis que les rendements obligataires flirtent avec leur plus haut niveau de l’année.

Une classe d’actifs concentre néanmoins les inquiétudes liées à ce nouveau conflit armé: les prix de l’énergie. Le baril de Brent de la mer du Nord se négocie désormais au-dessus de 92 dollars, contre un peu moins de 85 dollars avant le début des hostilités. Son équivalent américain, le West Texas Intermediate (WTI), a suivi la même tendance, bondissant d’environ 7% en plus d’une semaine.

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"Jusqu'à présent, l'évolution du marché reflète uniquement une augmentation de la prime de risque, plutôt qu'un changement des fondamentaux", précise Warren Patterson, responsable de la stratégie matières premières chez ING.

Un producteur très marginal

Et pour cause, Israël est un acteur très marginal sur le marché de l’or noir (0,001% de la production mondiale en 2022 selon Le Monde). Si le conflit reste cantonné à la situation actuelle, tous les spécialistes s’accordent à dire que cela n’aura aucune conséquence sur l’offre de brut.

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"Le conflit entre Israël et le Hamas n'a pas eu d'impact direct sur les flux pétroliers", confirme l’Agence internationale de l’Énergie (IEA) dans son dernier rapport mensuel. Elle s’attend toujours à ce que la production mondiale augmente de 1,5 million de barils par jour cette année, et de 1,7 million en 2024, pour atteindre de nouveaux records.

Le risque iranien

L’Agence note cependant que les investisseurs resteront sur le qui-vive. Le Moyen-Orient est une région hautement stratégique. Plus d’un tiers du commerce maritime mondial de pétrole passe par le détroit d'Ormuz, coincé entre l'Iran et Oman.

"Nous pourrions voir les États-Unis, alliés d'Israël, adopter une position plus dure à l'égard de l'Iran, ce qui pourrait à terme entraîner une réduction de l'offre de pétrole."

Warren Patterson
responsable de la stratégie matières premières chez ING

Le plus gros risque pour le marché du brut est donc la position de l’Iran. La république islamique, qui fait partie des 10 plus importants pays producteurs de pétrole dans le monde avec plus 3 millions de barils qui sortent de terre chaque jour, a récemment menacé les Israéliens d’une action "préventive" s’ils poursuivent leur siège de la bande de Gaza.

D’aucuns craignent une confrontation directe entre les deux puissances régionales. Obligeant alors les États-Unis à intervenir. "Nous pourrions voir les États-Unis, alliés d'Israël, adopter une position plus dure à l'égard de l'Iran, ce qui pourrait à terme entraîner une réduction de l'offre de pétrole", prédit Warren Patterson.

Il rappelle que si les Américains ont adopté des sanctions sur le pétrole iranien depuis plusieurs années, ils ne les appliquent plus avec autant de fermeté qu’auparavant, sans doute dans le but de freiner le rebond des prix de l’or noir. Mais tout pourrait changer si le conflit s’envenime. "Une application plus stricte de ces sanctions signifierait la perte potentielle d'au moins 500 millions de barils par jour." Ce qui risque très probablement de bouleverser l’équilibre entre offre et demande dans les mois à venir.

Le Brent à un niveau record?

Quelles en seraient les conséquences pour les marchés financiers? Les experts de Bloomberg Economics ont pris leur calculette et un chiffre en est sorti: le Brent risque alors de s’envoler jusqu’à 150 dollars le baril. Soit son plus haut niveau jamais enregistré.

150
dollars
En cas de confrontation directe entre Israël et l'Iran, Bloomberg Economics pense que le cours du Brent pourrait s'envoler jusqu'à 150 dollars.

"Le prix du brut ne quadruplera peut-être pas, comme ce fut le cas en 1973 lorsque les États arabes ont imposé un embargo en représailles au soutien apporté par les États-Unis à Israël lors de la guerre de cette année-là. Mais si Israël et l'Iran se tirent mutuellement des missiles, les prix du pétrole pourraient s’envoler, comme ce fut le cas après l'invasion du Koweït par l'Irak en 1990", estiment-ils.

Dans ce scénario catastrophique, jugé très peu probable, le VIX – l’indice de la peur – bondit de 16 points et les bourses sont en proie à une importante vague de panique. Au niveau sectoriel, les valeurs les plus délaissées seraient celles des loisirs, de la santé, de l’alimentation et des boissons.

Une récession mondiale

Une telle envolée des cours de l’or noir aura également des répercussions sur la politique monétaire. "Un choc pétrolier de cette ampleur ferait échouer les efforts déployés pour maîtriser [la hausse] des prix", prévient-on chez Bloomberg Economics. Les économistes imaginent ainsi l'inflation mondiale remonter à 6,7 % l'année prochaine.

"Un choc pétrolier de cette ampleur ferait échouer les efforts déployés pour maîtriser [la hausse] des prix."

Bloomberg Economics

Les banques centrales – Réserve fédérale (Fed) et Banque centrale européenne (BCE) en tête – devront dans ce cas de figure poursuivre leurs hausses de taux. Cela déclencherait de vives tensions sur le marché obligataire. Le Bund allemand, par exemple, pourrait allègrement franchir la barre symbolique de 3%.

In fine, c’est l’économie mondiale qui s’en trouverait grippée. Les experts de Bloomberg Economics ont calculé que la croissance ralentirait à 1,7% en 2024 (-1 point de pourcentage). Ce qui à leurs yeux équivaut à une récession mondiale.

La géopolitique au cœur des marchés

Il ne faut cependant pas tomber dans un pessimisme extrême. Outre un conflit confiné ou une confrontation directe entre Israéliens et Iraniens, un troisième scénario existe, à savoir la possibilité que la guerre s'étende aux pays voisins comme le Liban ou la Syrie. Cela risque de provoquer dans ce cas un bond de 10% des prix pétroliers, à l'image de ce qui s'est passé lors du conflit israélo-libanais durant l'été 2006.

Les conséquences économiques seraient sans surprise plus lourdes qu'actuellement, avec un ralentissement de la croissance mondiale à 2,4% et un léger rebond de l'inflation. Sur les marchés financiers, les actions chuteraient sans que cela ne déclenche pour autant un mouvement de panique général.

S'il est impossible de dire à ce stade vers quel scénario nous nous dirigeons, une chose est certaine: le risque géopolitique est redevenu la principale préoccupation des investisseurs.

Dossier | Guerre Israël-Hamas

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Le résumé
  • Malgré un regain de tensions, la guerre en Israël n'a pas réellement changé les fondamentaux du marché pétrolier. Car le pays est un producteur très marginal de brut.
  • Le principal risque est une confrontation directe entre Israël et l'Iran, qui sort actuellement plus de 3 millions de barils par jour.
  • Dans ce scénario catastrophe, le cours du Brent pourrait grimper jusqu'à un niveau record de 150 dollars le baril, provoquant une lourde chute des marchés financiers et une récession mondiale.
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