Festivals: des hausses de prix bien au-delà du niveau de l'inflation
Vous l’avez sans doute remarqué si vous allez à un festival cette année: les tickets sont de plus en plus chers. L'Echo a compilé les prix de ces 10 dernières années.
Presque 300 euros pour aller profiter de l’entièreté du Graspop, de Rock Werchter, ou de Tomorrowland. Une bonne centaine pour La Semo et Esperanzah. Sans compter les trajets, les boissons, la nourriture... Les festivals sont-ils devenus des activités de luxe? Qu'ils soient petits ou grands, aucun n’échappe à la règle: en 10 ans, tous ont sensiblement augmenté leurs tarifs.
Entre 2013 et 2023, l'augmentation du prix des pass combi (tous les jours de l'événement) de tous les festivals que nous avons étudiés dépasse largement celle de l'indice des prix à la consommation pour la même période (27,3%). Les Ardentes (+135%), Graspop (+87%) et Dour (+86%) forment le trio de tête, mais cela ne signifie pas pour autant qu'ils sont les plus chers, ou les moins attractifs.
Des événements plus grands
Si la tendance globale est à l'inflation des prix, les raisons à ce phénomène sont multiples et propres à chaque acteur.
Tout d'abord, les évènements s'agrandissent: augmentation du nombre de scènes (de 5 à 16 pour Tomorrowland), davantage de (grosses) têtes d'affiches, jours supplémentaires, nouvelles infrastructures... L'élargissement de l'offre est la première raison de cette hausse des prix, selon Samuel Chappel, le directeur de LaSemo, qui se déroulera le week-end du 7 juillet à Enghien.
"Si tout va bien, on parle d'environ 10% de marge dans les prévisions optimistes."
"Un autre élément important est la professionnalisation de la structure. On n'organise pas un festival aujourd'hui comme on le faisait 15 ans auparavant, il y a beaucoup plus d'exigences: de sécurité, sanitaire ou encore administrative". Des normes et des règles dont les coûts explosent et qui ont, dès lors, un impact sur le budget global.
Les Ardentes changent de dimension
Parmi les festivals que nous avons analysés, celui des Ardentes, qui se tiendra du 6 au 9 juillet à Liège, affiche la plus forte hausse. Le prix du pass de quatre jours est ainsi passé de 187 euros l'an dernier, à 247 euros cette année. En 2013, le prix de ce même pass était de 105 euros...
"Cette hausse est due à un changement de catégorie pour Les Ardentes", commente Fabrice Lamproye, le directeur du festival. "Nous sommes passés d'un budget de 14 millions d'euros à plus de 20 millions d'euros cette année, et nous sommes devenus, en termes d'affiche et de capacité, le plus grand festival européen de musique urbaine".
Outre un changement de catégorie pour le festival, qui s'est positionné à 100% sur le rap et le hip-hop dans les années 2010, la hausse globale des coûts dans le secteur a également pesé sur la facture, selon le directeur. "Nous sommes doublement impactés, car la taille du festival a augmenté, tout comme les augmentations tarifaires de nos fournisseurs, la main d'œuvre, la location du matériel... On parle de 30% d'augmentation en un an".
Le cachet des artistes
Si la hausse du cachet des artistes est souvent avancée par de nombreux acteurs comme l'une des principales causes de la hausse du prix du ticket, Fabrice Lemproye tempère. "Il y a une augmentation progressive du prix du cachet, c'est vrai, mais depuis longtemps. On a une affiche qui est plus coûteuse, avec de plus grosses têtes d'affiches, mais cela reste en rapport à l'augmentation de la taille du festival."
"Ce n'est pas parce que c'est de la culture qu'il faut brader les prix."
Le public semble également jouer un rôle dans cette hausse, cela est dû à des attentes plus importantes concernant les prestations, "les équipes débarquent à 50 ou 60 alors qu'ils vont être cinq sur scène. Tout cela coûte de l'argent" nous glisse LaSemo.
Pas de quoi rebuter le public
Malgré l'augmentation des prix, les festivals belges affichent généralement complet ou presque. Le prix ne semble donc pas freiner l'affluence. "Le public est conscient qu'il y a une offre de qualité derrière. C'est vrai que c'est un budget important, mais ce n'est pas parce que c'est de la culture qu'il faut brader les prix", conclut Samuel Chappel.
Enfin, les festivals profitent-ils de cette hausse généralisée pour s'octroyer des marges confortables? "Chez nous, si tout va bien, on parle d'environ 10% de marge dans les prévisions optimistes", avance le directeur des Ardentes. Autre son de cloche du côté de LaSemo qui "espère être à l'équilibre cette année". En musique comme en business, il y a autant de réalités que d'acteurs.
Nous avons contacté une dizaine de festivals belges afin d'obtenir les prix des tickets 1 jour et des pass combi depuis leur année de création.
Certains festivals (Esperanzah, LaSemo, Micro Festival, Tomorrowland) ont joué le jeu et nous avons pu obtenir rapidement une liste de données complètes. Pour les autres, nous avons... fouillé. Nous sommes remontés 10 ans en arrière via les archives web, les réseaux sociaux, les articles de presse et interviews de l'époque, de 2013 à 2023.
Les prix affichés ici sont les prix finaux, nous n'avons pas pris en compte les préventes ou autres promotions.
Certains tickets comprennent les frais de réservation, d'autres le camping, le parking, etc. Certains festivals se déroulent sur 2, 3, 4 ou 5 jours. Ils n'ont pas le même nombre de scènes ni d'artistes. Il faut donc prendre des pincettes pour les comparer entre eux.
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