La banque ING a offert en septembre à l’un de ses clients un taux fixe négocié de 0,92% pour un crédit hypothécaire à 20 ans. Il s’agit d’un plus bas historique, sous le seuil symbolique de 1%. On le sait, ce type de taux n’est pas offert à tout le monde. Tout dépend de la situation personnelle de l’emprunteur, de ses ressources propres, de ses capacités de remboursement, etc. Il ne faut donc pas courir chez son banquier et espérer obtenir le même taux. En revanche, faut-il y courir pour tenter de refinancer son crédit?
Si le taux du crédit en cours est supérieur à 2,6% ou 2,7%, ça vaut la peine de consulter.
Le site guide-épargne.be, sur lequel les consommateurs peuvent indiquer les offres qu’ils ont reçues des différentes banques avec une preuve à l’appui, constate depuis quelques semaines une intensification des baisses des taux offerts par les banques.
Belfius, par exemple, a soumis à un client, en septembre, un taux fixe à 20 ans négocié à 1,12%. Toujours pour un prêt hypothécaire à 20 ans, KBC a proposé un taux de 1,1% en juillet à un emprunteur. Ce sont deux exemples parmi d’autres. BNP Paribas Fortis, Fintro, ING… ces banques ont toutes récemment proposé des taux fixes à 20 ans sous 1,2%, se livrant ainsi à une concurrence accrue. Un mouvement qui va à l’encontre des dernières recommandations de la Banque nationale de Belgique (BNB), et même de Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne (BCE). La BNB, d’ailleurs, "exhorte à nouveau les banques à la prudence dans l’octroi et les conditions des prêts hypothécaires".
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Coûts de la démarche
Ces taux extrêmement bas peuvent donner envie à ceux qui ont déjà un emprunt de le renégocier pour faire baisser leur mensualité ou raccourcir l’échéance de leur crédit. Mais cela vaut-il la peine dans tous les cas?
Outre les taux, il est important de prendre en compte les coûts liés au refinancement, qui comprennent non seulement des frais de dossier, mais aussi des frais de notaire, qui peuvent atteindre plusieurs milliers d’euros si vous changez de banque (frais de mainlevée). La facture peut donc vite grimper.
"Sur un refinancement de 200.000 euros, par exemple, les frais de mainlevée s’élèvent à environ 1.000 euros, et ceux de l’inscription hypothécaire à 5.000 euros", chiffre le notaire Renaud Grégoire. Mais si le montant du crédit refinancé dépasse les 300.000 euros, "les frais d’inscription sont quasi multipliés par deux", soit environ 10.000 euros. Quant aux frais de dossier, qui peuvent varier d’une banque à l’autre, ils s’élèvent à 250 euros chez BNP Paribas Fortis par exemple.
Dans le cas où le refinancement raccourcit la durée du crédit, les emprunteurs remboursent leur emprunt avant terme, et l’institution financière peut demander une indemnité de remploi, qui s’élève à 3 mois d’intérêts.
Un refinancement ne se justifie donc que si tous ces frais sont inférieurs au bénéfice apporté par la baisse du taux qui vous sera proposé par la banque.
La "règle" de 1%
Une autre "règle" prévaut en matière de refinancement: il doit y avoir une différence d’au moins 1% entre l’ancien et le nouveau taux pour que ce refinancement soit intéressant. "Mais s’il reste une durée inférieure à 10 ans pour le crédit en cours, alors il faut plus qu’une différence de taux de 1% pour que cela soit intéressant pour le client, vu les frais engendrés par un refinancement", précise Patrick Segers, courtier en crédits hypothécaires chez Segers & Associé.
Globalement, le refinancement est intéressant pendant la première moitié du remboursement de l’emprunt, car c’est durant cette période que le poids des intérêts se fait le plus sentir.
"Beaucoup de gens ont déjà refinancé leur crédit sur les deux dernières années", indique également le courtier. La Banque nationale a en effet relevé, depuis 2015 (année durant laquelle le taux fixe à 25 ans est passé sous 3%), près de 200.000 refinancements de crédits hypothécaires. Chez BNP Paribas Fortis, le leader du marché hypothécaire en Belgique, les refinancements ont représenté 22% de la production de crédits en 2018 contre 30% en 2015 et 2016. Et depuis le début de l’année, la demande concerne 20% de la production totale de la banque.
"Si le taux du crédit en cours est supérieur à 2,6% ou 2,7%, alors oui, ça vaut la peine de consulter", précise Patrick Segers, qui estime le moment propice à un refinancement, "car le taux fixe sur 15 ans est en deçà de 1,4%."
Situation personnelle
Tout dépend toutefois de la situation personnelle de l’emprunteur, puisque "renégocier son taux de crédit revient à souscrire un nouveau prêt", rappelle Valéry Halloy de chez BNP Paribas Fortis, qui recommande de calculer l’avantage procuré par un taux d’intérêt inférieur par rapport aux frais de rachat.
L’acceptation de la demande dépend de nombreux facteurs: raisons de la renégociation, aspect risque de crédit…
"Globalement, le refinancement est intéressant pendant la première moitié du remboursement de l’emprunt, car c’est durant cette période que le poids des intérêts se fait le plus sentir. On estime que la durée restante doit être supérieure à 10-12 ans, sans quoi, les frais seront trop importants", détaille Valéry Halloy.
C’est donc le bon moment, si la durée de votre crédit est supérieure à dix ans et si votre ancien taux est supérieur de 1% à celui négocié, de procéder à une demande de refinancement. Mais entre la demande et l’acceptation, rien n’est joué. "L’acceptation de la demande dépend de nombreux facteurs: raisons de la renégociation, aspect risque de crédit…", indique BNP Paribas Fortis. Le dossier doit donc être solide.