Outre la pension légale, quelque 3,1 millions de salariés en Belgique ont la perspective d’une pension complémentaire en partie financée par l’employeur ou par le secteur dans lequel ils sont actifs.
Selon Steven Janssen, patron de Sigedis, la banque de données qui gère les pensions complémentaires, il est impossible de dire précisément combien de travailleurs ne peuvent pas compter sur une pension complémentaire. Vu le nombre de salariés du secteur privé en Belgique, ils sont encore des centaines de milliers dans le cas.
Si ces travailleurs n’épargnent pas à titre individuel, ils devront donc se contenter de la pension légale une fois venue l’heure de la retraite.
La pension de salarié moyenne s’élève à 1.599 euros, mais uniquement en cas de carrière complète. La pension légale est donc en réalité souvent inférieure à ce montant et ne suffit pas pour profiter de sa retraite sans souci financier. Raison pour laquelle le ministre fédéral des Pensions, Daniel Bacquelaine (MR), veut offrir à tous les salariés la possibilité de se constituer une pension via l’employeur, c’est-à-dire dans le deuxième pilier.
Le gouvernement fédéral a déjà approuvé un avant-projet de loi le 21 juillet. Ce texte peut encore évoluer, mais les grandes lignes sont acquises.
L’intervention de l’employeur dans la constitution de cette pension libre complémentaire pour salarié (PLCS) est limitée.
1. Comment la PLCS fonctionne-t-elle?
En tant que travailleur salarié, vous êtes libre de décider si vous souhaitez une PLCS et, si oui, de choisir l’assureur ou le gestionnaire de fonds qui constituera ce petit extra.
"L’employeur peut pour sa part conclure un accord cadre avec un organisme de pensions grâce auquel le travailleur peut conclure une PLCS, explique Kristiaan Andries, conseiller juridique pour le prestataire de services RH SD Worx. Mais le travailleur n’est pas obligé d’opter pour cet organisme."
Vous déterminez en outre vous-même le risque que vous prenez. Vous pouvez choisir une assurance épargne de la branche 21 avec garantie de capital ou d’autres formules pouvant proposer un rendement supérieur, mais vous faisant courir le risque de voir une partie du capital investi partir en fumée.
2. Comment la PLCS est-elle financée?
La PLCS est exclusivement financée par le travailleur au moyen de retenues sur le salaire net. L’employeur doit uniquement s’assurer que ces retenues sont versées dans le plan de pension du travailleur. "L’obligation de l’employeur s’arrête d’ailleurs là", poursuit Kristiaan Andries.
Le travailleur détermine aussi lui-même le montant des retenues sur le salaire net. L’employeur n’est rien de plus qu’une courroie de transmission dans le cadre de la PLCS.
Le montant que vous souhaitez épargner via la PLCS est aussi révisable chaque année. Mais ce montant est limité à 1.600 euros ou 3% du salaire brut annuel, selon le montant supérieur.
→ Exemple: si vous gagnez 54.000 euros brut l’an prochain, vous pouvez faire verser 3% ou 1.620 euros dans le plan de pension par votre employeur.
Attention, si dans le courant de la deuxième année préalable vous avez déjà épargné pour une pension complémentaire via un employeur, ce montant sera déduit du maximum autorisé.
→ Exemple: si votre ancien employeur a versé 250 euros dans une assurance groupe en 2017, vous devrez déduire ce montant des 1.620 euros que vous voulez épargner pour la PLCS en 2019, puis faire retenir l’année suivante 1.370 euros (1.620 – 250 euros) sur votre salaire.
La PLCS reste ainsi limitée aux salariés n’ayant aucune pension complémentaire ou une pension complémentaire minimale uniquement.
3. Quel est le rendement?
Le rendement dépend de la formule choisie. Si vous optez pour une assurance épargne avec garantie de capital, le rendement sera inférieur à ce qu’il pourra être via un fonds de pension, qui propose un rendement généralement meilleur mais comporte aussi plus de risques.
Dans le cadre de la PLCS, l’employeur ne doit garantir aucun rendement, une différence importante par rapport aux pensions complémentaires que les employeurs proposent. Si votre employeur verse des contributions à une assurance groupe ou dans un fonds de pension, il doit garantir un rendement minimum sur ces versements tant que vous restez en service, soit au moins 1,75% sur les versements effectués ces deux dernières années. Cette obligation n’existe pas dans le cadre d’une PLCS.
4. Y a-t-il des frais?
Vous êtes redevable d’une taxe d’assurance de 4,4% sur les versements dans une PLCS. Il est très probable également que les assureurs et les fonds de pension facturent des frais d’adhésion et/ou de gestion.
Examinez attentivement ces coûts en calculant le rendement réel de vos contributions à une PLCS. Si par exemple l’assureur offre un rendement de 1,5%, il vous faudra alors près de trois ans pour récupérer la taxe d’assurance de 4,4%.
5. Mes contributions apportent-elles un avantage fiscal?
Les primes payées pour la PLCS via les retenues sur votre salaire procurent un avantage fiscal de 30%. Si l’année prochaine, votre employeur verse par exemple 1.600 euros à votre organisme de pension, il en découlera pour vous une réduction fiscale de 480 euros. Vous bénéficiez aussi de cet avantage fiscal si vous cotisez à la pension d’entreprise proposée par votre employeur.
"La PLCS est moins intéressante pour le salarié qu’une assurance groupe, même avec des contributions limitées de l’employeur."
"Le travailleur peut combiner cette réduction fiscale de 30% avec d’autres avantages fiscaux qu’il reçoit parce qu’il épargne en plus pour sa pension, comme dans le cadre de l’épargne pension individuelle", annonce le cabinet du ministre des Pensions.
6. Et si vous changez d'employeur?
En cas de résiliation du contrat de travail, les retenues pour le financement de la PLCS cessent automatiquement. Vous devrez le cas échéant demander à un nouvel employeur s’il souhaite retenir et verser une partie de votre salaire pour la PLCS.
7. Quand pouvez-vous toucher le capital de la PLCS?
Vous ne pouvez toucher le capital épargné qu’au moment de votre départ effectif à la pension (éventuellement anticipée). L’âge normal de la pension est encore de 65 ans, mais il sera relevé à 67 à partir de 2030.
Cette limitation vaut en principe aussi pour les pensions d’entreprise et sectorielles.
8. Le capital versé est-il soumis aux cotisations sociales et à l'impôt?
La pension PLCS fait l’objet d’une cotisation de 3,55% pour le financement de l’assurance maladie et invalidité et d’une cotisation de solidarité de 0 à 2%. Vous êtes aussi redevable sur le capital de 10% à l’impôt des personnes physiques (à majorer des centimes additionnels communaux). Les charges sociales et fiscales pour le versement du capital sont exactement les mêmes que pour le versement d’une pension d’entreprise.
9. Quelle est la différence avec les pensions complémentaires prévues par les employeurs ou les secteurs?
Ces plans de pension complémentaire relèvent uniquement de l’initiative de l’employeur ou du secteur auquel un salarié appartient. Si votre entreprise ou votre secteur ne prévoit pas de pension complémentaire pour son personnel, vous ne pouvez rien y changer.
De plus, ces pensions complémentaires sont financées en partie avec des primes des employeurs. " Ces primes ne font pas partie du décompte de votre salaire. Elles figurent éventuellement comme élément isolé sur votre fiche de paie ", explique Jean-Luc Vannieuwenhuyse, conseiller juridique chez SD Worx. Vous n’en sentirez pas l’effet sur votre portefeuille, à moins que des retenues ne soient faites sur votre salaire en vue de financer la pension d’entreprise.
La nouvelle possibilité de constituer une PLCS est en revanche intégralement pour le compte du salarié. C’est comme si vous mettiez une partie de votre salaire net de côté pour épargner. De plus, l’employeur ne doit garantir aucun rendement sur vos contributions pour la PLCS.
10. Quelle est la différence avec l'épargne-pension individuelle?
Dans le cadre du troisième pilier des pensions, les indépendants et les fonctionnaires peuvent aussi faire de leur propre initiative des versements pour une formule d’assurance ou un fonds de pension.
Ces contributions sont aussi associées à un avantage fiscal. Si vous ne versez pas plus de 960 euros cette année, cela produira une réduction fiscale de 30% (maximum 288 euros). Entre les 960 et les 1.230 euros, vous pouvez compter sur une réduction de 25% (maximum 307 euros). La PLCS permet d’épargner de façon plus avantageuse sur le plan fiscal. Vous pouvez épargner au moins 1.600 euros, pour un avantage fiscal de 480 euros.
Comme on l’a déjà écrit plus haut, vous pouvez cumuler ces avantages fiscaux, même si vous épargnez dans le cadre de l’épargne à long terme, fiscalement intéressante. Cette formule vous permet d’épargner 2.130 euros cette année, ce qui donne aussi un avantage fiscal de 30% ou 693 euros.
Conclusion
La PLCS est-elle intéressante?
La PLCS est un nouvel incitant fiscal à épargner via votre employeur en vue d’une pension complémentaire. L’épargne passe par des retenues sur le salaire net, ce qui peut être un plus si vous n’êtes pas le plus discipliné des épargnants.
Pour les travailleurs disposant d’une moins bonne assise financière, le danger réside surtout dans le choix de la formule. Un plan de pension associé à des coûts ou des risques élevés pourrait leur jouer des tours.
"Il reste à voir si la PLCS séduira de nombreux salariés. Étant donné que le salarié finance lui-même la PLCS, elle est moins intéressante pour lui qu’une assurance groupe, même avec des contributions limitées de l’employeur", conclut Kristiaan Andries.
En ce qui concerne l’épargne-pension dans le troisième pilier, votre employeur ne joue aucun rôle. Vous pouvez poursuivre les versements pour l’épargne-pension individuelle si vous en changez.